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Impôts & Taxes

Gérer mes biens immobiliers : un outil efficace ou un casse-tête administratif ?

Gérer mes biens immobiliers : un outil efficace ou un casse-tête administratif ?

Depuis la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales, l’outil Gérer mes biens immobiliers (GMBI) est devenu un passage obligé pour les propriétaires. Cependant, son déploiement a été marqué par des ratés majeurs. Un rapport de la Cour des comptes, publié le 23 janvier 2025, dresse un constat sévère sur les erreurs de taxation et les difficultés rencontrées par les usagers. Face aux critiques, la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) défend son projet et annonce des ajustements. Mais, ces corrections seront-elles suffisantes pour améliorer le dispositif et éviter de nouvelles erreurs fiscales ?

Sommaire :

Gérer mes biens immobiliers : un outil nécessaire mais un déploiement chaotique

L’outil Gérer mes biens immobiliers (GMBI) a été conçu dans un contexte de réforme fiscale majeure. Suite à la suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales, l’administration fiscale s’est retrouvée face à un défi majeur. Elle devait identifier avec précision les logements toujours soumis à l’imposition. Parmi eux, on retrouvait principalement les résidences secondaires ainsi que les logements vacants.

Pour répondre à cette problématique, la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) a lancé en 2018 un projet ambitieux visant à centraliser les informations relatives à l’occupation des biens immobiliers en France. Toutefois, ce projet s’inscrivait dans un calendrier particulièrement contraint. Puisqu’il devait être opérationnel avant 2023 afin de permettre la taxation des logements concernés dès la suppression définitive de la taxe d’habitation principale.

Cependant, la mise en place de Gérer mes biens immobiliers s’est heurtée à plusieurs obstacles. Tout d’abord, le périmètre du projet a été progressivement élargi. Et, l’intégration de la gestion des taxes d’urbanisme a ajouté de nouveaux défis, tant sur le plan technique que logistique. Par ailleurs, la crise sanitaire de 2020 est venue compliquer davantage la situation. Elle a perturbé le développement du système, retardé la collecte des retours utilisateurs et rendu plus difficile l’optimisation de l’interface.

Dans son rapport, la Cour des comptes souligne également un défaut de gouvernance dans la gestion du projet. Le manque de coordination entre les différents services et l’absence d’une direction de projet transversale ont contribué à une mise en œuvre chaotique. Selon son rapport, « la complexité du projet aurait nécessité une gouvernance plus rigoureuse et des ressources de pilotage dédiées dès son lancement ».

Des erreurs de taxation aux conséquences lourdes

Dès son lancement, Gérer mes biens immobiliers a rencontré des difficultés majeures. En 2023, environ 940 000 locaux ont été taxés à tort, soit 1,3 % du total des biens recensés. Cette situation a provoqué un tollé parmi les contribuables. Et, certains ont découvert avec stupeur qu’ils devaient payer une taxe alors que leur bien était exonéré.

Ces erreurs trouvent leur origine dans plusieurs dysfonctionnements. D’une part, une grande partie des propriétaires n’avait pas bien compris l’obligation de déclaration. Parce que la suppression de la taxe d’habitation principale avait laissé penser à beaucoup qu’ils n’avaient plus aucune formalité à accomplir. D’autre part, les campagnes d’information lancées par la DGFiP n’avaient pas été suffisamment claires sur la nécessité de remplir cette déclaration.

En outre, le manque de déclarations volontaires a conduit à des erreurs d’imposition. En 2023, 12 % des biens appartenant à des petits propriétaires et plus de 20 % de ceux détenus par des grands propriétaires n’avaient toujours pas été déclarés. Face à cette absence d’informations, l’administration fiscale a appliqué des règles de taxation par défaut, ce qui a souvent entraîné des erreurs.

Les services fiscaux ont dû traiter un afflux massif de contestations. La DGFiP a reconnu ces erreurs et a mis en place des procédures de rectification. Elle précise que « les contribuables concernés ont obtenu l’annulation de cette taxation erronée et n’ont versé aucun impôt à tort ».

Une réponse gouvernementale entre défense et aveux de faiblesse

Face aux critiques de la Cour des comptes, le ministère de l’Économie et des Finances a pris la parole pour défendre le projet tout en reconnaissant certaines lacunes. Dans sa réponse officielle, la ministre des Comptes publics souligne que « malgré les difficultés rencontrées, GMBI permet d’automatiser des traitements auparavant manuels et d’améliorer la qualité des données foncières ».

Ainsi, le gouvernement met en avant des avancées concrètes grâce au dispositif “Gérer mes biens immobiliers”. Puisque le taux de déclaration a progressé, passant de 82 % en 2023 à 88 % en 2024, signe que les propriétaires commencent à mieux appréhender leurs obligations. Par ailleurs, l’administration fiscale met en avant les gains de productivité liés à l’outil. Ainsi, la suppression des tâches manuelles aurait permis de libérer 2 600 postes au sein des services fiscaux.

Cependant, la Cour des comptes reste sceptique quant aux bénéfices réels de l’outil. Elle souligne que les erreurs de taxation ont généré des coûts administratifs imprévus pour l’État. De même, les dysfonctionnements du système ont eu un impact négatif sur la relation entre l’administration fiscale et les contribuables.

Gérer mes biens immobiliers : les évolutions prévues en 2025 pour corriger le tir

Conscient des problèmes rencontrés, le gouvernement a annoncé plusieurs évolutions pour 2025 afin d’améliorer l’efficacité de Gérer mes biens immobiliers.

D’une part, l’administration fiscale prévoit une simplification du processus déclaratif. Initialement, les bailleurs devaient déclarer le montant des loyers perçus dès 2025, mais cette obligation pourrait être reportée pour éviter de nouvelles complications.

D’autre part, les locataires seront désormais sollicités pour compléter les informations. Une nouvelle disposition de la loi de finances 2025 impose aux occupants de résidences secondaires d’indiquer leur adresse dans leur déclaration de revenus. L’objectif est de croiser ces informations avec celles des propriétaires afin d’améliorer la fiabilité des données collectées.

Enfin, le gouvernement entend renforcer sa communication pour éviter que les erreurs de déclaration ne se reproduisent. De nouvelles campagnes d’information seront mises en place, notamment à destination des personnes les moins à l’aise avec le numérique.

Gérer mes biens immobiliers : les évolutions prévues en 2025 pour corriger le tir
Malgré ces ajustements, des incertitudes demeurent sur la capacité de l’outil à remplir pleinement ses objectifs. L’administration doit restaurer la confiance des usagers et prouver que ses corrections garantiront une gestion fiscale efficace et sans erreurs majeures.

Isabelle DAHAN

Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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