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Travaux

Mon Accompagnateur Rénov’ : une mise à l’écart des acteurs privés

Jean-Pierre Hauet, Président du Comité scientifique, économique, environnemental et sociétal d'Equilibre des Energies.

La consultation du projet de décret d’application de Mon Accompagnateur Rénov’ (MAR) se terminait fin de semaine dernière. Dans ce contexte, l’association Équilibre des Énergies a souhaité réagir et apporter des propositions. Tribune de Jean-Pierre Hauet, Président du Comité scientifique, économique, environnemental et sociétal d’Equilibre des Energies.

Mon Accompagnateur Rénov’ ne doit pas venir complexifier la rénovation énergétique des bâtiments

L’augmentation du volume des rénovations et de leur ambition fait consensus auprès des candidats à l’élection présidentielle. À ce titre, le dispositif Mon Accompagnateur Rénov’ résultant de la loi Climat-Résilience, doit concourir à ce mouvement. Or, dans sa version actuelle, le projet de décret d’application, dont la consultation publique s’est conclue le 25 février, pourrait aboutir à la complexification et à un renchérissement du parcours de rénovation.

Mon Accompagnateur Rénov’ est censé concourir à l’augmentation du nombre des rénovations énergétiques des bâtiments et de leur qualité. Pour autant, il écarte de façon injustifiée les accompagnateurs issus du secteur privé.

En effet, le MAR vise l’atteinte d’un haut niveau de satisfaction et une efficacité optimale dans l’utilisation des opérations de rénovation des bâtiments. Y compris dans les plus exigeantes en aides de l’État. Mais, le mieux étant l’ennemi du bien, il est essentiel de veiller à ce qu’il ne déstabilise pas la dynamique actuelle. Ce serait le cas, si le parcours client comme le montage des opérations deviennent plus difficiles.

Notons que le coût de l’accompagnement n’est pas encore défini à ce stade. Or, Mon Accompagnateur Rénov’ augmentera significativement le coût des travaux. Même s’il donne l’impression qu’il est gratuit parce qu’il est pris en charge par des mécanismes publics, ce n’est pas le cas.

Autrement dit, cet accompagnement risque de détourner trop de ressources vers des interventions d’experts. Alors qu’elles pourraient être mobilisées pour la réalisation de travaux.

Limiter le champ d’application de l’obligation

Certes, Mon Accompagnateur Rénov’ ne doit pas être « juge et partie » comme le souhaite les pouvoirs publics. En cela, il faut éviter certaines dérives. Mais, nous estimons qu’il existe dans le projet de décret, un risque de mise à l’écart des acteurs privés du statut d’accompagnateur.

Dans le même temps, le champ d’application des opérations de rénovation qui seront désormais assujetties à l’obligation de faire appel à MAR est très large. Puisque l’on décompte environ 60 000 d’opérations éligibles. Ces deux réalités peuvent conjointement provoquer une complexification des dossiers et un embouteillage dans leur instruction.

Mon Accompagnateur Rénov’

 

C’est pourquoi, dans ses propositions d’Équilibre des Énergies, souhaite attendre les retours d’expérience avant de généraliser le champ d’application de cette obligation. Dans un premier temps, Mon Accompagnateur Rénov’ concernerait les ménages les plus précaires. Comme “Ma Prime Rénov’ Sérénité”, il apporterait un accompagnement aux ménages qui ont besoin d’un soutien financier intensif. Mais, aussi, à ceux fortement touchés par les fraudes et les malfaçons.

De sorte que pour les autres ménages, l’accompagnement resterait potentiellement optionnel pendant une période transitoire. Aussi, pour les travaux nécessitants, a minima, deux gestes de rénovation, on pourrait attendre les premiers retours d’expérience. Le seuil de 10 000 € semble en tout état de cause trop bas et un seuil de 15 000 € pourrait être retenu.

Un risque de mise à l’écart des acteurs privés du statut Mon Accompagnateur Rénov’

Enfin, il faut ouvrir le dispositif Mon Accompagnateur Rénov’ aux acteurs privés experts de la rénovation énergétique. La distinction faite entre acteurs publics et acteurs privés constitue une inégalité de traitement. Compte tenu des considérations d’intérêt général, ce déséquilibre n’est pas justifié. De toute évidence, il peut conduire à l’exclusion des opérations de rénovation d’experts compétents, mais également d’entreprises.

Car, la priorité serait alors donnée aux réseaux habituels des accompagnateurs publics. Alors même que ces entreprises écartées du dispositif sont agréées « RGE Rénovation globale ». Il y a lieu en conséquence de réexaminer le projet d’article R. 232-3 alinéa 2 ainsi que le projet d’article R 232-9.

Au demeurant, il est à noter que l’obligation de proposer des gestes de rénovation contenus dans l’audit énergétique permet d’assurer la neutralité technologique des bouquets de 2/2 travaux recommandés. Il n’y a pas lieu d’ajouter comme critère de sélection le caractère public du candidat accompagnateur.

Contenu de l’accompagnement

Tel que défini dans le projet d’arrêté, les tâches incombant à Mon Accompagnateur Rénov’ semblent très complexes. De sorte qu’elles peuvent conduire, soit à une dénaturation des prestations, soit à des coûts élevés.

Ceci nous renforce dans l’idée qu’il faut prévoir une phase pilote, axée sur les ménages les moins favorisés, pour lesquels l’accès à l’accompagnement obligatoire sera gratuit, avant d’envisager sa généralisation.

On verra à l’expérience si un contenu aussi complet a sa justification. On notera enfin qu’à l’article R0 232-2 alinéa IV, la connaissance des systèmes de régulation, et de gestion de l’énergie en général, devrait être mentionnée. Puisqu’il s’agit, en définitive, du moyen le plus rapide et le moins coûteux de faire des économies d’énergie.

À propos d’Équilibre des Énergies

Créé en 2011, le groupe de réflexion Équilibre des Énergies est une plate-forme transversale qui fédère les acteurs du monde de l’Énergie, du Bâtiment et de la Mobilité. Ils sont réunis autour d’un projet commun : Construire une société énergétique meilleure, nécessaire à la décarbonation efficace de l’économie.

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Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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