La crise de l’artisanat du bâtiment s’aggrave au deuxième trimestre 2025. Selon la dernière note de conjoncture de la CAPEB, l’activité globale du secteur recule de 4,5% par rapport à 2024. Cette dégradation touche tous les segments : construction neuve (-9%) et entretien-rénovation (-1,5%). Les carnets de commandes fondent à 68 jours de travail, soit 4 jours de moins qu’en 2024. L’emploi chute dramatiquement avec 28 305 postes supprimés en un an. Cette crise révèle des dysfonctionnements structurels majeurs. L’instabilité politique paralyse les décisions. Les aides publiques diminuent brutalement. MaPrimeRénov’ subit une suspension qui prive les artisans de commandes cruciales. Face à cette situation, la CAPEB propose des solutions concrètes pour relancer l’activité et préserver l’emploi dans ce secteur vital de l’économie française.
Sommaire :
- Une activité en chute libre qui confirme la crise structurelle
- L’emploi sacrifié dans une spirale de licenciements
- Des carnets de commandes en berne qui inquiètent les entrepreneurs
- L’instabilité politique aggrave la crise artisanat bâtiment
- Les solutions de la CAPEB pour sortir de l’impasse
À retenir – Crise de l’artisanat du bâtiment
- L’activité de l’artisanat du bâtiment chute de 4,5% au deuxième trimestre 2025.
- 28 305 emplois disparaissent en un an avec des licenciements qui dépassent largement les embauches prévues.
- Les carnets de commandes fondent à 68 jours de travail, privant les entreprises de visibilité économique.
- L’instabilité politique et la suspension de MaPrimeRénov’ aggravent cette crise en décourageant les investissements.
- La CAPEB propose des solutions concrètes : simplification RGE, parcours rénovation par gestes et stabilité des aides publiques.
Une activité en chute libre qui confirme la crise structurelle
La crise de l’artisanat du bâtiment atteint des proportions alarmantes au deuxième trimestre 2025, selon la note de conjoncture CAPEB-Xerfi. L’activité globale recule de 4,5% par rapport à la même période en 2024, après -5% au premier trimestre et -6% au quatrième trimestre 2024. Cette tendance négative, qui perdure depuis plus d’un an, confirme l’enracinement de la crise dans le secteur.
La construction neuve s’effondre avec une baisse de 9%. En particulier, les logements individuels purs enregistrent un recul de 15,1%, d’après les données du Service de la donnée et des études statistiques (SDES). Cette dégradation s’explique par un niveau de mises en chantier bien inférieur à celui observé entre 2019 et 2023. L’entretien-rénovation résiste moins bien qu’attendu, avec un recul de 1,5%. Même les travaux d’amélioration énergétique reculent de 1,5%, malgré l’urgence climatique.
Cette crise frappe l’ensemble des corps de métiers sans exception. Les entreprises de menuiserie-serrurerie subissent le plus fort recul (-5,5%), suivies de la maçonnerie (-5%). Les activités de couverture-plomberie-chauffage et d’aménagement-décoration-plâtrerie reculent respectivement de -3,5% et -4,5%. Même l’électricité, traditionnellement plus résistante, enregistre une baisse de -3%.
L’emploi sacrifié dans une spirale de licenciements
La crise de l’artisanat du bâtiment détruit massivement l’emploi, selon les données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). En un an, 28 305 postes ont disparu dans les entreprises de moins de 20 salariés, soit un recul dramatique de 3,4% au premier trimestre 2025. Au total, l’emploi salarié du BTP s’établit à 1 542 500 au premier trimestre, en baisse de 2% sur un an d’après l’INSEE, contre seulement -0,3% pour l’ensemble des secteurs principalement marchands.
Les TPE du secteur, pourtant pourvoyeuses d’apprentissage et d’emplois locaux, licencient massivement. Depuis le second semestre 2024, les intentions de licenciement (12%) dépassent largement les perspectives d’embauche (7%). Cette inversion nette illustre l’ampleur du choc sur l’emploi. L’intérim subit également la crise, avec un recul de 6% et seulement 127 715 emplois équivalents temps plein recensés par la DARES. Le taux de recours à l’intérim tombe ainsi à 7,6%.
Si aucune mesure n’est prise rapidement, cette crise pourrait menacer des dizaines de milliers d’emplois supplémentaires. Seules 13% des entreprises artisanales ont cherché à embaucher au premier semestre 2025, et parmi elles, seulement 7% ont réussi. Cette situation fragilise la transmission des savoir-faire et met en péril l’apprentissage, piliers historiques du secteur artisanal.
Des carnets de commandes en berne qui inquiètent les entrepreneurs
Les carnets de commandes révèlent l’ampleur dramatique de la crise de l’artisanat du bâtiment. Fin juin 2025, ils ne représentent plus que 68 jours de travail en moyenne, contre 72 jours un an plus tôt. Cette perte de 4 jours cruciaux réduit dangereusement la visibilité des entreprises. De plus, la baisse touche l’ensemble des segments, qu’il s’agisse de la construction neuve ou de l’entretien-rénovation.
Parallèlement, le moral des chefs d’entreprise s’effondre avec des soldes d’opinion fortement négatifs : -17 points pour la construction neuve et -6 points pour l’entretien-amélioration. Ces indicateurs restent très éloignés des moyennes historiques. La dimension géographique confirme cette tendance généralisée, avec des reculs d’activité allant de -2,5% dans les Hauts-de-France à -9% dans le Centre-Val de Loire.
À cela s’ajoutent de graves difficultés de trésorerie. Plus d’une entreprise sur cinq (20%) signale des besoins urgents de financement, pour un montant moyen de 30 000 euros. Dans 77% des cas, ce besoin dépasse 10 000 euros. Le solde d’opinion sur la trésorerie plonge à -13 points au deuxième trimestre 2025, soit 4 points en dessous de la moyenne de long terme.
En conséquence, cette crise menace directement la survie de nombreuses entreprises familiales. Or, elles représentent 96% du secteur et emploient à elles seules 570 000 salariés.
L’instabilité politique aggrave la crise artisanat bâtiment
L’instabilité politique aggrave fortement la crise de l’artisanat du bâtiment. Les changements successifs de gouvernement depuis 2023 ont stoppé net les réformes en cours, notamment celles liées à la simplification administrative. Cette situation provoque une démobilisation des artisans, qui attendaient depuis des mois des avancées concrètes.
La suspension du dispositif Parcours accompagné MaPrimeRénov’, début juin 2025, illustre parfaitement cette instabilité. Cette décision prive brutalement les ménages et les artisans d’un soutien financier essentiel pour les travaux de rénovation énergétique. Depuis le 2 septembre 2025, les aides pour l’isolation des murs intérieurs et extérieurs ont également disparu, alors même que ces travaux figuraient parmi les plus demandés.
La crise s’amplifie également avec la modification annoncée du coefficient de conversion de l’électricité dans le Diagnostic de Performance Énergétique (DPE) à partir de 2026. Cette mesure reclassera automatiquement près de 850 000 logements chauffés à l’électricité en meilleures catégories énergétiques, sans aucun travail de rénovation. La CAPEB dénonce une décision technique aux conséquences lourdes, qui risque de freiner artificiellement la demande de rénovations performantes.
Parallèlement, la confiance des ménages s’effrite face à l’instabilité des aides et des réglementations. Pourtant, leur épargne reste abondante, atteignant 18,8% du revenu disponible selon l’INSEE. Mais, faute de visibilité sur les politiques publiques, beaucoup préfèrent reporter ou annuler leurs projets de rénovation.
Les solutions de la CAPEB pour sortir de l’impasse
Face à la crise de l’artisanat du bâtiment, la CAPEB met en avant des solutions concrètes qui font consensus dans la filière. Depuis plus de deux ans, l’organisation formule des propositions pour faciliter l’accès des entreprises artisanales aux marchés de la rénovation énergétique. Cet été, elle a obtenu des avancées avec des engagements forts de la ministre chargée du Logement.
La simplification de la qualification Reconnu Garant de l’Environnement (RGE) via la Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) constitue une première mesure essentielle. L’allègement des critères de base permettra à davantage d’artisans d’accéder aux marchés subventionnés. En parallèle, la simplification du recours aux Groupements Momentanés d’Entreprises (GME) facilitera la collaboration entre différents corps de métiers.
L’élaboration d’un parcours de rénovation énergétique par gestes marque aussi une avancée majeure. Adapté aux particuliers comme aux professionnels, ce dispositif fait l’unanimité dans la filière. Il accompagnera les ménages dans une démarche progressive de rénovation, plus accessible financièrement que les rénovations globales.
La CAPEB insiste néanmoins sur la nécessité de créer une dynamique de masse. Les 2,6 milliards d’euros mobilisés pour seulement 90 000 bénéficiaires montrent les limites du ciblage actuel. Pour atteindre l’objectif de 370 000 logements rénovés par an et de 750 000 d’ici 2050, il faut une approche différente, capable de bénéficier à l’ensemble de la filière : industriels, distributeurs, artisans et clients.