Le podcast Copro de monimeuble.com de juin 2025, animé par Isabelle Dahan avec Charles Bohbot (Cabinet BJA), révèle des évolutions majeures dans le droit de la copropriété. Cette émission décortique les dernières actualités juridiques qui impactent directement les syndics et copropriétaires. Au programme : les critiques de la Cour des comptes sur le DPE, le nouveau formalisme des prêts collectifs, et les précisions sur le syndic d’intérêt collectif. Comment ces changements réglementaires affectent-ils la gestion quotidienne des copropriétés ? Quelles sont les nouvelles obligations pour les professionnels ?
Sommaire :
- DPE en copropriété : que dit le rapport de la Cour des comptes ?
- Prêt collectif en copropriété : un formalisme renforcé
- Syndic d’intérêt collectif : vers une professionnalisation accrue ?
- Changement d’affectation des lots : les nouvelles facilités
- Jurisprudences récentes : charges spéciales et parties communes
DPE en copropriété : que dit le rapport de la Cour des comptes ?
Les critiques formulées contre le diagnostic de performance énergétique
La Cour des comptes, dans son rapport publié le 3 juin 2025, formule des critiques sévères contre le DPE. En effet, elle reproche une “exécution précipitée”, une “méthode de calcul contestée” et un “système de certification insuffisamment encadré”. La juridiction appelle à une “refonte profonde” de ce système qui menace 600 000 logements du parc locatif.
Henry Buzy-Cazaux conteste ces critiques en soulignant que la Cour “semble ignorer le plan de fiabilisation des DPE lancé par Valérie Letard”. Il précise avoir reçu “la mission de réfléchir à la montée en compétences des diagnostiqueurs par la formation” avec un rapport attendu fin juin.
Les mesures correctives déjà adoptées
Plusieurs aménagements ont été mis en place pour corriger les dysfonctionnements. L’arrêté du 25 mars 2024 a permis à 140 000 petites surfaces de sortir du champ d’application du DPE, évitant ainsi leur exclusion du marché locatif.
Une proposition de loi, actuellement en discussion au Parlement, vise à “clarifier les obligations de rénovation énergétique des logements et à sécuriser leur application en copropriété”. L’objectif affiché est de sécuriser les travaux, les baux en cours, et l’articulation entre DPE individuels et collectifs.
Le financement des travaux de rénovation
Le podcast révèle que le budget MaPrimeRénov’ aurait été épuisé pour les maisons individuelles, mais reste disponible pour les copropriétés. Charles Bohbot précise qu’il existe “un fonds dédié pour les particuliers et un autre fléché pour les copropriétés”. Néanmoins, cette enveloppe reste insuffisante, nécessitant souvent un recours à l’emprunt collectif.
Prêt collectif en copropriété : un formalisme renforcé
Le décret du 6 juin 2024 : nouvelles obligations
Le décret n° 2025-499 du 6 juin 2025 précise les informations que le syndic doit transmettre à l’établissement prêteur dans le cadre du prêt collectif à “adhésion automatique”. Ce dispositif permet aux copropriétés de financer leurs travaux sans recueillir l’accord individuel de chaque copropriétaire.
Selon l’analyse de Me Charles Bohbot, ce décret introduit “un formalisme accru sans compensation” pour les syndics. Les pièces exigées comprennent : règlement de copropriété, fiche synthétique, procès-verbaux d’assemblées générales des trois dernières années, état de la trésorerie, montant des impayés, situation des dettes fournisseurs, fonds travaux.
Une exigence problématique sur les données personnelles
L’obligation la plus controversée concerne la fourniture des “noms, prénoms, lieu et date de naissance de tous les copropriétaires, y compris indivisaires et réfractaires au prêt”. Comme le souligne Charles Bohbot, cette exigence pose des difficultés pratiques majeures. En effet, les syndics ne savent pas comment obtenir ces dates de naissance et devront probablement commander les titres de propriété de chaque copropriétaire.
De plus, cette collecte d’informations personnelles soulève des questions en matière de protection des données. Le décret ne prévoit aucun mécanisme pour gérer les cas de refus ou d’absence de réponse des copropriétaires concernés.
L’absence de revalorisation du contrat type
Le podcast souligne un point critique : aucune disposition ne prévoit “une revalorisation du contrat type du syndic pour encadrer et valoriser cette nouvelle mission”. Or, cette charge de travail supplémentaire pourrait dissuader les professionnels de s’investir dans le dispositif.
Syndic d’intérêt collectif : vers une professionnalisation accrue ?
Les conditions d’agrément fixées par le décret
Le décret et l’arrêté du 10 mai 2025 établissent le dossier à adresser au préfet pour obtenir l’agrément de syndic d’intérêt collectif pendant 5 ans. Les candidats doivent fournir un acte d’engagement attestant de leurs motivations et compétences spécifiques, suivre une formation de 7 heures par an, et revoir leur assurance responsabilité civile.
Un marché spécialisé pour les professionnels certifiés
Cet agrément ouvre l’accès à des marchés spécialisés, notamment la possibilité d’être désigné avec l’administrateur provisoire pour gérer les copropriétés en difficulté. Le podcast suggère que “les syndics qui auront déjà été certifiés par QualiSR seront les premiers candidats pour devenir syndics d’intérêt collectif”. Charles Bohbot précise que “les critères retenus dans l’acte d’engagement sont semblables à ceux du référentiel QualiSR”, confirmant cette hypothèse.
Changement d’affectation des lots : les nouvelles facilités
La loi du 16 juin 2025 : simplification des procédures
L’article d’Éléonore Hakim traite du changement d’affectation d’un lot en copropriété. La loi du 16 juin 2025 vise à “favoriser la transformation de bureau en logement” face à la pénurie de logements et aux nombreux locaux vacants.
Trois critères encadrent ces transformations : ne pas être contraire à la destination de l’immeuble, respecter le règlement de copropriété, et obtenir une autorisation de l’assemblée générale. La nouveauté réside dans la possibilité de voter ce changement à la majorité simple, ainsi que la répartition des charges par un vote à la majorité de l’article 24.
Un enjeu économique majeur
Cette facilitation répond à un double enjeu : d’une part, la vacance de nombreux bureaux et commerces qui “trouvent pas preneur”, d’autre part, le manque criant de logements. Le podcast souligne que “tout est fait pour faciliter cette transition”.
Jurisprudences récentes : charges spéciales et parties communes
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 mars 2025
La jurisprudence analysée dans le podcast concerne les travaux de ravalement et l’application des charges communes spéciales. La Cour d’appel de Paris (RG n° 22/20265) juge qu'”une grille de répartition de charges spéciales doit obligatoirement s’appuyer sur des parties communes spéciales correspondantes”.
Dans cette affaire, un bâtiment prestigieux refusait de participer au ravalement. Bien qu’il existe des charges spéciales par bâtiment, celles-ci ne s’appuyaient pas sur des parties communes spéciales pour le ravalement. La Cour a donc considéré ces grilles inapplicables.
L’importance de la mise en conformité des règlements
Cette jurisprudence illustre “l’intérêt de mettre en conformité les règlements de copropriété”, comme le souligne Charles Bohbot. Il observe que “parfois les ambiguïtés peuvent profiter à une ou autre des parties” mais “générer des contentieux”. Certaines copropriétés ont bien voté un audit et une mise en conformité, mais “comme le sujet est complexe et peut-être coûteux, ça a été rangé dans un tiroir”. Ce n’est que lors de difficultés qu’on “ressort le rapport du tiroir”.