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Impôts & Taxes

Fiscalité des revenus du capital : le Conseil d’analyse économique propose un rééquilibrage

Le Conseil d’analyse économique (CAE)* a présenté sa nouvelle note sur la fiscalité des revenus du capital qui fait apparaître son extrême hétérogénéité, avec des taux faibles, par exemple, pour l’immobilier et l’assurance-vie.

Les auteurs de cette Note, Patrick Artus, Antoine Bozio et Cecilia García-Peñalosa (avec la participation de Clément Carbonnier) exposent les points qui font le plus largement consensus au sein des experts et en tirent plusieurs recommandations pour la fiscalité française.

La fiscalité des revenus du capital apparaît comme un enjeu de politique économique majeur car elle a de fortes conséquences sur la croissance et les inégalités à long terme. A ce titre, la note souligne le traitement particulier de l’investissement immobilier. « Depuis 1965, les loyers implicites des propriétaires occupants sont exonérés de fiscalité (hors taxe foncière) ; les plus-values immobilières des propriétaires occupants sont totalement exonérées ; les autres plus-values immobilières bénéficient d’abattements substantiels; les revenus locatifs peuvent bénéficier de multiples dispositifs de réductions fiscales (Scellier, Duflot, etc.). Ensuite, les revenus de l’épargne effectuée en produits d’assurance-vie bénéficient de taux d’imposition très inférieurs à ceux du régime normal. Enfin, les livrets d’épargne (A, PEL, PEP, LDD) bénéficient également d’une large exemption mais sont généralement plafonnés. »

Les économistes s’accordent pour considérer que, parmi tous les revenus du capital, les revenus fonciers devraient être les plus lourdement imposés : la majeure partie de ces revenus est de la rente (la rente foncière) qui peut être taxée sans effet négatif sur l’économie. Il est ainsi surprenant que la France offre une fiscalité plus douce à la rente foncière qu’aux investissements dans des activités productives et innovantes. Quant à l’objectif paternaliste d’une société de propriétaires, il est discutable à la fois parce qu’il réduit la mobilité du travail et parce qu’il expose les ménages à des risques potentiellement importants.

Dès lors, on peut concevoir deux types de réformes : soit repenser la totalité du système d’imposition ; soit procéder à une série d’ajustements ciblés dans le cadre du système actuel. Les recommandations du CAE peuvent être mises en pratique dans le court terme indépendamment des décisions sur une réforme fiscale globale plus substantielle. Trois aspects semblent essentiels : réduire l’hétérogénéité des traitements fiscaux, clarifier la fiscalité de l’épargne à long terme et taxer les rendements réels plutôt que les rendements nominaux. Ceci permettrait de dégager des recettes fiscales permettant de réduire les taux.

Les 5 recommandations du CAE :

1 –  Limiter très fortement les exonérations en réduisant les avantages fiscaux des assurances-vie aux produits assortis d’une sortie en rente, garantissant qu’il s’agit de facto d’une épargne retraite.

2 –  Rééquilibrer la fiscalité vers l’immobilier, en taxant les loyers implicites nets des intérêts d’emprunts avec possibilité de report déficitaire si les intérêts sont supérieurs au loyer. À défaut, en actualisant les valeurs locatives pour remettre la taxe foncière en ligne avec la valeur effective des propriétés.

L’imposition des loyers implicites doit prendre en compte l’endettement éventuel du propriétaire-occupant : ne sera imposé que le loyer net des intérêts d’emprunts avec possibilité de report déficitaire si les intérêts sont supérieurs aux loyers. Par ailleurs, la taxation des plus-values doit être rendue plus neutre par rapport aux autres formes de revenus et autres types d’investissement. D’un côté, il s’agit d’éviter une optimisation fiscale consistant à convertir des profits en plus-values, de l’autre, la durée de l’investissement doit être prise en compte simplement et sans constituer de niche.

3 – Neutraliser la taxation des plus-values par rapport aux autres formes de revenus et aux autres types d’investissements. En imposant les plus-values réelles (et non nominales) en les annualisant, avant de les intégrer au barème de l’impôt sur le revenu. La période de détention n’aura d’effet qu’à travers la prise en compte de l’inflation et l’annualisation de la plus-value, qui déterminera le barème d’imposition.

4 – Mettre fin progressivement à l’épargne défiscalisée dédiée et la dissocier du financement des investissements à fort rendement social. Il semble adéquat de dissocier l’objectif de lissage de la consommation (pour les ménages modestes) de l’objectif de financement du logement social ou d’autres investissements à fort rendement social.

5 – Publier de façon systématique les données statistiques sur les sorties et entrées de résidents fiscaux afin de pouvoir évaluer l’ampleur de l’exil fiscal et ses conséquences réelles sur les finances publiques. L’information disponible aujourd’hui ne permet pas de comparer les risques d’optimisation entre différentes formes de revenus et les risques d’optimisation internationale, ce qui rend délicat le choix d’un système d’imposition.

« Si ces recommandations peuvent être appliquées relativement rapidement, elles ne doivent pas se substituer à une réflexion plus globale sur l’imposition des revenus du capital en France. Notre système présente des marges de progression importantes en termes de lisibilité, d’efficacité et d’équité », concluent les auteurs de la note.

Cette Note a été présentée au Premier ministre le mardi 10 septembre 2013.

* Placé auprès du Premier ministre, le Conseil d’analyse économique a pour mission « d’éclairer, par la confrontation des points de vue et des analyses, les choix du gouvernement en matière économique ». Le Conseil d’analyse économique examine les questions qui lui sont soumises par le Premier ministre. Il peut procéder de sa propre initiative à l’analyse prospective de questions économiques qu’il estime pertinentes pour la conduite de la politique économique du pays.

Les notes du conseil d’analyse économique, n° 9 : « Fiscalité des revenus du capital »

Source : www.cae-eco.fr

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Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre fondatrice de la Fédération Française de l'Immobilier sur Internet (F.F.2.I.) www.ff2i.org et membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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