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Hausse des frais de notaire : le casse-tête des primo-accédants

Hausse des frais de notaire : le casse-tête des primo-accédants

Le marché immobilier français pourrait connaître un coup de froid avec la récente annonce du gouvernement d’augmenter les frais de notaire. Cette hausse de 0,5 point des droits de mutation à titre onéreux (DMTO), passant de 4,5 % à 5 %, risque d’alourdir le budget des ménages. Elle impactera surtout les primo-accédants, déjà fragilisés par un contexte économique tendu. Une mesure justifiée par la nécessité de renflouer les caisses des départements, mais qui fait grincer des dents. Décryptage.

Sommaire

Un mauvais signal envoyé aux acheteurs

Alors que les voyants semblaient au vert pour les acheteurs avec des prix de l’immobilier et des taux d’intérêt orientés à la baisse, cette hausse des frais de notaire vient doucher les espoirs de reprise.

Pour Caroline Arnould, DG de CAFPI, premier réseau de courtage en crédits “c’est une très mauvaise idée qui va impacter lourdement tous les acquéreurs”.

Une mesure d’autant plus mal venue qu’elle contredit les signaux de soutien au pouvoir d’achat envoyés par le gouvernement.

“Ce n’est pas une taxe invisible, c’est un chèque direct signé par les acheteurs immobiliers aux départements”, insiste Séverine Amate, experte immobilière membre des Expertes France. Un coup dur pour la confiance des ménages comme des investisseurs.

Parce que l’addition s’annonce salée pour les futurs propriétaires. Selon les exemples de Meilleurtaux, pour un bien ancien à 200 000€, il faudra débourser 1000€ supplémentaires en frais de notaire.

“Pour un bien à 200 000 €, c’est 1 000 € de plus à trouver. Cela peut suffire à bloquer certains projets”, confirme Séverine Amate.

Des frais en forte hausse qui alourdissent des “frais de notaire” déjà conséquents, lesquels passeraient de 15 608€ à 16 608€ TTC sur ce même bien à 200 000€. Soit 6,5% de plus. Et, ce n’est pas tout, puisque ces frais supplémentaires seront le plus souvent intégrés au crédit immobilier, alourdissant d’autant les mensualités.

Les jeunes et les primo-accédants pénalisés

Les grands perdants de cette réforme sont sans conteste les jeunes ménages primo-accédants. Avec des revenus souvent modestes et peu d’apport, ils doivent déjà jongler avec des contraintes de taille : prix élevés, forte demande, accès au crédit compliqué…

“Cette hausse est une charge supplémentaire qui vient s’ajouter à des taux d’intérêt hauts et une inflation marquée. Cela peut décourager certains d’acheter ou réduire leur capacité d’investissement”, analyse Séverine Amate.

Quand on sait que les primo-accédants sont le principal moteur du marché immobilier, c’est toute la chaîne qui pourrait se gripper.

“Comme l’apport est faible chez eux et que ces frais sont rarement financés, cela va rendre encore plus difficile leur premier achat !”, s’inquiète Maël Bernier, porte-parole du courtier Meilleurtaux. De quoi marginaliser un peu plus une génération déjà fragilisée.

Une mesure temporaire aux effets durables

Si le gouvernement limite pour l’instant cette hausse des DMTO à 3 ans, les professionnels craignent qu’elle ne s’inscrive dans le marbre.

“En France, les dispositifs temporaires finissent presque toujours par s’inscrire dans la durée. Il y a un risque réel de voir la fiscalité immobilière s’alourdir durablement”, redoute Caroline Arnould de CAFPI.

De quoi alourdir durablement une fiscalité immobilière déjà peu favorable, et installer un climat d’incertitude préjudiciable au marché. Alors qu’un sursaut était attendu du côté des pouvoirs publics pour soutenir la reprise, le message envoyé apparaît pour le moins contradictoire. Et, laisse les acteurs de l’immobilier circonspects.

Une incertitude fiscale qui pèse sur le moral des acheteurs et des investisseurs. Les recettes supplémentaires générées, estimées à près d’un milliard d’euros sur 3 ans, serviront certes à financer les services publics locaux mis à mal. Mais, à quel prix pour l’immobilier et les ménages ?

Un impact variable selon les régions

Autre inquiétude, cette hausse des frais de notaire pourrait creuser les disparités immobilières entre les territoires. Les zones tendues et les grandes villes devraient être peu affectées. En revanche, les régions où le marché est déjà fragile pourraient en subir les conséquences.

“Dans les secteurs moins dynamiques, cette hausse pourrait réduire la demande et exercer une pression à la baisse sur les prix”, prévient Séverine Amate. Un coup dur pour des départements où l’immobilier est déjà en souffrance, et qui pourrait aggraver la fracture territoriale.

Cette hausse des frais de notaire ne devrait pas stopper tous les projets immobiliers. Cependant, elle pourrait décourager les acheteurs les plus fragiles. Elle risque également de ralentir un marché immobilier encore en convalescence. Une pilule d’autant plus dure à avaler qu’elle concerne avant tout l’immobilier ancien, déjà moins avantagé fiscalement que le neuf. Avec le risque d’accentuer les fractures entre départements dynamiques, où les DMTO continueront à renflouer les caisses, et zones détendues où les transactions se raréfient.

Une pilule dure à avaler pour l’ancien

C’est une autre limite de la mesure : elle ne vise que les ventes dans l’ancien. Puisque l’immobilier neuf conserve un régime fiscal avantageux avec des DMTO réduits (2 à 3% en moyenne contre 5,5 à 6% dans l’ancien). Un coup dur pour un parc ancien déjà fragilisé par la crise énergétique et le désamour des acheteurs.

“Le neuf est épargné, mais pour les 80 % d’acheteurs qui se tournent vers l’ancien, c’est une note plus salée”, commente Séverine Amate. Avec le risque d’accélérer la désaffection pour les biens énergivores ou éloignés de toutes commodités.

Hausse des frais de notaire
À noter : les émoluments du notaire n’augmentent pas, seule la part départementale des droits de mutation est concernée.

Si elle ne devrait pas avorter tous les projets immobiliers, la hausse des frais de notaire risque donc de freiner les ardeurs des acheteurs les plus fragiles, et de gripper un marché immobilier encore convalescent. Une pilule d’autant plus dure à avaler que les départements pourraient récupérer plus d’un milliard d’euros sur le dos des acquéreurs…

Isabelle DAHAN

Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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