Dans le cadre du baromètre national des prix de l’immobilier, Thomas Lefebvre, Directeur Scientifique de Meilleurs Agents dresse le bilan du marché immobilier en 2022. Quelles sont les perspectives pour 2023 ?
2022, une bonne année pour le marché immobilier
L’année 2022 se caractérisera par un marché immobilier relativement bon. Les estimations montrent que le volume de transactions s’élèvera à 1,1 million. Ce qui en fera la deuxième meilleure année après le record établi en 2021.
L’évolution du marché lors douze derniers mois a été globalement positive, bien que manquant de linéarité. En effet, le fort dynamisme enregistré durant le premier semestre a contribué aux bons résultats en matière de volume des ventes.
Toutefois, le second semestre a été affecté par le changement de politique monétaire de la Banque Centrale Européenne. Cette dernière a entraîné un ralentissement du crédit, et donc une limitation des possibilités d’achat pour certains acheteurs potentiels.
Il est à signaler que les taux de crédit ont augmenté considérablement au cours des douze derniers mois. Ainsi, le taux d’un prêt immobilier sur vingt ans a progressé de 1% à 2,4%. Cette hausse implique que les conditions favorables auxquelles le marché avait habitué les particuliers depuis plusieurs années sont maintenant révolues.
Prix de l’immobilier : une rupture entre le premier et le second semestre 2022
Quant aux prix de l’immobilier, ils ont continué à progresser de l’ordre de 4,6%. Notamment grâce à la belle performance des zones rurales affichant une progression plus importante que celles des 10 principales villes (+7,5% contre +4,7%).
Cependant, il y a eu une différence entre le premier et le second semestre. En effet, les prix ont connu une hausse de 3,6% entre janvier et juin, mais seulement 1% entre juillet et décembre au niveau national.
Les grandes métropoles de l’Hexagone sont particulièrement touchées par un phénomène d’atterrissage des prix de l’immobilier. En effet, les tarifs ont augmenté de 3,2% au cours de la première partie de l’année et seulement de 1,4% durant la seconde. Cela limite ainsi le pouvoir d’achat immobilier des 10 plus grandes villes françaises, à l’exception de Paris. Certaines villes comme Bordeaux montrent même une tendance à la baisse depuis le début de l’année.
Doit-on s’attendre à la poursuite des baisses de prix de l’immobilier enclenchées en 2022 ?
En effet, il faut s’attendre à des corrections dans les mois à venir. Si les taux continuent à augmenter, cela affectera la capacité de financement des ménages et leur solvabilité. Par conséquent, les prix de l’immobilier devraient diminuer.
Le taux de crédit sur 20 ans pourrait augmenter à 3% dans les prochains mois
Les annonces récentes suggèrent que le taux de crédit sur vingt ans pourrait augmenter à 3% dans les prochains mois. Cette hausse représenterait alors une diminution de 6% du pouvoir d’achat immobilier par rapport aux 2,4% actuels. Or, pour compenser entièrement la hausse des taux depuis janvier 2022, les prix de l’immobilier devraient chuter de 20% en 2023 !
Toutefois, il est peu probable que ce scénario se réalise. En effet, la nouvelle géographie immobilière post-Covid devrait favoriser les zones rurales et péri-urbaines. Les prix de l’immobilier y sont plus abordables et l’endettement moins important. Par conséquent, ces secteurs pourraient connaître une hausse des tarifs alors que le marché immobilier national devrait demeurer stable en 2023.
Les villes du Top 10 plus affectées par les baisses de prix de l’immobilier
Quant aux villes du Top 10, elles devraient être plus affectées par la poursuite des baisses de prix qui entreront en vigueur en 2022. En effet, Paris devrait connaître une diminution de 3% et son prix moyen passer sous les 10 000 € avant l’été. À moins que le marché immobilier ne soit plus dynamique durant la saison printanière. Habituellement, cette période de l’année est très active dans la capitale.
Enfin, on estime que la hausse des taux et de l’inflation en 2023 aura un impact négatif considérable sur les volumes de transactions. Ainsi, elles pourraient chuter de 20% à 30% ! Cette baisse serait due à une compréhension retardée du marché par les vendeurs. Mais, aussi, du fait de la diminution des ventes “de confort” par rapport aux ventes “contraintes”. Il est donc peu probable que le volume de transactions atteigne le million d’unités durant l’année à venir.
Quels défis attend le marché immobilier dans les années à venir ?
Notons que l’entrée du marché immobilier dans un cycle baissier est également accompagnée par des changements législatifs. Citons notamment la mise en place de mesures visant à améliorer l’efficacité énergétique, à encadrer les loyers et à appliquer une taxe foncière.
La mise en place de mesures visant à améliorer l’efficacité énergétique
Bien que ces mesures puissent avoir un impact sur le prix de l’immobilier, elles ne sont pas suffisantes pour perturber le marché immobilier à court terme. En effet, ces mesures ne touchent qu’une catégorie de biens et d’acheteurs spécifiques. À savoir, Les investisseurs, qui ne représentent qu’environ 15% du marché. Certes, ces derniers auront plus de difficultés à entrer sur le marché et leur durée d’amortissement sera plus longue. Cependant, cela ne suffira pas pour causer une perturbation significative du marché immobilier.
À l’inverse, l’augmentation des taux aura pour effet une diminution de la demande globale. Néanmoins, la question de la rénovation énergétique constitue un vrai défi durable. L’interdiction de louer des logements peu performants thermiquement induit un changement au niveau des règles. Mais, on peut penser que des opportunités seront à saisir pour les porteurs de projets qui comprendront et assimileront ces règles plus vite que les autres.
Une accélération de la baisse des prix de l’immobilier pour les biens de type “passoires énergétiques”
2023 devrait, en effet, percevoir une accélération de la baisse des prix de l’immobilier pour les biens de type “passoires énergétiques”. Car ce sera la première année où les interdictions de location entreront en vigueur.
Pour rappel, au 1er janvier, l’interdiction de louer des biens qui consomment plus de 450 kWh/m² d’énergie finale par an entre en vigueur. Or, cette interdiction est la première étape d’un changement structurel du marché. En 2025, elle s’appliquera à tous les biens classés G et en 2028 et 2034 respectivement aux étiquettes F et E.
Assurément, la rénovation énergétique aura une influence durable sur l’évolution du marché dans les années à venir. Les effets de la lutte contre les passoires thermiques sont déjà visibles. Puisque des propriétaires choisissent de mettre leurs biens en vente plutôt que d’effectuer les travaux nécessaires. Ce qui entraîne une surabondance de produits et des acheteurs qui voient cela comme un moyen de négocier.