Les fuites d’eau, c’est une vraie calamité dans les copropriétés ! Voici une affaire traitée par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence le 28 mai 2020 qui reflète bien les problèmes rencontrés entre voisins.
Fuites d’eau provenant d’un appartement supérieur
En un effet, c’est un cas qui résume bien, les problèmes que l’on rencontre le plus souvent entre voisins. D’ailleurs pour vous en exposer les détails, je me suis inspirée d’une très bonne synthèse de Pierre Redoutay. Pour faire simple, des infiltrations d’eau provenant d’un appartement supérieur cause des dégâts à un appartement inférieur. Le sinistre excède les inconvénients normaux de la vie en copropriété. Alors on se demande comment faire cesser le trouble ?
La Cour d’appel cite plusieurs articles du Code Civil. Pour commencer l’article 544 qui confère le droit de jouir de la manière la plus absolue?des choses dont on est propriétaire. Très bien, toutefois, leur usage ne peut s’exercer en contrariété des lois et règlements.
On ne peut en aucun cas causer un dommage excédant les inconvénients normaux du voisinage.
Fuites d’eau et trouble anormale du voisinage
Alors se pose la question de la normalité… Elle doit s’apprécier en fonction des circonstances locales et du niveau de gravité de la situation. Ensuite, la notion de responsabilité intervient. Le dommage est-il causé suite à une faute ou à une négligence ?
En fonction de la réponse, on pourra savoir si l’on peut appliquer les dispositions de l’article 1240 du Code Civil. En effet, celui-ci, oblige le fautif à réparer le dommage causé à autrui.
Le trouble anormal de voisinage étant un fait, sa preuve est libre et s’établit par tous moyens y compris des présomptions.
Ainsi, une expertise judiciaire et des photographies sont annexées au rapport. Il apporte un éclairage sur l’appartement incriminé. Il apparait en mauvais état, inhabité et en cours de travaux interrompus depuis 2005.
De ce fait, l’expert exclut qu’une canalisation ou une installation commune soient à l’origine du sinistre. D’ailleurs, il n’a été relevé aucun incident du jugement à l’encontre du syndicat des copropriétaires de l’immeuble.
La propriétaire de l’appartement fuyard reproche à l’expert de se fonder essentiellement sur le rapport des pompiers. Car, ils sont intervenus pour fermer un robinet d’arrêt qui a permis de faire cesser la fuite. Le robinet en question se trouvait dans le placard technique du quatrième étage. Les pompiers ont donc réussi à fermer l’eau à partir du robinet jouxtant un des compteurs desservant les appartements des parties.
Des fuites d’eau à répétition…
En outre, deux sinistres postérieurs au jugement sont intervenus par la suite dans les mêmes conditions. Là encore, ils ont nécessité l’intervention des pompiers. Dans leur rapport, ils précisent que la fuite à son origine dans un appartement au 5e étage sur un WC qu’ils ont dû fermer.
Pourtant dans sa déclaration à son assureur, la propriétaire de l’appartement du 5e explique qu’il n’était pas nécessaire pour les pompiers d’intervenir à l’intérieur de son appartement. Il suffisait de fermer le compteur accessible sur le palier, autrement dit de procéder exactement comme à l’occasion du premier sinistre.
Toutefois, le plombier de la copropriété dépêché sur les lieux confirme bien, de son côté, la nécessité de déboucher l’évacuation du WC. Ce qui corrobore d’ailleurs ce que l’expert avait mentionné dans son rapport. Il avait constaté lors de sa visite, la présence d’étiquettes apposées dans les toilettes rappelant qu’il ne fallait pas utiliser les sanitaires.
Enfin, le procès-verbal d’huissier relate les infiltrations en plafond aux mêmes endroits que lors des sinistres précédents.
En conclusion,
Avec ce faisceau de preuves, on peut en déduire que le sinistre n’a pas pour origine un événement accidentel survenu dans l’appartement du 5e.
Par conséquent, il a été demandé :
- 6 905 € pour la reprise des désordres,
- 1 500 € pour le relogement temporaire des sinistrés durant les travaux,
- 8 405 € au titre du préjudice matériel.
En revanche, la demande en paiement d’une somme complémentaire de 1 000 € au titre du préjudice moral n’est pas objectivé et a été rejetée. Pourtant avec une fuite d’eau à répétition, il y a de quoi péter les plombs !
- Cour d’appel d’Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 28 mai 2020, RG n° 18/06436