L’accès à la propriété en France serait-il en train de redevenir possible ? Contre toute attente, oui. Une étude Wüest Partner révèle une amélioration spectaculaire. 40% des ménages peuvent désormais acheter un appartement contre seulement 27% fin 2023. Pour les maisons, le bond est encore plus marqué, passant de 33% à 48%. Cette évolution résulte d’un triple effet : recul des prix (-4,6% pour les appartements), baisse des taux après 2023, et hausse des revenus. Pourtant, il faut encore 7,8 années de salaire pour acquérir un appartement. Et surtout, ces chiffres encourageants masquent de profondes inégalités territoriales. Décryptage d’une amélioration réelle mais fragile.
Sommaire :
- Quels facteurs expliquent l’amélioration de l’accès à la propriété depuis 2023 ?
- Comment mesurer concrètement l’accessibilité à la propriété ?
- Le revenu médian suffit-il pour accéder à la propriété en France ?
- Combien coûte réellement l’accès à la propriété en France ?
- ?Combien d’années de revenu faut-il pour devenir propriétaire ?
- Où l’accès à la propriété est-il le plus difficile en France ?
- Que nous réserve 2026 pour l’accès à la propriété ?
À retenir – L’accès à la propriété en France
- 40% des ménages peuvent acheter un appartement en 2025 contre 27% en 2023, et 48% pour une maison contre 33%.
- Avec 39 000€ par an, un ménage médian ne peut pas acquérir un logement type.
- Paris et la Côte d’Azur restent inaccessibles (moins de 30% des ménages) tandis que l’Indre ou la Creuse offrent un accès facilité (plus de 80%).
- Les taux repartent à la hausse fin 2025, les prix cessent de baisser, aucune amélioration n’est attendue en 2026.
- Il faut aujourd’hui 7,8 années de revenu pour un appartement.
Quels facteurs expliquent l’amélioration de l’accès à la propriété depuis 2023 ?
Entre 2023 et 2025, l’accès à la propriété s’est nettement amélioré grâce à trois dynamiques économiques convergentes, mises en évidence par l’étude Wüest Partner.
Première tendance : la baisse marquée des prix. Après plusieurs années de flambée, le marché a connu une correction notable. Les appartements ont perdu 4,6% et les maisons 4,2% entre 2022 et 2025, selon la base de données Wüest Partner, qui recense les prix au mètre carré issus des annonces. Cette détente des prix ouvre à nouveau la porte de l’accession à la propriété pour une partie des ménages jusque-là exclus.
Deuxième dynamique : la décrue des taux d’intérêt. Après un pic historique en 2023, les taux immobiliers se sont progressivement repliés. En octobre 2025, la moyenne s’établit à 3,2% sur 25 ans, un niveau sensiblement plus soutenable que l’année précédente. Cette détente des taux améliore automatiquement la capacité d’emprunt des ménages.
Troisième moteur : la hausse des revenus nominaux. L’augmentation des salaires a renforcé le pouvoir d’achat immobilier. L’étude révèle un rebond spectaculaire : 40% des ménages peuvent désormais acquérir un appartement « type », contre seulement 27% fin 2023. Pour les maisons, la proportion passe de 33% à 48%. En deux ans, l’accessibilité progresse donc de 13 à 15 points.

Au total, malgré un sentiment public encore marqué par la crise immobilière, les chiffres attestent d’une amélioration réelle et sensible de l’accès à la propriété en France.
Comment mesurer concrètement l’accessibilité à la propriété ?
Pour mesurer de manière objective l’accès à la propriété, l’étude Wüest Partner s’appuie sur une méthodologie précise et homogène. Elle retient deux logements types représentatifs du marché français : un appartement de 80 m² et une maison individuelle de 120 m². Les prix utilisés proviennent de la base Wüest Partner, qui agrège les valeurs au mètre carré issues des annonces sur l’ensemble du territoire, offrant ainsi une vision complète et cohérente du marché.
Le scénario de financement appliqué est identique pour tous les territoires. Il repose sur un apport de 20% du prix d’achat, un crédit immobilier à 3,2% sur 25 ans (taux observé en octobre 2025), une assurance emprunteur à 0,35% et un taux d’effort limité à 35%, conformément aux recommandations du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF).
Grâce à cette grille standardisée, l’étude détermine avec précision la proportion de ménages en capacité d’acheter l’un de ces logements types. L’analyse couvre l’ensemble des départements français ainsi que les 50 plus grandes villes, en s’appuyant sur les revenus Insee afin de garantir la fiabilité des calculs. Cette méthode permet donc des comparaisons territoriales et temporelles solides, offrant une lecture claire de l’évolution de l’accès à la propriété.
Le revenu médian suffit-il pour accéder à la propriété en France ?
En 2025, le revenu médian des ménages français atteint 39 000 € par an, selon les données Insee. Par définition, la moitié des foyers dispose donc de revenus inférieurs. Or, accéder à la propriété exige aujourd’hui des revenus situés au-dessus de ce seuil, créant un écart net entre les aspirations des ménages et leur réalité financière.
Pour acheter un appartement type de 80 m², un ménage doit percevoir 44 200 € par an, soit 13,3% de plus que le revenu médian. Pour une maison type de 120 m², le seuil requis s’établit à 40 800 €, soit 4,6% au-dessus du revenu médian. Concrètement, un ménage médian français ne peut donc pas acquérir le logement type, même si l’accessibilité s’est améliorée depuis 2023.
Cette situation met en évidence un fossé persistant entre désir de propriété et capacité réelle d’achat. Les données Insee/Ipsos sont révélatrices. Plus des deux tiers des locataires souhaitent devenir propriétaires, alors que seuls 57,4% des ménages le sont aujourd’hui. Malgré des conditions plus favorables qu’il y a deux ans, une part importante des Français demeure ainsi exclue du marché immobilier.
Combien coûte réellement l’accès à la propriété en France ?
Au niveau national, l’appartement type de 80 m² affiche un prix moyen de 310 600 €. Pour l’acquérir, un ménage doit gagner au minimum 44 200 € par an. Il doit également respecter les conditions d’emprunt standard définies par le HCSF. Résultat : 40% des ménages peuvent accéder à la propriété pour ce type de bien. À titre de comparaison, ils n’étaient que 27% fin 2023. On observe donc une progression de 13 points.
La maison type de 120 m² présente un prix moyen légèrement inférieur à 286 600 €. Par conséquent, l’accès à la propriété pour une maison apparaît paradoxalement plus accessible financièrement qu’un appartement. Le revenu nécessaire s’établit à 40 800 € annuels. Dans ce cas, 48% des ménages français peuvent prétendre à l’acquisition. Contre 33% fin 2023, cela représente une amélioration de 15 points. Ainsi, l’accès à la propriété pour une maison s’avère statistiquement plus accessible qu’un appartement. Cette donnée renverse certaines idées reçues.
Combien d’années de revenu faut-il pour devenir propriétaire ?
L’étude Wüest Partner replace l’accès à la propriété dans une perspective historique qui éclaire nettement les évolutions du marché. En 1996, un ménage devait consacrer l’équivalent de 5,5 années de revenu médian pour acquérir un logement type, un niveau qui témoignait d’une accessibilité encore raisonnable. Par la suite, ce ratio s’est fortement dégradé, dépassant 9 années dans les années 2000, en pleine période de tension immobilière et de dynamique spéculative.
En 2025, il redescend à 7,8 années de revenu pour un appartement et 7,2 années pour une maison. Si ces niveaux restent supérieurs à ceux des années 1990, ils marquent un réel recul par rapport à 2022, où le ratio avait culminé à 9,3 années au plus fort de la crise d’accessibilité.
Autrement dit, l’accès à la propriété s’améliore sur le temps long, même si le chemin demeure ardu pour une partie des ménages. Cette tendance à la baisse traduit un rééquilibrage progressif du marché, tout en rappelant que le niveau d’avant-crise n’est pas encore pleinement retrouvé.
Où l’accès à la propriété est-il le plus difficile en France ?
Les disparités territoriales sont particulièrement marquées, dessinant une France immobilière « à deux vitesses ». Dix départements se démarquent par leur très faible accessibilité : moins de 30% des ménages peuvent y acheter un appartement type. Sans surprise, Paris arrive en tête, suivi des Alpes-Maritimes, des Pyrénées-Atlantiques, de la Charente-Maritime, des Hauts-de-Seine, mais aussi de la Haute-Corse, de la Seine-Saint-Denis, du Var, du Val-de-Marne et de la Corse-du-Sud.
À l’opposé, six départements offrent un accès nettement plus ouvert, avec plus de 80% des ménages en capacité d’acheter : l’Indre, la Haute-Marne, la Meuse, les Ardennes, la Creuse et la Nièvre. Ces territoires ruraux ou en décroissance démographique se distinguent par des prix très abordables, qui compensent parfois des revenus médians moindres.
Au total, 64 départements permettent à plus de 60% des ménages d’acquérir un appartement type, signe que l’accession reste possible sur une large partie du territoire. Pour les maisons, la situation est encore plus contrastée : dix départements affichent une capacité d’achat inférieure à 20%, révélant une tension immobilière extrême.
Quelles sont les villes les plus accessibles ?
Parmi les 50 plus grandes villes françaises analysées par Wüest Partner, cinq se démarquent par leur accessibilité. Plus de 70% des ménages peuvent y accéder à la propriété. Il s’agit de Tourcoing, Le Mans, Mulhouse, Limoges et Saint-Étienne. Ces villes conjuguent des prix modérés et des revenus médians relativement élevés. Elles créent ainsi des conditions favorables pour les primo-accédants.
À l’opposé, sept villes affichent une accessibilité extrêmement faible. Moins de 20% des ménages peuvent y acheter. On trouve Paris, Nice, Aubervilliers, Montreuil, Boulogne-Billancourt, Annecy et Aix-en-Provence. À Nice notamment, la situation est particulièrement tendue. Un ménage médian ne peut financer que 42 m² environ selon les calculs de l’étude. Ce chiffre est très loin des 80 m² du logement type utilisé pour mesurer l’accès à la propriété. Cette situation illustre donc l’impossibilité pour les classes moyennes d’acquérir un logement décent dans certaines métropoles attractives.
Que nous réserve 2026 pour l’accès à la propriété ?
Les perspectives pour 2026 s’annoncent nettement moins favorables en matière d’accès à la propriété. Après deux années d’amélioration progressive, la dynamique ralentit nettement. À la fin de l’année 2025, trois signaux convergents laissent présager une phase de stagnation : une légère remontée des taux, qui réduit la capacité d’emprunt des ménages ; l’arrêt de la baisse des prix, mettant fin à la correction engagée depuis 2022 ; et un revenu disponible susceptible d’être freiné par les mesures budgétaires à venir.
Dans ce contexte, l’étude n’anticipe aucune progression notable de l’accessibilité en 2026. Au mieux, le marché devrait rester stable ; au pire, une légère dégradation pourrait apparaître si les taux poursuivent leur hausse. Les disparités entre territoires et catégories de ménages devraient donc perdurer.
Malgré l’amélioration réelle mais peu visible observée depuis 2023, l’immobilier n’est plus perçu avec la même évidence qu’autrefois comme une valeur refuge. La demande demeure prudente, reflétant un climat d’incertitude qui pourrait peser durablement sur l’accession à la propriété.

