Face aux mesures annoncées par le Premier Ministre devant l’Autorité de la concurrence, la FNAIM et l’UNIS ne peuvent que déplorer l’esprit de méfiance à l’encontre des syndics de copropriété. Il est temps pour le gouvernement de rendre fonctionnel le CNTGI pour mieux s’entourer et écouter les experts en la matière…
Rappelons que depuis le 2 juillet 2015, les syndics sont dans l’obligation de reprendre le contrat-type in extenso imposé par la Loi Alur et n’ont le droit de facturer que les prestations autorisées par ce décret. Mais voilà que des sanctions vont maintenant pleuvoir, car les professionnels resteraient trop onéreux. En outre, les états datés vont être plafonnés et la mise en concurrence obligatoire des syndics va être renforcée.
Faut-il établir un nouveau contrat-type ?
Le 1er ministre semble oublier que c’est déjà le cas depuis 2015 avec l’adoption de l’un des très nombreux décrets d’application de la loi ALUR !
Le contrat-type de syndic a inclus énormément de prestations. En 20 ans, 47 nouvelles obligations ont été ajoutées. Elles ont eu pour effet mécanique d’augmenter les honoraires de base. Malgré cela, pour un copropriétaire, ces honoraires restent le plus souvent inférieurs à un contrat d’entretien chaudière, un abonnement téléphonique, ou un abonnement internet…
La FNAIM et l’UNIS avaient eu l’occasion d’obtenir du Conseil d’Etat l’annulation de bon nombre d’irrégularités contenues dans le contrat-type d’origine. Il avait été retoqué en son temps. Le voici qui ressort du bois, imposé au mépris de l’avis unanimement hostile du Conseil national de la transaction et de la gestion immobilière (CNTGI), pourtant composé de professionnels et de consommateurs.
Il est clair que ce contrat est inadapté, ce n’est pas faute de l’avoir répété. C’est pourquoi les deux syndicats proposent de le faire évoluer vers un contrat-socle, adaptable selon les spécificités des immeubles.
C’est ainsi qu’il répondra aux attentes des copropriétaires et c’est à cette condition que des sanctions financières se justifieront, considérant que les professionnels qui ne respectent pas la législation nuisent à la profession et à son image.
Encadrer certains tarifs et faciliter la transparence
Il n’existe pas aujourd’hui de moyens permettant de contrôler chaque contrat de syndic. Le seul moyen, consiste-t-il a sanctionner les professionnels qui ne proposent pas un contrat-type conforme ? Comment faire face à cette situation et obtenir plus de transparence afin de pouvoir comparer les prestations et tarifs des syndics ?
Dans le cas des prestations extraordinaires, elles sont déjà listées par le contrat-type et le décret pour l’état daté est juste attendu depuis la loi ALUR !
Il est vrai que parmi les principales entorses au contrat-type on retrouve l’ajout d’une tarification additionnelle pour le « pré-état daté ». Ce document, qui n’a pas de définition juridique précise, comprend les informations qu’un vendeur doit communiquer à un acquéreur dès la signature du compromis de vente.
Contrairement à l’état daté, qui ne peut être réalisé que par le syndic, un copropriétaire peut lui-même réaliser son « pré-état daté » sur la base notamment des informations contenues dans le règlement de copropriété et les procès-verbaux d’assemblée générale. Par contre, il semble que les syndics établissent un « état daté » qui comporte davantage d’informations que ce que préconisent les textes.
Cette prestation n’est donc logiquement pas mentionnée dans le contrat-type ALUR, ce qui n’empêche pas un nombre important de syndics de l’ajouter dans la section « Frais et honoraires liés aux mutations.
Rachid Laaraj, fondateur de SYNEVAL.
Avec le plafonnement de l’état daté, les syndics ne donneront plus que le minimum réglementaire. Les copropriétaires y perdront au change.
Christophe Tanay, Président de l’UNIS.
Selon SYNEVAL spécialiste de la mise en concurrence du mandat de syndic, le nombre de professionnels ne respectant pas le contrat-type demeure élevé. Il arrive même que certains syndics ajoutent ou suppriment des clauses, alors que cela est strictement interdit !
Certains contrats prévoient une relance avant mise en demeure facturée au copropriétaire débiteur entre 10 et 50 euros. Cette prestation est évidemment illégale, le contrat-type ALUR ne prévoit de relance payante qu’après l’envoi d’une mise en demeure et non avant. Dans certains contrats, on observe la suppression de la clause précisant que les frais de reprographie sont inclus dans la rémunération forfaitaire.
Rachid Laara
Faciliter la mise en concurrence, c’est déjà fait !
La mise en concurrence est possible depuis 1965. Elle est obligatoire depuis la loi ALUR et elle incombe au conseil syndical, avec même une obligation d’y procéder tous les 3 ans !
Alors que la grande majorité ne souhaite pas y procéder, pourquoi contraindre les copropriétaires à organiser cette pseudo consultation ? Sans compter qu’ils disposent à tout moment de la faculté de demander l’inscription de ce point à l’ordre du jour de leur prochaine assemblée générale.
Imagine- t-on une rotation des syndics tous les trois ans sur les 700.000 copropriétés de France, au moment où nous allons devoir gérer des plans pluriannuels de travaux sur la durée, en particulier pour accompagner la rénovation énergétique ? Cette volatilité artificielle aurait un coût et signerait assurément la disparition de toutes nos TPE et PME avec un gigantesque effet de concentration.
Jean-Marc Torrollion, Président de la FNAIM.
Des annonces inadaptées qui surviennent à contretemps
Des discussions ont été amorcées pour réformer la copropriété par deux ordonnances, en application de la loi ELAN (2018). Dès lors, ces mesures risquent de bousculer les travaux précédemment amorcés.
« Comment les syndics professionnels, confrontés aux enjeux de rénovation énergétique, de l’ubérisation et de l’innovation, pourraient-ils négocier puis intégrer une énième réforme dans un tel climat de mépris ? », s’étonne le Président de l’UNIS.
Certes, comme dans absolument toute profession, une minorité de syndics professionnels se situent en dehors des clous. Il serait pourtant préférable d’écouter plutôt l’immense majorité des professionnels sérieux. Ces derniers sont conscients de leur responsabilité importante au regard des volumes qu’ils gèrent (15 milliards d’euros de charges annuelles), du poids de la copropriété dans le logement des Français (30% des logements sont collectifs), et des enjeux liés à l’entretien et la rénovation du parc.
Le gouvernement a pris conscience que les syndics pouvaient jouer un rôle important dans une forme de police du logement pour lutter contre les marchands de sommeil. Qu’il écoute donc leurs instances les plus représentatives.
Dans une économie moderne, on ne plafonne pas les honoraires des producteurs de services, sauf en contrepartie d’un monopole ou d’une mission de service public. On ne fige pas non plus l’offre de services, sous peine de l’appauvrir et de la rendre obsolète. Ça c’est l’ancien monde.
Jean-Marc Torrollion
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