Le métier de syndic de copropriété arrive à un tournant décisif. Pilier de la gestion immobilière, il encadre 90% des immeubles collectifs en France. Pourtant, il souffre encore d’une image dégradée. Longtemps cantonné à un rôle administratif, le syndic devient aujourd’hui un acteur clé de la transition écologique. Il porte la rénovation énergétique, gère les obligations réglementaires et pilote les plans pluriannuels de travaux. Le 3 juillet 2025, Henry Buzy-Cazaux a présenté au Conseil national de l’habitat un rapport qui interpelle. Il y décrit une profession indispensable, mais fragilisée. Pour rester légitime et efficace, le syndic doit monter en compétence, adapter son modèle économique et répondre aux nouveaux défis techniques et environnementaux. L’avenir de la copropriété passe par lui. Encore faut-il lui en donner les moyens.
Sommaire :
- Le syndic de copropriété face à un paradoxe : indispensable, mais critiqué ?
- Comment le syndic de copropriété devient-il l’acteur clé de la transition environnementale ?
- Syndic de copropriété : quelles formations pour relever les défis futurs ?
- Le modèle économique du syndic de copropriété peut-il être viable ?
- Syndic de copropriété : vers une régulation renforcée de la profession ?
- L’attractivité : enjeu crucial pour l’avenir du syndic de copropriété
- Communication et médiation : nouveaux défis du syndic de copropriété
Le syndic de copropriété face à un paradoxe : indispensable, mais critiqué ?
Une profession au cœur du marché de l’habitat collectif
Les syndics de copropriété gèrent 90% des immeubles collectifs en France. Ce taux de pénétration exceptionnel, souligné par le rapport Buzy-Cazaux devant le Conseil national de l’habitat, dépasse largement celui des autres métiers de l’immobilier comme la gestion locative ou la transaction.
Chaque année, 3 000 nouvelles copropriétés viennent s’ajouter aux 600 000 existantes. Cette dynamique alimente la demande pour une gestion professionnelle durable. Dans le même temps, l’autogestion et les syndics bénévoles reculent. Pourquoi ? Parce que la complexité réglementaire ne cesse d’augmenter. Les obligations comme le carnet d’entretien et l’extranet copropriété dissuadent les solutions non professionnelles. En réponse, de plus en plus de copropriétés se tournent vers les syndics professionnels. Objectif : garantir une gestion conforme, efficace et sécurisée.
Une image publique dégradée malgré son importance
Paradoxalement, malgré son rôle clé dans la gestion de l’habitat collectif, le syndic de copropriété souffre d’une image dégradée dans l’opinion publique. L’administration de biens en copropriété fait régulièrement l’objet de critiques, notamment de la part des pouvoirs publics.
En 2024, Gabriel Attal, alors Premier ministre, évoquait la nécessité de “déverrouiller les syndics” dans sa déclaration de politique générale. Comme le souligne Henry Buzy-Cazaux, cette formule, « pour obscure qu’elle fût », traduisait clairement une défiance au plus haut niveau de l’État envers le fonctionnement actuel de la profession. Ce climat de suspicion révèle un décalage important entre la réalité du métier – pilier de la vie en copropriété – et la perception qu’en ont les citoyens et les décideurs politiques.
C’est justement pour éclairer cette contradiction que le Conseil national de l’habitat s’est autosaisi du sujet, à l’initiative de son président. Le rapport Buzy-Cazaux met ainsi en lumière cette tension persistante entre l’utilité sociale du syndic – garant de l’application du règlement de copropriété et acteur central des assemblées générales – et une réputation trop souvent entachée par des incompréhensions ou des pratiques contestées.
Comment le syndic de copropriété devient-il l’acteur clé de la transition environnementale ?
Un périmètre élargi sans adaptation du cadre de rémunération
Depuis la loi du 10 juillet 1965, puis la loi ALUR, le rôle du syndic s’est considérablement élargi. À l’origine centré sur la simple gestion des biens, le syndic est devenu un acteur clé des politiques publiques dans l’habitat collectif. Aujourd’hui, le syndic ne se limite plus aux parties communes. Il lutte contre les marchands de sommeil, signale les violences conjugales, accompagne la rénovation écologique et soutient la densification urbaine, notamment via la surélévation des immeubles.
En parallèle, le syndic assume un rôle de médiateur. Mais, cette mission sociale est complexifiée par la diversité croissante des copropriétaires et occupants. Gérer une copropriété, c’est désormais concilier des attentes multiples dans un cadre toujours plus exigeant.
Comme le souligne le rapport : « Le syndic, avant même d’être confronté à la difficulté d’emporter l’adhésion d’une majorité pour prendre des décisions collectives souhaitables à la valorisation du patrimoine collectif, fait face à une forte hétérogénéité des profils. »
Or, le cadre de rémunération des syndics, fixé par la loi ALUR du 24 mars 2014, n’a pas évolué. Pourtant, les missions s’empilent au fil des réformes. Et, les nouvelles responsabilités n’ont jamais entraîné de revalorisation du contrat de base. Résultat : les prestations annexes restent limitées, malgré une charge de travail croissante.
Ce décalage entre missions et moyens fragilise toute la profession. Il devient urgent de repenser le modèle de gestion des copropriétés. Parce qu’aujourd’hui, les syndics doivent maîtriser les charges, entretenir les immeubles et piloter la transition énergétique. Le tout, sans adaptation des outils ou des ressources.
La rénovation énergétique : une mission centrale pour le syndic de copropriété
La transition environnementale du parc immobilier repose sur l’engagement actif des syndics. Ils ne se contentent plus de la gestion courante. Ils doivent désormais lancer la dynamique de rénovation énergétique, évaluer les bâtiments via un DPE collectif ou un audit énergétique, orienter les travaux et activer les financements.
Le rapport Buzy-Cazaux le rappelle : «?Transformer techniquement les immeubles collectifs dans nos villes exige des préalables que seul le syndic peut assumer. »
Toutefois, cette mission exige une montée en compétences et une formation continue spécialisée. D’autant plus dans un contexte où, en Île-de-France, les travaux coûtent en moyenne 4 093 € par lot et par an (source : FNAIM).
À cet effet, le rapport soutient la proposition de loi Amel Gacquerre. Celle-ci, prévoit d’exempter les copropriétaires de l’interdiction de louer, s’ils ont réalisé tous les travaux possibles, sur le plan technique et juridique.
Autres mesures proposées :
- Harmoniser les DPE collectif et individuel,
- Mettre en œuvre le PPT (plan pluriannuel de travaux),
- Renforcer les fonds de travaux.
Enfin, le rapport met l’accent sur le prêt collectif à adhésion simplifiée, instauré par la loi du 9 avril 2024. Pour le rendre opérationnel, il faut adapter les obligations de transmission aux banques. Sans réglage juridique, ce levier financier restera bloqué. Le gouvernement et les acteurs financiers doivent encore lever ces verrous pour accélérer la rénovation.
Syndic de copropriété : quelles formations pour relever les défis futurs ?
Former pour mieux rénover : un impératif pour la profession immobilière
Le président fondateur de l’IMSI appelle à une refonte ambitieuse de la formation des professionnels de l’immobilier. Objectif : préparer la profession aux enjeux climatiques et réglementaires. Il propose une mesure claire : intégrer obligatoirement un volet environnemental dans toutes les formations continues. Concrètement, les 42 heures triennales devront inclure au moins 3 heures sur l’écologie et la rénovation énergétique.
Cette obligation s’étendra aussi aux formations initiales :
- BTS Professions Immobilières
- Bachelors
- Masters en gestion de copropriété
Les référentiels devront intégrer ces contenus environnementaux dès la rentrée. Quant au CNTGI (Conseil national de la transaction et de la gestion immobilières), il devra superviser et garantir l’application de ces exigences. Sa mission : assurer la qualité et l’uniformité de la formation.
Mais, au-delà de l’écologie, il faut aussi consolider les savoir-faire opérationnels : maîtriser les outils d’extranet copropriété et gérer efficacement les impayés de charges. En résumé : former mieux, c’est outiller la profession, renforcer son rôle et accélérer la transformation écologique de l’habitat collectif.
Petites copropriétés : un angle mort préoccupant pour la transition écologique
Un enjeu critique émerge : les petites copropriétés sont de plus en plus abandonnées par les syndics professionnels. Motif : une rentabilité jugée trop faible. Or, ce désengagement freine la rénovation énergétique. Sans syndic de copropriété engagé, aucun pilotage n’est possible.
Pour encadrer ces cas, l’ordonnance du 30 octobre 2019 a créé un régime allégé pour :
- les copropriétés de moins de cinq lots principaux,
- ou celles dont le budget prévisionnel est inférieur à 15 000 € sur trois exercices.
Mais, cette mesure encourage l’auto-gestion et les syndics bénévoles. Le rapport le regrette, surtout dans un contexte d’urgence environnementale. Résultat : la plupart de ces petites copropriétés n’apparaissent pas au registre national. Et, sans données fiables, l’État ne peut pas cibler ses aides.
C’est pourquoi, le rapport appelle à une mobilisation collective :
- Les professionnels doivent revenir vers ces copropriétés délaissées.
- Le législateur doit adapter le contrat type ALUR à leur réalité économique.
Sans ces ajustements, tout un pan du parc immobilier risque de rester en marge de la transition énergétique. Un risque que la filière ne peut plus ignorer.
Le syndic d’intérêt collectif : une spécialisation émergente
Depuis le 9 avril 2024, la loi crée le syndic d’intérêt collectif. Objectif : accompagner les copropriétés dégradées. Ces syndics doivent :
- suivre 20 heures de formation spécialisée chaque année (comptabilité, dispositifs publics de sauvegarde),
- et obtenir un agrément préfectoral.
À ce jour, moins de 40 syndics ont été certifiés via QualiSR (syndic de redressement). Ce chiffre souligne la pénurie de professionnels formés. Le rapport est clair : gérer une copropriété en difficulté prend deux fois plus de temps qu’une copropriété classique. Conséquence directe : sans revalorisation des honoraires, la profession peine à recruter des volontaires pour cette mission.
Le rapport sénatorial de juillet 2024 (Amel Gacquerre et Mariane Margaté) recense 215 000 copropriétés avec plus de 20% d’impayés sur leur budget annuel. L’ANAH prévoit une subvention spécifique : environ 100 € par lot et par an. Mais, les retards de versement posent problème. Ils fragilisent la trésorerie des cabinets déjà sous tension.
Le modèle économique du syndic de copropriété peut-il être viable ?
Une méconnaissance massive des honoraires de syndic
Une enquête IPSOS révèle un chiffre marquant. Seulement un tiers des copropriétaires connaît le montant des honoraires de syndic dans leurs charges de copropriété. Et, dans les faits, à peine 10% estiment correctement ce montant. En moyenne, les copropriétaires surestiment par dix le coût réel des services d’administration de biens. Une confusion qui fausse les représentations et alimente une défiance injustifiée.
Henry Buzy-Cazaux souligne un double constat : “Les copropriétaires croient payer dix fois plus que le tarif réel. Cela montre deux choses : une attente de service très élevée, et un écart de perception sur la valeur réelle des prestations fournies.”
Or, cette méconnaissance économique complique les décisions collectives en assemblée générale. Elle freine notamment les investissements dans la transition énergétique, qui reposent sur des fonds de travaux bien compris et bien gérés. En somme, valoriser la transparence sur les honoraires de syndic, c’est renforcer la confiance, améliorer la compréhension des charges, et faciliter les projets structurants en copropriété.
L’impératif de revalorisation des honoraires
Les études de PWC et de l’Association des responsables de copropriété l’affirment clairement. Les honoraires de syndic devraient augmenter d’au moins 50% pour correspondre à la réalité des missions aujourd’hui assumées. Certes, la loi ALUR impose un contrat type depuis 2014. Mais, ce cadre, trop rigide, empêche d’adapter les prestations aux besoins spécifiques des immeubles, notamment en rénovation énergétique.
“En figeant les règles, la loi a provoqué un nivellement tarifaire par le bas et bloqué toute personnalisation des services.”
Face à ces limites, une réflexion s’ouvre. Il devient urgent de revoir le cadre légal. L’objectif ? Autoriser une tarification plus juste, notamment pour les missions liées au plan pluriannuel de travaux (PPT) et à la gestion des fonds de travaux. Aujourd’hui, les syndics gèrent des études préparatoires complexes et pilotent des prêts collectifs pour financer la transition énergétique. Ces missions sont essentielles, mais non rémunérées. La profession demande donc à pouvoir facturer ces prestations, à la hauteur de leur valeur ajoutée.
Syndic de copropriété : vers une régulation renforcée de la profession ?
Les options de restructuration professionnelle
Le rapport identifie trois solutions pour renforcer l’encadrement de la gestion de copropriété :
- Finaliser la logique de la loi ALUR avec la commission de contrôle,
- Créer un ordre professionnel,
- Mettre en œuvre une corégulation.
La commission de contrôle, pourtant prévue par la loi depuis 2014, n’a jamais vu le jour. Ce constat alarmant figure noir sur blanc dans le rapport. La bonne nouvelle est que la ministre du Logement s’est engagée à la constituer dans les prochaines semaines. Ce geste marquerait enfin une volonté de réguler concrètement la profession.
L’exemple belge fait référence. En effet, la Belgique a créé en 1993 son Institut des professions immobilières. Résultat : des honoraires presque deux fois plus élevés qu’en France, mais aussi une meilleure reconnaissance du métier. L’adhésion obligatoire coûte 935 € par an, incluant l’assurance responsabilité civile. Même au Québec, les pouvoirs publics réfléchissent à un encadrement officiel de la profession. Un projet de loi est en cours pour structurer le métier de gestionnaire de copropriété.
En parallèle, le CNTGI pourrait voir ses pouvoirs renforcés : ses avis, aujourd’hui consultatifs, deviendraient conformes. La profession souhaite également disposer d’un véritable pouvoir de médiation, pour résoudre les conflits entre copropriétaires et faire appliquer le règlement. Une évolution jugée indispensable face à la hausse des impayés de charges.
Un taux de non-conformité toujours trop élevé
En 2023, la DGCCRF constate un taux de non-conformité de 66% chez les syndics contrôlés. Bien que ce chiffre baisse par rapport à 2021 (73%), il reste alarmant. Un chiffre “estimé mauvais par la DGCCRF” selon le rapport. Cette situation serait due à “l’insuffisante aptitude de la profession à intégrer les évolutions règlementaires fréquentes et souvent profondes concernant la copropriété”.
Autre constat : le contrôle des formations continues laisse à désirer. Le rapport s’appuie sur des sondages et des témoignages de terrain. Il révèle que de nombreuses entreprises ne respectent pas l’obligation de former leurs collaborateurs. Face à cette situation, la DGCCRF appelle les CCI à agir. Elle les invite à vérifier systématiquement le suivi des formations, pour garantir des gestionnaires compétents et capables d’assurer leurs missions dans un cadre légal en constante évolution.
Les limites de la garantie financière “au marc le franc”
Le système actuel de garantie financière des syndics repose sur un principe dit “au marc le franc“. Ce mécanisme limite la couverture des fonds en cas de détournement. Si un syndic ne déclare que 50% des fonds à garantir, chaque copropriété ne récupère que 50% de son préjudice. Puisque dans ce système, le garant indemnise au prorata, en fonction du montant réellement couvert.
À l’inverse, les notaires bénéficient d’une garantie indéfinie. Leur système couvre intégralement les pertes, quelle que soit leur ampleur. Le contraste est frappant avec celui des syndics. De plus, une meilleure information des copropriétaires s’impose. Car, les copropriétaires ignorent souvent l’étendue réelle de la garantie. Ils doivent savoir ce qui est couvert et ce qui ne l’est pas en cas de fraude ou de faillite.
Enfin, le rapport appelle à étudier l’hypothèse d’une garantie indéfinie, plus protectrice. Mais, les garants jugent ce modèle difficile à tarifer, tant le risque peut varier d’une situation à l’autre.
L’attractivité : enjeu crucial pour l’avenir du syndic de copropriété
La gestion de copropriété peine à séduire les jeunes diplômés
La profession d’administration de biens attire peu. Selon l’IMSI, seuls 12,5% des diplômés spécialisés choisissent la gestion de copropriété. Un chiffre alarmant. L’avenir de cette profession dépend de sa capacité à entretenir le parc immobilier collectif et à piloter la transition environnementale. Mais, pour survivre, elle doit évoluer en profondeur.
Autre signal faible : la digitalisation des pratiques progresse peu. Pire, le rapport constate un retour en arrière depuis la fin du Covid. Alors que les réunions se tenaient massivement en ligne pendant la pandémie, la majorité des syndics ont repris les anciennes habitudes. Aujourd’hui, les assemblées générales virtuelles ne représentent que 5 à 10% des cas, selon les éditeurs. Pourtant, ce format pourrait renforcer le lien entre les copropriétaires et leur immeuble. La profession manque une opportunité majeure de modernisation.
Réduire la pénibilité du métier
Dans les grandes villes, les assemblées générales se tiennent systématiquement en soirée. Cette habitude, pensée pour accommoder les copropriétaires, pénalise lourdement les gestionnaires. Ainsi, les professionnels terminent rarement avant 22h, parfois bien plus tard. Et, ils enchaînent des journées exténuantes, avec des risques accrus d’insécurité lors des retours nocturnes. Ce rythme freine l’attractivité du métier.
Le rapport propose un rééquilibrage : demander aux copropriétaires de prendre une demi-journée par an sur leur temps de travail pour participer à l’AG. Une mesure réaliste, sachant qu’un gestionnaire suit 30 à 40 copropriétés chaque année. Cette transition ne dépend pas de la loi, mais des usages managériaux et professionnels. Pour préserver la santé des équipes et attirer de nouveaux talents, la profession doit réinventer ses rythmes.
Miser sur l’engagement sociétal pour séduire les jeunes
Le rapport souligne un point clé : les jeunes professionnels ne s’engagent que si le métier porte une dimension RSE claire et tangible. Pour répondre à cette attente, les syndics peuvent agir sur plusieurs leviers :
- promouvoir la parité,
- intégrer les personnes en situation de handicap,
- réduire la consommation énergétique,
- ou encore soutenir des causes caritatives.
Exemple concret : un syndic lyonnais a installé un potager collaboratif sur sa terrasse, cultivé par l’équipe elle-même.
Repenser l’image du métier de syndic de copropriété
Le métier de syndic souffre d’une image datée. Le rapport souligne que “les discours de la profession elle-même sur la profession doivent évoluer”. Cessons de “parler en permanence de difficulté du métier, de contraintes horaires, de pénibilité” et valorisons “la confiance dont ils sont dépositaires, leur influence positive, le pouvoir qu’ils revendiquent avoir pour faire prendre les bonnes décisions”.
Par ailleurs, une réflexion émergente concerne le changement du nom du métier. Plusieurs appellations sont évoquées : “administrateur d’immeubles”, “commissaire d’immeubles”, ou “building manager”.
Accélérer la transformation numérique
La modernisation technologique devient un levier stratégique. Trois priorités se dégagent :
- Interopérabilité des logiciels,
- intégration de l’intelligence artificielle,
- amélioration des extranets copropriété.
Le rapport alerte : la profession sous-exploite la richesse des données qu’elle gère. Ainsi, elle doit renforcer la qualité de leur traitement en collaborant davantage avec les SSII.
L’intelligence artificielle apporte beaucoup aux pratiques des syndics professionnels en allégeant la charge de travail des gestionnaires… sans les remplacer en rien. Les exemples de recours à l’IA pour des tâches à plus ou moins forte valeur ajoutée sont multiples :
- analyser la jurisprudence,
- comparer des devis,
- répondre automatiquement aux demandes simples via des chatbots intelligents. En effet, les chatbot savent d’ores et déjà assurer aux clients des réponses circonstanciées et précises.
Ce soutien technique libère du temps pour des missions à plus forte valeur ajoutée. Enfin, l’interopérabilité des logiciels doit aussi faciliter la passation entre syndics. Un changement fluide, sans rupture ni conflit, renforce la confiance des copropriétaires et modernise la gestion.
En combinant RSE, communication positive, et transformation numérique, le métier peut redevenir attractif et visible pour une nouvelle génération formée aux défis environnementaux.
Communication et médiation : nouveaux défis du syndic de copropriété
Comment améliorer la communication avec les copropriétaires ?
Le rapport souligne un point sensible : la communication entre syndics et copropriétaires reste insuffisante. Certes, la loi de 1965 définit une relation triangulaire entre syndicat, conseil syndical et syndic. Mais, dans les faits, le copropriétaire agit comme un client. Il paie des honoraires pour un service, il attend donc une relation commerciale claire et réactive.
Le rapport préconise plusieurs axes d’améliorations. Il faut créer des extranets plus conviviaux, plus complets, et plus fréquemment actualisés. Même si “le taux de copropriétaires consultant effectivement ces extranets ne semble pas excéder les 10% à ce jour”. De plus, le rapport recommande aussi “l’installation dans les copropriétés, notamment dans les ascenseurs, d’écrans interactifs autorisant l’affichage d’informations à destination des occupants”.
Enfin, le rapport recommande un recours plus large aux réseaux sociaux de copropriété. Ces plateformes permettent de fluidifier les échanges, de renforcer la transparence, et d’améliorer l’image du syndic. D’ailleurs, 2 copropriétaires sur 3 déclarent avoir une meilleure opinion de leur syndic quand ce dernier initie l’usage de ces réseaux.
Pour rétablir un lien de confiance, les syndics doivent moderniser leurs canaux de communication. Extranets, affichage dynamique, réseaux sociaux : autant de leviers à activer pour replacer le copropriétaire au cœur du service rendu.
Le rôle de médiateur social du syndic de copropriété
Avec la diversité croissante des copropriétaires et la multiplication des tensions, le syndic endosse un rôle central de médiateur. Le rapport l’affirme clairement : les copropriétés subissent plus de tensions sociales qu’auparavant et les conflits entre copropriétaires explosent.
Le rapport identifie plusieurs causes :
- la dégradation économique, qui désolvabilise de nombreux ménages,
- l’arrivée massive de primo-accédants,
- la diversification des profils d’occupants, marquée par la disparition des communautés d’intérêt.
Pour prévenir les blocages, le rapport recommande de favoriser activement la médiation. Objectif : résoudre les conflits en amont, éviter l’escalade et désengorger les tribunaux. De plus, il suggère de rendre obligatoire la saisine d’un médiateur pour régler les différends entre copropriétaires. Autre proposition forte : autoriser les syndics professionnels à devenir médiateurs, à condition de respecter une stricte indépendance. Ils ne pourraient intervenir que dans des copropriétés dont ils ne sont pas mandataires. Instaurer un cadre légal de médiation pourrait renforcer la cohésion dans les copropriétés et redonner du sens au rôle du syndic.
La problématique du recouvrement des impayés
Les impayés de charges de copropriété deviennent un défi majeur. À cet effet, le rapport observe une hausse inquiétante du risque d’impayés et du taux effectif constaté par les syndics et l’Observatoire des impayés de loyers et de charges (Ministère du Logement). En outre, cette situation a conduit les commissaires de justice à proposer une réforme. Ils demandent à pouvoir recouvrer les charges impayées sans jugement préalable, via un titre exécutoire.
Toutefois, Henry Buzy-Cazaux rejette fermement cette proposition. Selon lui, elle supprime le droit à une défense contradictoire et ne permet pas d’ajuster la dette au cas par cas. Il insiste : « Il est essentiel que le juge puisse apprécier avec discernement le montant exigible. »
Dans les faits, la grande majorité des situations se règlent à l’amiable, grâce aux démarches du syndic. Ainsi, le rapport rappelle que la justice doit rester le cadre légitime pour trancher les litiges en cas d’échec de la conciliation.
Conclusion
Le syndic de copropriété vit aujourd’hui un moment charnière. Acteur incontournable de 90% des immeubles français, il peine pourtant à redorer son blason. Un paradoxe révélateur d’une profession en pleine mutation. Pourtant, la transition énergétique change la donne. Le syndic devient le chef d’orchestre de la rénovation. Mais à quel prix ? Seuls 10% des copropriétaires connaissent vraiment ce qu’ils paient. Une méconnaissance qui handicape une profession réclamant 50% d’augmentation.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 66% de non-conformité selon la DGCCRF, une commission de contrôle fantôme depuis 2014, et seulement 12,5% des jeunes diplômés tentés par le métier. L’urgence est là.
“L’avenir de cette profession n’est assuré qu’au prix d’évolutions de diverses sortes. Entre défis environnementaux et crise d’attractivité, le syndic de copropriété doit se réinventer”, prévient Henry Buzy-Cazaux.