Le marché de l’investissement locatif a subi une chute significative à la fin de 2023. Ainsi, les jeunes cadres, confrontés à des budgets limités et à des carrières nomades, voient dans l’investissement locatif un moyen flexible et viable de bâtir leur patrimoine. Cet engouement soulève cependant une question cruciale : les jeunes auront-ils réellement l’opportunité de s’engager dans cette voie ?
Sommaire :
- Investissement locatif : enjeux et défis en 2023
- L’attrait croissant pour l’investissement dans l’immobilier neuf chez les jeunes actifs
- Optimiser son investissement locatif grâce au crédit
- Les défis actuels de l’investissement locatif
Investissement locatif : enjeux et défis en 2023
L’année 2023 a marqué un tournant pour l’investissement locatif. La production de crédit, essentielle au financement de ce type d’investissement, a plongé de 40% au dernier trimestre par rapport à la même période en 2021. Chez CAFPI, un acteur majeur du marché, la part de l’investissement immobilier a également diminué, passant de 10,1% en 2022 à 8,5% en 2023. Ces chiffres témoignent d’un ralentissement généralisé, affectant l’ensemble des acteurs de l’immobilier.
Ce repli ne s’explique pas par un seul facteur. La hausse des taux d’intérêt, couplée aux exigences renforcées du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF), a significativement affecté le secteur. Bruno Taltavull, senior à l’agence CAFPI Fininvest, pointe du doigt ces changements. Notamment, l’ajustement dans le calcul de l’endettement chez les investisseurs rend l’accès au financement plus ardu. Bien que ces nouvelles mesures visent à stabiliser le marché, elles entraînent, par effet domino, un ralentissement des investissements locatifs.
Malgré ces obstacles, un phénomène persiste : l’attrait des jeunes pour l’investissement locatif, en particulier dans le neuf. Cette tendance s’inscrit dans un désir d’indépendance financière et d’accumulation de patrimoine. De façon surprenante, certains de ces jeunes choisissent d’acheter leur résidence principale sans profiter du Prêt à Taux Zéro (PTZ), une stratégie leur permettant de garder l’option de la mettre en location. Cette décision souligne leur volonté d’investir à long terme, en dépit des restrictions financières actuelles.
L’attrait croissant pour l’investissement dans l’immobilier neuf chez les jeunes actifs
Un engouement pour le neuf grâce au dispositif Pinel
Le marché de l’investissement locatif connaît une tendance notable : les jeunes actifs se dirigent massivement vers l’immobilier neuf. Chez CAFPI, environ 70% des projets locatifs financés ciblent ce segment, souvent via le dispositif Pinel. Cette orientation n’est pas anodine. Puisque ce dispositif permet un différé de remboursement de prêts jusqu’à deux ans si la livraison du bien est postérieure à l’obtention du crédit. Une situation fréquente dans les ventes sur plan. De plus, les intérêts accumulés pendant ce délai s’ajoutent ensuite au capital, répartissant le coût sur toute la durée du prêt.
Vers l’investissement dans l’ancien et les passoires thermiques
Avec l’expiration prochaine des dispositifs Pinel et Pinel+, les jeunes investisseurs se tourneront probablement vers l’ancien, y compris les biens moins performants d’un point de vue énergétique. Les “passoires thermiques”, souvent dévalorisées de 5 % à 20%, représentent une opportunité.
> Consulter notre article sur : “Passoires thermiques : une nouvelle opportunité pour les investisseurs”
En effet, les banques sont prêtes à financer ces investissements à condition que l’acheteur s’engage à réaliser les travaux nécessaires. Toutefois, ces engagements doivent être intégrés dans le plan de financement.
“ Il y a aujourd’hui 5 millions de logements classés F et G, mais ce chiffre pourrait baisser avec la réforme du DPE annoncée mi-février pour les biens affichant moins de 40 m².” – Bruno Taltavull, senior à l’agence CAFPI Fininvest.
L’intérêt pour les SCPI
Outre l’immobilier physique, les jeunes investisseurs montrent un intérêt croissant pour les Sociétés Civiles de Placement Immobilier (SCPI). Ces véhicules d’investissement offrent un accès à des actifs tertiaires, comme les bureaux ou les commerces, traditionnellement hors de portée des investisseurs individuels. De plus, ils permettent de bénéficier des mêmes avantages fiscaux que l’investissement direct.
“ Après les dévalorisations du deuxième semestre 2023, l’achat de parts de SCPI permet d’investir dans l’immobilier avec des tickets d’entrée plus faibles et des rendements intéressants.” – Bruno Taltavul.
> Consulter notre article sur : “Investir dans une SCPI : comment choisir son placement ?”
Optimiser son investissement locatif grâce au crédit
Le recours au crédit pour financer un investissement locatif offre plusieurs avantages significatifs. Tout d’abord, il permet aux investisseurs d’acquérir un bien sans puiser dans leur épargne personnelle. Cette stratégie facilite l’achat et amplifie le potentiel de rendement en tirant parti de l’effet de levier du crédit.
Contrairement à d’autres types de placements, l’immobilier peut être acheté en grande partie grâce à des fonds empruntés. Ainsi, les investisseurs peuvent initialement consacrer moins de fonds propres. Ceci est particulièrement avantageux dans le cas de biens immobiliers neufs, car les frais de notaire sont réduits.
“ S‘il est préférable de disposer d’un apport minimal de 10% couvrant les frais d’acquisition pour l’ancien, ce montant est de moitié pour le neuf grâce à des frais de notaire réduits. Or, il est de nouveau possible d’emprunter à 110% (prix du bien plus frais). Les banques exigent, dans ce cas, une épargne de précaution équivalant à six mois ou un an de revenus locatifs afin de supporter une éventuelle période de vacance ou des dépenses exceptionnelles (gros travaux…).” – Bruno Taltavul.
Réduction de la charge fiscale
L’un des attraits majeurs de l’investissement locatif à crédit est la possibilité d’alléger la fiscalité sur les revenus locatifs. En effet, les intérêts d’emprunt peuvent être déduits des loyers perçus, réduisant ainsi l’impôt sur le revenu. Cet avantage fiscal est particulièrement pertinent dans un contexte de hausse des taux d’intérêt.
Toutefois, il faut faire la distinction entre les régimes fiscaux micro et réel. Puisque le mécanisme de déduction des intérêts est applicable uniquement sous le régime réel. Le prêt in fine, qui consiste à ne rembourser que les intérêts durant la durée du crédit, peut amplifier cet avantage en libérant du capital pour d’autres investissements.
“Le prêt in fine offre la possibilité de gommer tout ou partie d’un bénéfice foncier existant. Dans ce cas, la sortie du crédit est sécurisée et prévue dans le montage financier via le nantissement d’une assurance-vie, un plan d’épargne avec des versements réguliers ou une sureté réelle sur le bien.” – Bruno Taltavull.
Protection et sécurité
L’investissement locatif à crédit implique également une protection pour l’investisseur grâce à l’assurance emprunteur. Cette assurance, moins exigeante que celle d’une résidence principale, couvre les risques de décès ou de perte d’autonomie, sécurisant ainsi l’investissement en cas de coups durs.
Bien que les garanties contre l’invalidité ou l’incapacité temporaire de travail ne soient pas exigées pour les investissements locatifs, elles offrent une couche supplémentaire de sécurité. En effet, elle assure que les revenus locatifs continuent à être perçus, indépendamment de l’état de santé de l’investisseur.
Les défis actuels de l’investissement locatif
L’impact des nouveaux critères du HCSF
Les récents changements apportés par le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) ont profondément modifié le paysage de l’investissement locatif. Les nouveaux critères, qui altèrent le calcul du taux d’endettement, se révèlent particulièrement contraignants. De ce fait, les courtiers se trouvent dans l’obligation de rejeter près de la moitié des dossiers qui auraient été acceptés sous l’ancien régime. Cette situation crée un véritable blocage pour de nombreux potentiels investisseurs.
Le calcul en différentiel : une solution ancienne abandonnée
Pendant plus de deux décennies, les banques ont utilisé le calcul en différentiel pour évaluer le taux d’endettement. Cette méthode permettait de soustraire les loyers attendus du remboursement du crédit au lieu de les additionner au revenu total du ménage. Cette approche, malgré son abandon récent, n’avait pas conduit à une augmentation significative des défauts de paiement chez les clients particuliers.
“ Le retour à ce mode de calcul permettrait de resolvabiliser la moitié des investisseurs et ainsi de pouvoir aider à résorber la pénurie des biens offerts à la location que l’on connaît en France. – Bruno Taltavull.
Exemple concret : le cas d’un cadre supérieur
Prenons l’exemple d’un cadre supérieur avec un revenu net mensuel de 7 367 euros. Il rembourse 1587 euros par mois pour sa résidence principale et 1687 euros pour un investissement locatif existant. Ce dernier génère des loyers de 1 760 euros (après application d’une pondération de 80%).
Actuellement, sans le calcul en différentiel, ce cadre ne peut envisager aucune nouvelle opération immobilière. Si l’ancienne méthode était réappliquée, il aurait la capacité d’investir jusqu’à 300000 euros dans un nouveau bien locatif. Cette illustration met en lumière l’impact direct des règles de calcul sur les possibilités d’investissement des individus.