Le 11 juillet 2025, Eric Lombard et Valérie Letard ont reçu un rapport décisif révélant un besoin colossal de 96 milliards d’euros par an d’ici 2030 pour rénover les logements privés français. Face à l’urgence climatique, la mission parlementaire propose la création d’une Banque de la rénovation pour débloquer les investissements privés. Cette solution vise à combler les angles morts actuels. Puisque seuls 1,7 milliard d’euros financent aujourd’hui la rénovation des copropriétés. Alors que 10 millions de logements classés E, F ou G doivent impérativement être rénovés avant 2034.
Sommaire :
- Que préconise le rapport sur la Banque de la rénovation ?
- Quels constats justifient la création de cette Banque de la rénovation ?
- Comment fonctionnerait la Banque de la rénovation ?
- Quels scénarios envisage le rapport pour la Banque de la rénovation ?
- Quel est l’engagement des acteurs bancaires ?
- Quels enjeux économiques soulève le projet de Banque de la rénovation ?
- FAQ – Banque de la rénovation
À retenir
- 96 milliards d’euros par an seront nécessaires d’ici 2030 pour financer la rénovation et l’adaptation des logements privés français
- 10 millions de logements classés E, F ou G doivent être rénovés avant 2034 selon les obligations légales
- La Banque de la rénovation serait un instrument mutualisé entre banques privées, non une banque publique
- Les copropriétés constituent le principal angle mort avec seulement 1,7 milliard d’euros d’investissements annuels actuels
- Le préfinancement des aides représente un enjeu crucial pour débloquer les projets de rénovation
- Les acteurs bancaires se sont engagés à travailler sur la préfiguration de cet outil lors de la remise du rapport
- 31 milliards d’euros spécifiquement dédiés à la rénovation énergétique seront requis annuellement d’ici 2030
Que préconise le rapport sur la Banque de la rénovation ?
Pilotée par Yannick Borde, président de Procivis, cette mission parlementaire rassemble les sénatrices Amel Gacquerre et Marianne Margaté, Danielle Dubrac (présidente de l’UNIS) et Kosta Kastrinidis (directeur des prêts à la Caisse des Dépôts). Ensemble, ils formulent une proposition ambitieuse : la création d’une Banque de la rénovation, conçue comme un outil financier mutualisé entre banques privées volontaires.
L’objectif est clair : pallier les carences actuelles du financement de la rénovation énergétique. En effet, il s’agit de mettre en place une structure innovante, capable de massifier les investissements privés dans la transition écologique du parc immobilier français. Contrairement à une banque publique traditionnelle, cette Banque de la rénovation se veut un instrument de place. En cela, il doit favoriser la coopération entre établissements bancaires autour d’un dispositif commun, plus lisible et plus efficace, au service de la performance énergétique des logements.
Eric Lombard, Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique a souligné lors de la remise du rapport : « Ce rapport rappelle avec justesse que la réussite de la rénovation énergétique passe par une mobilisation renforcée du secteur bancaire. L’État continuera à jouer son rôle d’impulsion, mais c’est bien aux acteurs privés de s’emparer des outils, d’innover et de mutualiser leurs ressources pour lever les freins au financement. »
Le projet s’inspirerait d’organisations interbancaires existantes comme le Crédit Logement. La Banque de la rénovation partagerait alors les coûts de développement informatique, la formation spécialisée et la gestion des risques spécifiques aux copropriétés, actuellement trop lourds pour chaque banque individuellement.
> Télécharger Rapport – Mission Flash : création d’une «banque de la rénovation»
Quels constats justifient la création de cette Banque de la rénovation ?
L’analyse menée par la mission révèle des blocages structurels majeurs dans le financement de la rénovation énergétique. E effet, le rapport identifie les copropriétés comme le principal angle mort du marché actuel. Seulement deux établissements bancaires – la Caisse d’Épargne Île-de-France et Domofinance – proposent aujourd’hui des prêts spécialisés pour les copropriétés. Ce qui représentait un volume dérisoire de 175 millions d’euros en 2022.
Or, cette insuffisance de l’offre bancaire contraste avec l’ampleur des besoins. Selon les données de l’Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE) citées dans le rapport, près de 5,5 millions de logements du parc privé seraient des passoires énergétiques (étiquettes F et G du DPE), soit 17,2% du parc total.
La mission identifie également les ménages modestes comme un public insuffisamment couvert.
L’Anah, citée dans le rapport, déclare : « Au-delà des problématiques de financement du reste à charge, le préfinancement des aides constitue un levier essentiel pour surmonter les obstacles financiers rencontrés par les ménages et les entreprises. »
Comment fonctionnerait la Banque de la rénovation ?
Le rapport détaille une gamme complète de services que pourrait proposer la future Banque de la rénovation. Elle ciblerait prioritairement le marché des copropriétés via la distribution massive du nouveau prêt collectif à adhésion simplifiée, rendu possible par la loi du 9 avril 2024.
Le ministre Eric Lombard a particulièrement insisté sur l’innovation du préfinancement : « Nous pouvons notamment envisager la gestion pour compte de tiers, dans une approche ‘servicing’ permettant à chaque banque partenaire d’assurer son propre portage du prêt tout en mettant en commun la gestion opérationnelle du cycle de vie du prêt. »
Services proposés par la Banque de la rénovation
L’accompagnement et le conseil constitueraient le premier pilier, avec une orientation initiale, un conseil personnalisé et une coordination des flux avec les opérateurs partenaires.
Le préfinancement des aides représenterait une innovation majeure. En effet, le rapport souligne que l’absence de solutions de préfinancement constitue “un réel frein au déploiement des politiques publiques”. Et, d’autant plus en copropriété où cela conditionne l’aboutissement des projets de redressement.
L’Anah précise dans sa contribution : « En 2025, la capacité de l’Anah à avancer les aides sera réduite au regard des contraintes budgétaires de l’État et des actions indispensables de lutte contre la fraude. »
La garantie de performance des travaux répondrait aux exigences de la taxonomie européenne et aux besoins des établissements financiers.
Le Crédit Logement, cité dans le rapport, souligne que « la réglementation prudentielle des banques risque très probablement d’évoluer vers un dispositif de pénalisation des banques qui octroient des prêts à des biens de mauvaise qualité en termes de performance énergétique. »

Quels scénarios envisage le rapport pour la Banque de la rénovation ?
La mission propose plusieurs modalités de mise en œuvre de la Banque de la rénovation. Le rapport distingue deux approches organisationnelles principales :
- L’approche “servicing”. La Banque de la rénovation fournirait uniquement des services de gestion pour le compte des banques partenaires. Chaque établissement conserverait sa propre tarification, sa gestion du risque et le portage de ses prêts, tout en mutualisant les coûts opérationnels.
- L’établissement bancaire spécialisé. Création d’une véritable banque qui porterait elle-même les prêts, avec une mutualisation complète des risques, de la tarification et du refinancement entre tous les partenaires.
Concernant la création, les experts envisagent deux stratégies de démarrage :
- soit une création ex-nihilo (partir de zéro),
- soit l’utilisation d’une “structure souche” existante disposant déjà d’une licence bancaire et des compétences nécessaires. Cette seconde option réduirait significativement les délais de mise en place opérationnelle.
Les données chiffrées du rapport sont précises. Ainsi, pour atteindre 96 milliards d’euros par an d’ici 2030, dont 31 milliards spécifiquement pour la rénovation énergétique, une restructuration massive du financement s’impose.
Quel est l’engagement des acteurs bancaires ?
La remise du rapport s’est accompagnée d’engagements concrets des acteurs bancaires présents. Ainsi, ils se sont engagés à travailler à la préfiguration de cet outil et à déployer le prêt collectif pour les copropriétés.
Valérie Létard, Ministre chargée du Logement, s’est réjouie de ces engagements : « Je me réjouis du lancement de ce nouvel instrument de financement de la rénovation et de l’engagement des acteurs bancaires à le mettre en œuvre. C’est un nouvel outil de financement de la rénovation des logements et en particulier des copropriétés qui se dessine. »
Cette mobilisation représente “une évolution très positive” selon les ministres. Les banques ont également proposé une évolution du prêt collectif créé par la loi “Habitat Dégradé” du 9 avril 2024. Une évolution que le Gouvernement soutient. Cette initiative privée s’inscrit dans la stratégie gouvernementale d’engagement partagé entre l’État et les acteurs privés pour réussir la transition écologique, particulièrement dans un contexte de contraintes budgétaires publiques.
Quels enjeux économiques soulève le projet de Banque de la rénovation ?
Les projections du rapport révèlent l’ampleur du défi financier. Selon les estimations de la mission, la structure actuelle de financement repose pour 93% sur des fonds propres et des crédits non aidés. Soit 42,4 milliards d’euros de fonds propres et 15,1 milliards d’euros de crédits non aidés en 2023.
Le rapport cite l’Institut I4CE qui estime que « la Stratégie nationale bas-carbone suppose de porter les investissements spécifiquement orientés vers l’efficacité énergétique à 31 milliards d’euros par an en moyenne d’ici 2030, soit une augmentation du niveau brut des dépenses de +14 milliards d’euros. »
Pour les copropriétés, la Banque de la rénovation ambitionne de tripler les investissements annuels, en passant de 3 milliards d’euros à 8,9 milliards, afin de financer la rénovation énergétique de 100 000 logements par an.
Cette montée en puissance est rendue indispensable par le calendrier réglementaire contraignant instauré par la loi Climat et Résilience. Depuis le 1er janvier 2025, la location des logements classés G est interdite. Cette interdiction sera étendue aux logements classés F en 2028, puis aux logements E en 2034, rendant la rénovation énergétique incontournable pour les copropriétaires bailleurs.
Dans ce contexte, la Banque de la rénovation représenterait un outil structurant pour accompagner les copropriétés dans la mise en conformité, tout en leur offrant un accès simplifié et mutualisé aux financements nécessaires.
FAQ – Banque de la rénovation
Qu’est-ce que la Banque de la rénovation proposée dans le rapport ?
La Banque de la rénovation serait un instrument financier mutualisé entre banques privées volontaires, et non une banque publique. Elle viserait à mutualiser les coûts de développement informatique, la formation spécialisée et la gestion des risques pour faciliter le financement de la rénovation énergétique, particulièrement pour les copropriétés et les ménages modestes.
Pourquoi 96 milliards d’euros sont-ils nécessaires d’ici 2030 ?
Selon le rapport, ces 96 milliards annuels couvriront plusieurs besoins : 31 milliards pour la rénovation énergétique, 1,9 milliard pour l’adaptation au vieillissement, 3 milliards pour l’adaptation climatique, plus les travaux d’amélioration et d’entretien du parc existant. L’objectif est de rénover 10 millions de logements classés E, F ou G d’ici 2034.
Quels sont les publics mal couverts par le financement actuel ?
Le rapport identifie deux publics principalement : les copropriétés (avec seulement 1,7 milliard d’euros d’investissements annuels actuels) et les ménages modestes ou âgés qui ne répondent pas aux critères d’éligibilité classiques des banques. Ces publics représentent pourtant une part importante des besoins de rénovation.
Comment les banques se sont-elles engagées suite à ce rapport ?
Lors de la remise du rapport, les acteurs bancaires se sont engagés à travailler sur la préfiguration de cet outil et à déployer le prêt collectif pour les copropriétés. Ils ont également proposé des évolutions du prêt collectif créé par la loi “Habitat Dégradé” d’avril 2024, évolutions soutenues par le Gouvernement.
Quand la Banque de la rénovation pourrait-elle voir le jour ?
Le rapport propose plusieurs scénarios de mise en œuvre, allant de la création ex-nihilo (36 mois) à l’utilisation d’une structure existante (12 à 18 mois). Les délais dépendront des choix stratégiques des acteurs bancaires et du niveau d’intégration souhaité. La phase de préfiguration a commencé avec les engagements pris lors de la remise du rapport.