Le marché du crédit immobilier montre des signes de reprise en 2024, mais reste fragile. Les taux d’intérêt baissent depuis janvier, redonnant du pouvoir d’achat aux emprunteurs. Pourtant, les contraintes du HCSF limitent toujours l’accès au financement. Les primo-accédants résistent, tandis que les secundo-accédants restent prudents. L’ancien attire de plus en plus, au détriment du neuf. Les investisseurs, quant à eux, tentent un timide retour. Face à ces évolutions, comment le marché va-t-il évoluer dans les mois à venir ? Cette étude d’Empruntis analyse les tendances et perspectives du marché du crédit immobilier pour 2024.
Sommaire :
- Marché du crédit immobilier 2024 : reprise en demi-teinte malgré la baisse des taux
- Évolution des profils d’emprunteurs sur le marché du crédit immobilier
- Tendances du marché immobilier et impact sur le crédit
- Perspectives du marché du crédit immobilier pour 2024
Marché du crédit immobilier 2024 : reprise en demi-teinte malgré la baisse des taux
Des taux en baisse redonnent du souffle aux emprunteurs
Le marché du crédit immobilier montre des signes d’amélioration en 2024. Selon l’étude d’Empruntis, les taux d’intérêt baissent régulièrement depuis janvier. Cette tendance redonne du pouvoir d’achat aux emprunteurs. En juin 2024, le taux moyen sur 20 ans atteint 3,80%, contre 4,35% en décembre 2023.
Cécile Roquelaure, directrice des études chez Empruntis, explique : “ Cette baisse permet aux acheteurs potentiels d’emprunter davantage. La capacité d’emprunt est ainsi passée de 128 086 € à 134 342 € pour une mensualité de 800 €, soit un gain de pouvoir d’achat de 5% en moyenne.”
Un exemple concret illustre cette amélioration : un couple gagnant 4000 € net par mois pouvait emprunter 200 000 € sur 20 ans en décembre 2023. En juin 2024, ce même couple peut désormais emprunter 210 000 € dans les mêmes conditions.
Le HCSF : un frein persistant pour les emprunteurs
Malgré cette embellie, le marché du crédit immobilier reste contraint. Les règles du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) limitent toujours l’accès au financement. Le taux d’endettement maximum de 35% et la durée de prêt plafonnée à 25 ans, instaurés par la décision du HCSF du 27 janvier 2021, excluent encore de nombreux ménages.
Un banquier interrogé par Empruntis témoigne : “ Certains conseillers ne veulent même pas utiliser l’enveloppe dérogatoire, car ils ont peur de devoir ensuite dire non à leurs clients si l’enveloppe est dépassée.”
Ces restrictions impactent particulièrement les primo-accédants et les investisseurs. L’étude montre que seulement 4% des primo-accédants n’ont pas d’apport en 2024, contre 5% en 2023. Ce qui illustre la difficulté croissante à emprunter sans épargne préalable.
Évolution des profils d’emprunteurs sur le marché du crédit immobilier
Les primo-accédants résistent, les secundo-accédants hésitent
Dans ce contexte, les primo-accédants montrent une certaine résilience. Leur part dans les achats de résidence principale a augmenté de 2,3 points par rapport à 2023. Désormais, ils atteignent 80,77% des acheteurs.
Ces primo-accédants sont légèrement plus jeunes (34 ans et 1 mois en moyenne) et bénéficient davantage du nouveau Prêt à Taux Zéro (PTZ).
Le nouveau PTZ, entré en vigueur le 1er janvier 2024, semble avoir un impact positif. L’étude révèle que 58% des primo-accédants dans le neuf en bénéficient, contre 50% en 2023. Et, le montant moyen du PTZ a augmenté de 3%, atteignant 65 881 €.
En revanche, les secundo-accédants restent prudents. Leur part a diminué, passant à 19,23% des acheteurs. Ils sont plus âgés (43 ans et 3 mois en moyenne) et disposent d’un apport plus important (99 365 €, soit 24% de l’enveloppe globale).
Les investisseurs tentent un timide retour
Le marché du crédit immobilier en 2024 voit un léger regain d’intérêt des investisseurs. Leur part est passée de 9,46% à 10,55% des achats. Cependant, leur profil a changé. Ils sont plus jeunes (39 ans en moyenne, contre 42 ans en 2023) et disposent de revenus inférieurs (7 335 € mensuels, soit une baisse de 10%).
“ En 2024, les revenus des investisseurs ont plongé de 10%. Leur apport a fondu de 24%. Résultat : le montant de leurs achats s’est effondré de 27%.” – Cécile Roquelaure.
Cette dégringolade s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, le marché locatif se dégrade. Ensuite, le HCSF bride sévèrement la capacité d’emprunt. Mais, ce n’est pas tout. Les taux d’intérêt frappent durement les investisseurs. En effet, ils sont les grands perdants de la hausse des taux. Leur surcoût atteint 10 points par rapport aux primo-accédants et 8 points face aux secundo-accédants. Un comble, quand on sait qu’ils affichent des revenus plus élevés et empruntent sur des durées plus courtes.
Cette situation met en lumière le malus risque appliqué par les banques. Dans un marché en berne, les investisseurs paient le prix fort. Leur profil, jadis prisé, semble aujourd’hui moins attractif pour les établissements de crédit.
Tendances du marché immobilier et impact sur le crédit
L’ancien continue d’attirer, au détriment du neuf
Le marché du crédit immobilier reflète une nette préférence pour l’ancien. 89% des achats concernent désormais des biens anciens, soit une hausse de 4 points. Cette tendance s’explique en partie par le manque de biens neufs disponibles. La part des achats dans le neuf a chuté de 8% à 6%, tandis que la construction individuelle est passée de 7% à 4%.
La fin du PTZ pour la construction individuelle depuis le 1er avril 2024 a certainement contribué à cette baisse. L’étude montre que la part de construction individuelle est passée de 7% en mars à 3,3% en mai 2024.
Des projets d’achat plus modestes, mais avec plus de travaux
Face à la hausse des taux et à la pression sur le pouvoir d’achat, les emprunteurs s’adaptent. L’enveloppe globale moyenne a diminué de 11%, passant à 277 081 €. Cependant, la part des achats avec travaux dans l’ancien a progressé de 3 points, atteignant 29%.
Cécile Roquelaure analyse : “ Le montant moyen des travaux a légèrement baissé (-5%) mais représente désormais 17% du prix du logement, contre 15% en 2023. Les acheteurs semblent privilégier l’achat de biens nécessitant des rénovations pour optimiser leur budget.”
Perspectives du marché du crédit immobilier pour 2024
Des incertitudes politiques et économiques
Le marché du crédit immobilier en 2024 fait face à plusieurs incertitudes. La dissolution de l’Assemblée Nationale pourrait impacter l’OAT (Obligation Assimilable du Trésor) et la politique du logement.
“ Six mois de baisse des taux sont maintenant sur la sellette. Scénario optimiste : un simple coup de frein. Pessimiste : un brutal retour à la hausse. N’oublions pas la règle d’or : 100 points séparent généralement l’OAT 10 ans des taux sur 20 ans. Une tension sur la dette souveraine française pourrait donc se répercuter sur les taux de crédit immobilier.” – Cécile Roquelaure.
Côté logement, c’est le grand flou. La future Assemblée pourrait redistribuer toutes les cartes. Des lois en gestation sont désormais dans les limbes. Cette parenthèse législative soulève une question brûlante : le logement retrouvera-t-il sa place au cœur du débat national ? Ces élections plongent donc le secteur dans l’expectative. Elles pourraient redessiner tout le paysage du crédit et de l’habitat en France. Promoteurs, banquiers, acheteurs… Tous retiennent leur souffle, guettant les prochains coups de théâtre politiques.
De plus, la politique de la BCE concernant les futures baisses de taux reste floue. Ces facteurs pourraient influencer l’évolution des taux de crédit immobilier dans les mois à venir.
Des éléments favorables pour la rentrée
Malgré ces incertitudes, des éléments positifs se profilent. Les banques devraient maintenir des politiques accommodantes à la rentrée. Elles pourraient consentir des efforts ciblés en cas de mise en concurrence, notamment via des prêts bonifiés.
L’étude d’Empruntis révèle que certaines banques proposent déjà des prêts bonifiés pour les primo-accédants : de 15 000 à 25 000 €, à taux zéro ou inférieur au prêt long, avec des critères d’éligibilité parfois différents.
“ Le marché du crédit reste difficile. Pourtant, les banques cherchent activement des clients. Elles sont prêtes à faire des efforts pour attirer les emprunteurs. La compétition s’intensifie. Les banques proposent souvent des taux plus bas que leurs barèmes officiels. Cette tendance pourrait se renforcer. Mais attention : si l’argent coûte plus cher aux banques, elles changeront de tactique. Fini les baisses de taux pour tous. Elles préféreront des offres personnalisées ”, précise Cécile Roquelaure.
Par ailleurs, la faible baisse des prix dans certains secteurs et la possible stabilité des taux pourraient encourager les acheteurs attentistes à passer à l’action. L’étude montre que le pouvoir de négociation sur le prix reste présent grâce à un nombre d’acheteurs toujours en repli et à la présence de vendeurs contraints.
En conclusion,
Le marché du crédit immobilier en 2024 présente une reprise en demi-teinte. La baisse des taux redonne du pouvoir d’achat aux emprunteurs, mais les contraintes réglementaires et les incertitudes économiques persistent. Les primo-accédants et l’ancien tirent leur épingle du jeu, tandis que les investisseurs tentent un retour prudent.
Cécile Roquelaure conclut : “ L’évolution du marché dans les mois à venir dépendra largement des décisions politiques et économiques, ainsi que de la confiance des acheteurs potentiels. Les banques jouent un rôle crucial en maintenant des politiques accommodantes et en proposant des solutions innovantes comme les prêts bonifiés.”