Une récente étude des Notaires du Grand Paris jette une lumière crue sur l’effet croissant du DPE immobilier dans les dynamiques de vente en Île-de-France. À la suite de la loi Climat et Résilience, les logements énergivores, classés F et G, sont de plus en plus présents dans les transactions, notamment dans la capitale où ils représentent près d’un tiers des ventes. Les propriétaires cherchent à se débarrasser de leurs passoires thermiques avant que les interdictions de location ne se durcissent. En parallèle, les logements bien notés restent rares. Cette situation soulève une question centrale : le DPE immobilier transforme-t-il en profondeur le marché de l’ancien ? Et, quelles conséquences pour les vendeurs comme pour les acquéreurs ?
Sommaire :
- Le DPE immobilier : un tournant réglementaire pour le marché locatif
- Des passoires énergétiques de plus en plus présentes dans les ventes
- Paris en première ligne face à la crise du DPE immobilier
- Petite et Grande Couronne : des contrastes énergétiques marqués
- Les petits logements pénalisés malgré la réforme du DPE
Le DPE immobilier : un tournant réglementaire pour le marché locatif
Entrée en vigueur en plusieurs étapes depuis 2021, la loi Climat et Résilience a profondément transformé le rôle du DPE immobilier. Initialement informatif, le Diagnostic de Performance Énergétique est désormais une condition de la location. Depuis 2022, la loi interdit aux propriétaires d’augmenter les loyers des logements classés F ou G. En 2023, elle a franchi une nouvelle étape en interdisant la mise en location des biens classés G+. Et en 2025, elle va plus loin : elle exclut toute la classe G du marché locatif.
Ces mesures rendent les passoires thermiques difficilement rentables pour les investisseurs. Résultat : les propriétaires, surtout ceux de maisons individuelles soumises à l’audit énergétique obligatoire, cherchent à vendre ces biens avant une dévalorisation durable. Le DPE immobilier devient ainsi un critère structurant dans les décisions de vente.
Des passoires énergétiques de plus en plus présentes dans les ventes
Les données fournies par les Notaires du Grand Paris indiquent une tendance contre-intuitive. Alors qu’on aurait pu s’attendre à une raréfaction des logements énergivores sur le marché, leur part ne cesse de croître dans les transactions. Ainsi, en Île-de-France, les appartements classés G représentaient 7,8 % des ventes en 2022, 8,4 % en 2023, et 9,0 % en 2024. Par ailleurs, les maisons classées G sont passées de 8,6 % en 2022 à 11,4 % en 2024.
Ce phénomène traduit une volonté marquée des propriétaires de se débarrasser de biens devenus juridiquement et financièrement contraignants. Cela renforce l’idée que le DPE immobilier agit comme un catalyseur de ventes à court terme pour les logements mal classés.
Paris en première ligne face à la crise du DPE immobilier
La situation à Paris est particulièrement critique. Selon les données du rapport, 32,4 % des ventes d’appartements réalisés avec un DPE renseigné en 2024 concernent des biens classés F ou G, soit près d’un logement sur trois. Ce chiffre est en ligne avec celui de 2023 (32,2 %), et dépasse largement la proportion estimée dans le parc parisien par l’APUR, qui recense 28 % de logements mal notés.

Cette surreprésentation reflète l’ancienneté du bâti parisien et la difficulté d’y entreprendre des rénovations lourdes. Le DPE immobilier y agit donc comme un révélateur des limites structurelles de la capitale à répondre aux objectifs climatiques.
Petite et Grande Couronne : des contrastes énergétiques marqués
En Petite Couronne, les logements énergivores restent nombreux, mais dans des proportions plus modérées : environ 19 % des appartements et entre 31 % et 34 % des maisons. La Seine-Saint-Denis se distingue par un taux particulièrement élevé : 34 % des maisons vendues en 2024 y sont classées F ou G, avec 30,3 % supplémentaires en classe E.
En revanche, la Grande Couronne, où le parc est plus récent, présente des chiffres plus rassurants : seulement 15 % de logements énergivores dans les ventes. Le DPE immobilier y joue un rôle moindre dans les décisions d’achat ou de vente.
Les petits logements pénalisés malgré la réforme du DPE
Les petites surfaces sont plus souvent classées F ou G. En 2024, 37,9 % des studios et 27 % des deux-pièces vendus au T3 étaient mal notés. Toutefois, cette tendance a légèrement fléchi au quatrième trimestre. Et, cela, grâce à un arrêté de mars 2024 corrigeant le calcul du DPE pour les logements de moins de 40 m².
En effet, ces petites surfaces, du fait de leur rapport défavorable entre surface habitable et surface exposée (murs, plafonds, sols, etc.), étaient souvent systématiquement pénalisées dans l’évaluation thermique, indépendamment de leur consommation réelle. L’arrêté, entré en vigueur le 1er juillet 2024, a introduit une modification de la méthode de calcul du DPE pour prendre en compte cette spécificité. Ainsi, il a ajusté certains coefficients techniques (comme ceux liés aux déperditions thermiques et à la compacité du bâti).
Ce correctif a permis de réévaluer plus justement les performances énergétiques des studios et petits deux-pièces, souvent chauffés efficacement mais injustement classés comme passoires thermiques. Il a donc eu un impact immédiat sur les statistiques de vente, réduisant la part des logements classés F ou G parmi les petites surfaces : -2 points pour les studios, -1,4 point pour les deux-pièces.
Malgré cette correction, les petits logements restent les plus mal notés du parc. Le DPE immobilier y continue de jouer un rôle dissuasif pour les acheteurs comme pour les investisseurs.