L’état du marché locatif privé français en 2023 est marqué par une hausse généralisée, mais modérée des loyers. De plus, on note des variations notables selon les régions. Les métropoles comme Paris et Lyon connaissent des augmentations supérieures à l’inflation. Pour autant, certaines villes comme Montpellier, Rouen et Saint-Étienne enregistrent des baisses significatives. Cette analyse de Clameur explore ces évolutions contrastées à l’échelle locale, départementale et métropolitaine. Au-delà des chiffres, elle aborde également deux sujets brûlants. L’impact hétérogène de la hausse des taxes foncières sur les marchés immobiliers et les conséquences de l’encadrement des loyers récemment mis en place à Grenoble.
Sommaire :
- Panorama du marché locatif privé français en 2023 : un ralentissement mesuré des loyers à l’échelle nationale
- Disparités régionales marquées du marché locatif privé français en 2023
- Fiscalité locale et encadrement des loyers : des enjeux majeurs
- Encadrement des loyers à Grenoble : un zonage en décalage avec la réalité du marché ?
Panorama du marché locatif privé français en 2023 : un ralentissement mesuré des loyers à l’échelle nationale
Selon les dernières données pour 2023 présentées lors de la conférence Clameur, le marché locatif privé français affiche une tendance haussière modérée au niveau national. En effet, les loyers des appartements ont progressé de 2,30% sur un an, s’établissant à 12,49€/m². Ceux des maisons ont connu une augmentation plus contenue, de 1,50% pour atteindre 11,40€/m².

Cette hausse reste contenue, les plus fortes variations n’excédant pas l’indice de référence des loyers (IRL) qui s’établit à 3,5%. Toutefois, les petites surfaces semblent davantage impactées. puisque l’on observe une augmentation de 3,98% pour les studios (16,72€/m²) et de 1,82% pour les deux-pièces (12,77€/m²).
Durées de mise en location stables
Parallèlement, les délais de relocation sont restés relativement constants ces derniers trimestres. Ainsi, ils oscillent entre 13 et 19 jours selon les typologies. Seul le marché des maisons accuse un léger ralentissement, avec des durées de commercialisation en hausse de 2 jours pour s’établir à 14 jours en moyenne.
Durées des baux revenues à la normale
Après le pic observé en 2020 lié aux confinements, la durée médiane des baux est revenue à des niveaux proches de 2019. désormais, ils oscillent entre 2 ans et 4 mois pour les studios et 3 ans pour les grands logements. Cependant, pour les deux-pièces, on constate une baisse significative de 6 mois sur 5 ans, à 2 ans et 9 mois.
Disparités régionales marquées du marché locatif privé français en 2023
Si ces chiffres nationaux témoignent d’une relative accalmie, l’étude Clameur souligne des disparités régionales importantes. Dans l’Aisne, l’Hérault ou l’Allier, les loyers ont reculé de plus de 4% en un an. À l’inverse, des hausses dépassant les 8% ont été enregistrées dans des départements comme la Saône-et-Loire (+8,67%), l’Indre (+8,20%) ou l’Ariège (+7,80%).
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Sur le plus long terme, entre 2018 et 2023, certains territoires ont vu leurs loyers bondir de plus de 20%. C’est le cas notamment en Charente-Maritime (+23,99%), Saône-et-Loire (+21,10%) ou dans le Lot-et-Garonne (+21,00%). À l’autre extrême, l’Aisne fait figure d’exception avec une quasi-stagnation (-0,58%).
Métropoles : entre hausses notables et fortes baisses
Au niveau des métropoles, les situations diffèrent également. Paris (+3,02% pour les studios à 27,93€/m²) et Lyon (+5,42% à 16,71€/m²) ont connu des augmentations marquées malgré les dispositifs d’encadrement en vigueur.
À l’inverse, des villes comme Montpellier (-6,88% sur les studios à 15,74€/m²), Rouen (-8,59% à 12,84€/m²) et Saint-Étienne (-7,86% à 9,07€/m²) ont vu leurs loyers chuter de façon significative.
Dans la plupart des cas, les dynamiques sont proches entre les villes-centres et leurs périphéries. Toutefois, certaines villes comme Nantes (+4,84% d’écart en faveur de la ville-centre à 15,00€/m² pour les studios) ou Tours (+4,97% à 15,52€/m²) affichent des évolutions plus favorables en cœur d’agglomération.
Fiscalité locale et encadrement des loyers : des enjeux majeurs
Au-delà de ces constats chiffrés, un sujet cristallise l’attention des acteurs du marché locatif. Il s’agit de la politique fiscale locale autour de la taxe foncière.
En effet, l’analyse menée sur l’évolution des taux de taxe foncière entre 2012 et 2022 met en lumière des hausses très variables d’une ville à l’autre. Or, ces hausses sont sans lien apparent avec les fondamentaux des marchés immobiliers locaux (prix, loyers, rendements locatifs).
À Rouen, par exemple, on observe une évolution des prix comparable à celle de Nice sur la période. Les prix ont augmenté de 25,64% à Rouen, contre 29,38% à Nice. Cependant, le taux de la taxe foncière a été revalorisé différemment dans ces deux villes. À Rouen, il a augmenté de 25,4%, contre seulement 6,5% dans la métropole azuréenne. Une situation d’autant plus difficile à justifier que la rentabilité locative brute a reculé quasi identiquement sur ces deux territoires (-0,93% à Rouen et -0,94% à Nice).
Encadrement des loyers à Grenoble : un zonage en décalage avec la réalité du marché ?
Le récent dispositif d’encadrement des loyers mis en place à Grenoble soulève également des interrogations. En segmentant l’application de cette mesure au sein même de l’agglomération, les autorités adoptent une lecture fragmentée du marché local. Ainsi, elles créent des “zones d’isoloyers” pour refléter des loyers différenciés.
Or, l’analyse fine des niveaux de loyers dans les différents quartiers montre une structure spatiale beaucoup plus diffuse que ce zonage théorique. Près de 82% des secteurs statistiques étudiés affichent en réalité des loyers supérieurs à la valeur moyenne retenue pour leur zone respective.
D’ailleurs, selon plusieurs études académiques, ce type de zonage partiel entraîne des effets de report. On observe alors une hausse des loyers dans les secteurs limitrophes non encadrés. Un risque qui nécessiterait une approche plus fine et mieux ajustée aux réalités du terrain.
Si le marché locatif privé français semble donc globalement se stabiliser en 2023, ces défis fiscaux et réglementaires incitent les professionnels à rester vigilants quant aux politiques mises en œuvre localement. Des décisions qui, mal calibrées, pourraient rapidement faire dérailler une tendance encore fragile.