À l’heure où les réglementations se durcissent contre les passoires thermiques, une enquête menée par Rothelec, spécialiste du chauffage électrique, révèle les inquiétudes et les inerties des propriétaires face à cette transformation du parc immobilier. Depuis janvier 2025, les logements classés G au diagnostic de performance énergétique (DPE) sont interdits à la location. Pourtant, seulement 21 % des propriétaires concernés ont déjà engagé les travaux nécessaires. Entre manque d’information et obstacles financiers : que faire concrètement face à une passoire thermique ?
Sommaire :
- L’alerte est lancée : la fin de la location des passoires thermiques
- Une information encore trop floue chez les propriétaires
- Passoire thermique : des travaux encore loin d’être réalisés
- Le coût et le manque d’information : les freins majeurs
- Quelles solutions pour rénover une passoire thermique ?
- Quels systèmes de chauffage privilégier ?
- Aides financières : des leviers essentiels, mais encore jugés insuffisants
L’alerte est lancée : la fin de la location des passoires thermiques
Depuis le 1er janvier 2025, il est interdit de louer ou de renouveler un bail pour un logement classé G au diagnostic de performance énergétique (DPE). Ce type de logement énergivore, appelé passoire thermique, est au cœur d’un dispositif réglementaire visant à améliorer la performance énergétique du parc immobilier français.
L’enjeu est de taille : réduire les émissions de CO2, diminuer la précarité énergétique, et inciter les propriétaires à rénover. Pourtant, cette mesure, encore trop peu connue du grand public, bouleverse le marché locatif.
Selon l’enquête Rothelec, menée auprès de 1 011 propriétaires concernés, cette interdiction est mal comprise et souvent ignorée. Cependant, les conséquences sont concrètes : impossibilité de louer, perte de revenus, dévalorisation du bien immobilier.
Une information encore trop floue chez les propriétaires
L’étude Rothelec met en lumière une faille importante : le manque de communication sur la réglementation. Seuls 34 % des sondés se disent bien informés. Pourtant, cette méconnaissance n’est pas sans conséquence. Elle peut entraîner des litiges, notamment avec des locataires mieux renseignés. Elle peut aussi provoquer des blocages administratifs, par exemple lors de la mise en location du bien.
Le ministère de la Transition Écologique a pourtant lancé plusieurs campagnes d’information. Mais, celles-ci restent trop techniques ou mal relayées dans les circuits habituels des propriétaires bailleurs (agences, notaires, syndicats de copropriété…).
Le DPE, désormais opposable juridiquement depuis le 1er juillet 2021, devient un document stratégique dans la gestion locative. Ainsi, il conditionne la valeur d’un bien, sa louabilité et son attractivité sur le marché.
Passoire thermique : des travaux encore loin d’être réalisés
Les chiffres révélés sont frappants : seulement 1 propriétaire sur 5 a réalisé les travaux nécessaires. À l’inverse, 64 % des propriétaires n’ont rien prévu ou repoussent leur décision. Or, cette inaction pourrait aggraver le déséquilibre du marché locatif, notamment dans les zones tendues.
À noter que le coût moyen d’une rénovation énergétique complète pour sortir un logement du statut de passoire thermique oscille entre 20 000 et 40 000 €, selon l’ADEME. Mais, ce montant peut grimper bien plus haut dans les cas de copropriétés ou de bâtis anciens mal isolés.
Le coût et le manque d’information : les freins majeurs
L’étude Rothelec confirme un constat préoccupant : 47 % des propriétaires évoquent un frein financier. Ce résultat fait écho aux données de l’enquête nationale du Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE). Celui-ci souligne, lui aussi, l’insuffisance des aides disponibles pour financer des rénovations globales.
La méconnaissance du DPE, mentionnée par 22 % des répondants, souligne le besoin d’un accompagnement technique. En effet, le diagnostic reste un document parfois complexe à interpréter, et les travaux à entreprendre ne sont pas toujours bien identifiés.
De plus, 18 % préfèrent vendre une passoire thermique plutôt que de la rénover. Ce phénomène commence déjà à se faire sentir dans certaines régions, avec une hausse des ventes de logements classés F ou G. D’ailleurs, ce phénomène a été observé par le Conseil Supérieur du Notariat, qui alerte sur la perte de valeur de ces biens.
Quelles solutions pour rénover une passoire thermique ?
La rénovation énergétique passe par une approche globale, mais certains travaux prioritaires ressortent dans les intentions des propriétaires :
L’isolation thermique, en particulier des combles (responsables de 30 % des déperditions thermiques selon l’ADEME), reste la solution la plus rentable. La combinaison isolation + ventilation + chauffage performant permet généralement de gagner de 2 à 3 classes DPE.
Les outils de simulation disponibles sur le site France Rénov’ permettent d’estimer les gains énergétiques en fonction des travaux envisagés.
Quels systèmes de chauffage privilégier ?
Changer de système de chauffage est une étape clé pour sortir du statut de passoire thermique. Voici les préférences relevées dans l’enquête :
Les PAC air-eau ou air-air sont très performantes, mais nécessitent des travaux plus complexes. Les radiateurs à inertie offrent une solution simple, sans gros chantier, particulièrement adaptée aux appartements.
Aides financières : des leviers essentiels, mais encore jugés insuffisants
Face aux coûts élevés des travaux de rénovation énergétique, les aides financières jouent un rôle crucial pour sortir un logement de son statut de passoire thermique. Pourtant, selon l’enquête Rothelec, 31 % des propriétaires estiment que les dispositifs actuels restent insuffisants pour couvrir l’ensemble des frais engagés.
Des dispositifs multiples, mais complexes à mobiliser
En France, plusieurs aides publiques sont disponibles. La plus connue reste MaPrimeRénov’, mise en place par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) en 2020. Elle est accessible à tous les propriétaires, quels que soient leurs revenus. Toutefois, son montant varie selon les ressources du foyer et les types de travaux réalisés. À titre d’exemple :
- L’isolation des combles peut donner droit à jusqu’à 1 500 € d’aide ;
- Le remplacement d’un système de chauffage par une pompe à chaleur air/eau peut être subventionné jusqu’à 4 000 €, voire plus pour les ménages modestes.
En complément, les certificats d’économies d’énergie (CEE) permettent d’obtenir des primes financées par les fournisseurs d’énergie. Ces aides sont cumulables avec MaPrimeRénov’.
Autre levier : l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ), qui permet d’emprunter jusqu’à 50 000 € sans intérêts, remboursables sur 20 ans, pour financer un bouquet de travaux. À cela s’ajoutent la TVA réduite à 5,5 % sur les matériaux et la main-d’œuvre, et des aides locales spécifiques, variables selon les régions ou les communes.
Un manque d’accompagnement et des démarches dissuasives
Malgré ces mécanismes, nombreux sont les propriétaires qui renoncent à entreprendre les démarches. Les raisons sont multiples.
C’est pourquoi le gouvernement a lancé la plateforme France Rénov’, qui centralise l’information, propose des simulateurs d’aides et permet d’entrer en contact avec un conseiller France Rénov’, censé accompagner les particuliers dans leur projet.
Une inégalité d’accès selon les profils
L’étude Rothelec révèle également une fracture d’accès à l’information selon les profils des propriétaires. Les retraités, les bailleurs non professionnels ou les personnes sans intermédiaires immobiliers peinent davantage à comprendre les aides disponibles. De plus, les copropriétés rencontrent souvent des difficultés supplémentaires liées à la lourdeur des décisions collectives et au financement partagé des travaux.
Enfin, les aides restent souvent calculées en pourcentage du montant des travaux. Ce qui signifie qu’en valeur absolue, plus les travaux sont chers, plus le reste à charge est élevé, y compris après subventions.
Vers une réforme des aides en 2025 ?
Plusieurs voix s’élèvent pour réformer en profondeur les dispositifs d’aide à la rénovation. Le Conseil d’analyse économique (CAE), dans une note de 2024, propose de rendre les aides plus lisibles, d’augmenter leur montant pour les rénovations globales, et de conditionner les avantages fiscaux à l’efficacité énergétique réelle des travaux effectués.
Le projet de loi de finances 2025 prévoit d’ailleurs une revalorisation de MaPrimeRénov’ pour les rénovations performantes, ainsi qu’un renforcement du suivi des chantiers, pour éviter les fraudes ou les effets d’aubaine.
Conclusion : agir vite pour sortir du statut de passoire thermique
La lutte contre les passoires thermiques n’est plus une option, mais une obligation légale et environnementale. À partir de 2025, les propriétaires qui n’anticipent pas les rénovations s’exposent à des sanctions, une vacance locative ou une perte de valeur de leur bien.
L’enquête Rothelec révèle une urgence : celle d’informer, d’accompagner et de financer efficacement la rénovation énergétique. Des solutions existent. Des aides sont mobilisables. Mais, sans une prise de conscience rapide et une volonté d’agir, la passoire thermique restera un frein à la transition énergétique.
Propriétaires, il est encore temps d’agir. Chaque logement rénové, c’est un pas de plus vers un parc immobilier plus durable, plus confortable et plus rentable.