L’année 2025 s’annonce comme un tournant majeur pour les marchés de l’énergie en Europe. Entre la fin du dispositif ARENH, les tensions géopolitiques et l’évolution des prix du gaz et de l’électricité, les acteurs du secteur doivent s’adapter à un paysage en pleine mutation. Le webinaire organisé par OMNEGY et animé par Nicolas Leclerc et Édouard Lotz apporte des éclairages précieux sur ces dynamiques. De l’évolution de l’offre et de la demande aux enjeux de spéculation financière, quelles seront les grandes tendances qui façonneront l’avenir énergétique du continent ?
Sommaire :
- Un tournant pour les marchés de l’énergie en Europe
- Électricité : le renouvelable va-t-il faire baisser les prix ?
- Gaz naturel : vers une dépendance accrue au GNL américain ?
- Le rôle croissant de la spéculation sur les prix de l’énergie
- Quelles stratégies adopter face aux incertitudes ?
Un tournant pour les marchés de l’énergie en Europe
L’année 2025 marque une période charnière pour les marchés de l’énergie. En effet, des bouleversements majeurs affecteront aussi bien les prix que les stratégies d’approvisionnement des entreprises. La fin du dispositif ARENH, prévue pour le 31 décembre 2025, annonce une transformation profonde du marché de l’électricité en France. Cette évolution suscite des interrogations sur la manière dont les entreprises devront s’adapter. Car, elles devront désormais acheter l’intégralité de leur électricité aux prix du marché, sans tarif régulé.
Dans le secteur du gaz, les tensions géopolitiques et les évolutions de la demande mondiale pèsent sur l’approvisionnement et les prix. Le recul des importations en provenance de Russie et la montée en puissance du GNL américain redéfinissent les flux d’échange et la structure du marché européen.
Face à ces incertitudes, de nombreuses entreprises s’interrogent. Faut-il se couvrir dès maintenant ou attendre une accalmie des prix ? Quels seront les moteurs de la volatilité du marché cette année ? OMNEGY, lors de son webinaire animé par Nicolas Leclerc et Édouard Lotz, a apporté des éléments de réponse à ces questions cruciales.
Un marché électrique sous pression malgré la montée en puissance du renouvelable
Le marché de l’électricité a connu en 2024 une transformation importante. Ainsi, on a pu observer une multiplication des épisodes de prix négatifs sur le marché spot. Pour rappel, le marché spot est un marché où les marchandises ou les titres financiers sont négociés pour une livraison immédiate. Concernant l’énergie, le prix spot fait référence au prix de l’électricité ou du gaz pour une livraison immédiate, par opposition aux contrats à terme où la livraison est prévue à une date ultérieure.
En général, les prix spot de l’électricité ont tendance à converger vers zéro en cas de forte production d’énergie éolienne et un peu de solaire. À l’inverse, les prix ont tendance à augmenter en cas de forte demande et de faible production d’énergie renouvelable. Effectivement en 2024, on a pu bénéficier d’une augmentation significative de la production renouvelable, combinée à une disponibilité accrue du parc nucléaire français. Puisque, 96 % de l’électricité produite en France en 2024 était d’origine décarbonée, un record historique.
Cependant, malgré ces signaux positifs, le marché reste sous tension, notamment en raison des périodes de faible production renouvelable. L’hiver 2024-2025, plus froid que prévu, a entraîné une hausse soudaine de la consommation. Ce qui a mis en évidence les limites de l’intermittence des énergies renouvelables.
Comme l’explique Édouard Lotz : “En 2024, nous avons vu un nombre record d’heures avec des prix négatifs. Cependant, ces périodes coïncidaient avec une production renouvelable très élevée. Dès que le vent faiblit ou que l’ensoleillement baisse, nous assistons à des pics de prix importants.”
Cette variabilité des prix souligne l’importance des centrales pilotables, notamment nucléaires et thermiques, pour stabiliser le réseau. À moyen terme, l’augmentation des capacités de stockage d’électricité pourrait offrir une solution, mais ces technologies restent encore limitées en 2025.
Gaz naturel : une dépendance accrue au GNL américain
Le marché du gaz évolue dans un contexte tendu, marqué par la disparition progressive des flux russes et une reconfiguration des importations européennes. Depuis le 31 décembre 2024, les livraisons de gaz russe via l’Ukraine ont cessé. Elles privent ainsi l’Europe d’un volume d’environ 15 milliards de mètres cubes. Or, cette réduction s’ajoute à une consommation hivernale plus élevée que prévu, augmentant la pression sur les stocks.
Face à cette situation, l’Europe se tourne massivement vers le GNL américain. Il s’agit du gaz naturel liquéfié provenant des États-Unis. Les importations de GNL en provenance des États-Unis devraient ainsi augmenter de 25 % en 2025 par rapport à 2024, selon OMNEGY.
Nicolas Leclerc souligne l’impact de cette évolution : “Les États-Unis sont aujourd’hui notre premier fournisseur de GNL, et cette dépendance va encore s’accentuer en 2025. Cela pose des questions stratégiques sur la résilience de notre approvisionnement, notamment en cas de tensions commerciales avec Washington.”

Cependant, cette dépendance accrue au GNL pose une autre problématique : la concurrence avec l’Asie. Si la demande asiatique augmente fortement, l’Europe pourrait se retrouver en difficulté pour sécuriser son approvisionnement à un coût raisonnable.
Le poids de la spéculation sur les marchés de l’énergie
Un élément moins visible, mais déterminant dans l’évolution des prix de l’énergie est la montée en puissance des acteurs financiers. En 2024, les fonds d’investissement ont pris des positions longues sur le marché du gaz. Elles représentaient environ 300 TWh, soit près de 10 % de la consommation européenne.
Nicolas Leclerc dénonce ce phénomène : “Nous observons une spéculation massive sur les marchés de l’énergie, avec des fonds qui parient sur la hausse des prix, ce qui crée une prime artificielle sur le gaz et le CO2. Cette situation pénalise directement les consommateurs.”
Sur le marché des quotas carbone, cette spéculation a contribué à faire grimper les prix du CO2 au-delà de 80 €/tonne, renchérissant ainsi le coût de production des centrales thermiques.
Quelles stratégies pour sécuriser son approvisionnement en énergie en 2025 ?
Face à ces incertitudes, les entreprises doivent adopter une approche proactive pour gérer leur approvisionnement énergétique. La sécurisation des contrats sur plusieurs années apparaît comme une solution pertinente. Et, cela, notamment sur le marché de l’électricité où les prix restent relativement stables autour de 60-65 €/MWh pour 2026-2027.
Concernant le gaz, la situation est plus complexe. Les projections pour 2027-2028 indiquent une possible baisse des prix vers 30 €/MWh, mais la volatilité reste forte. Les experts d’OMNEGY recommandent donc une approche progressive, en diversifiant les périodes d’achat pour lisser l’impact des fluctuations.
Conclusion
L’année 2025 s’annonce décisive pour les marchés de l’énergie, entre la fin de l’ARENH, l’essor du renouvelable et les incertitudes sur le gaz. Pour les entreprises, la clé réside dans l’anticipation et la diversification des sources d’approvisionnement. Si l’électricité semble mieux maîtrisée grâce au nucléaire, le gaz reste un enjeu majeur, notamment face aux tensions commerciales internationales.