Le marché immobilier francilien connaît une transformation notable depuis 2022. Contrairement aux tendances précédentes, la part des logements énergivores dans les ventes a significativement augmenté. Cette évolution inattendue soulève des questions sur les motivations des propriétaires et l’attractivité de ces biens. Parallèlement, l’analyse révèle un biais important du diagnostic de performance énergétique (DPE) envers les petites surfaces, particulièrement les studios. Ce phénomène, plus marqué à Paris, met en lumière les limites de la méthode de calcul actuelle du DPE. Cependant, une lueur d’espoir apparaît avec la modification réglementaire prévue pour juillet 2024. Ainsi, la réforme DPE 2024 pourrait rééquilibrer la situation pour les logements de moins de 40 m².
Sommaire :
- La surprenante évolution des logements énergivores en Ile-de-France
- Réforme DPE 2024 : le biais du DPE envers les petites surfaces est un problème majeur
- Une solution adaptée aux petites surfaces
- Les implications de la réforme DPE 2024 pour les propriétaires et les bailleurs
- Vers une extension de la réforme ?
La surprenante évolution des logements énergivores en Ile-de-France
Une hausse inattendue des passoires thermiques depuis 2022
La réforme DPE 2024 s’inscrit dans un contexte d’évolution inattendue du marché immobilier francilien. Selon les données des Notaires du Grand Paris, la part des logements énergivores dans les ventes a significativement augmenté depuis 2022. Ce qui inverse la tendance observée jusqu’en 2021.
Les chiffres sont frappants : en 2023, 20,5% des appartements vendus en Ile-de-France étaient classés F ou G, contre seulement 10,2% en 2021.
Pour les maisons, cette proportion est passée de 13,9% en 2021 à 23,8% en 2023. Cette tendance est particulièrement marquée à Paris, où 32,2% des logements vendus en 2023 étaient classés F ou G, contre 20% en 2013.
L’impact de la loi Climat et Résilience
La réforme DPE 2024 s’inscrit dans la continuité de la loi Climat et Résilience, promulguée le 22 août 2021. En effet, cette loi prévoit l’interdiction progressive de la location des passoires thermiques :
- dès 2025 pour les logements classés G,
- en 2028 pour ceux classés F,
- et en 2034 pour ceux classés E.
Baudouin de la Varende, cofondateur d’Ithaque, explique : “L’évolution du DPE est une excellente nouvelle pour les petits logements. Elle permet enfin une évaluation plus juste et encourage les propriétaires à entreprendre des travaux de rénovation énergétique.”
Réforme DPE 2024 : le biais du DPE envers les petites surfaces est un problème majeur
Les studios particulièrement pénalisés
La méthode de calcul actuelle du DPE, qui rapporte la consommation d’énergie à la surface, désavantage fortement les petits logements. À ce propos, les données des Notaires du Grand Paris sont éloquentes.
Puisqu’en 2023, 36,4% des studios vendus en Ile-de-France étaient classés F ou G, contre seulement 9,6% pour les grands appartements de 4 pièces et plus.
Cette disparité s’explique par le fait que certains équipements, comme le chauffe-eau, consomment la même quantité d’énergie quelle que soit la taille du logement. Ainsi, rapportée au mètre carré, cette consommation pénalise davantage les petites surfaces.
L’impact sur le marché parisien
À Paris, où le parc immobilier est ancien et composé de nombreux petits logements, ce phénomène est particulièrement prononcé. Selon les Notaires du Grand Paris, la part des logements classés F et G est passée de 20% en 2013 à 32,2% en 2023 dans la capitale.
La réforme DPE 2024 : Une solution adaptée aux petites surfaces
De nouveaux seuils pour les logements de moins de 40 m²
La réforme DPE 2024, qui entre en vigueur le 1er juillet, introduit des seuils spécifiques pour les logements de moins de 40 m². L’arrêté du 25 mars 2024 détaille ces nouvelles normes :
- Un appartement de 30 m² pourra être classé A s’il consomme moins de 75 kWh/m²/an, contre 70 kWh/m²/an actuellement.
- Pour un studio de 20 m², le seuil maximal sera de 87 kWh/m²/an pour obtenir une classification adéquate.
- L’étiquette G ne sera appliquée qu’à partir de 439 kWh/m²/an pour un logement de 30 m², contre 420 kWh/m²/an actuellement.
Eric Houdet, Fondateur de Homapi, souligne : “Ces modifications visent à ajuster les seuils de consommation énergétique pour mieux prendre en compte les spécificités des petites surfaces.”
Un rééquilibrage attendu du marché grâce à la réforme DPE 2024
Cette réforme du DPE devrait permettre de reclasser de nombreux petits logements actuellement considérés comme des passoires thermiques. Selon les estimations du ministère de la Transition écologique, environ 140 000 logements pourraient voir leur étiquette énergétique s’améliorer.
Baudouin de la Varende ajoute : “En rendant les travaux de rénovation plus valorisants et en augmentant la valeur des biens, cette réforme soutient aussi la transition énergétique globale.”
Les implications de la réforme DPE 2024 pour les propriétaires et les bailleurs
Cela encourage les propriétaires à investir dans la rénovation énergétique de leurs biens. Les efforts de rénovation seront désormais mieux reconnus et valorisés, notamment pour les petites surfaces. Par exemple, un propriétaire qui investit dans l’isolation de son studio parisien pourrait voir son bien passer d’une étiquette F à une étiquette D. Ce qui le rend ainsi plus attractif sur le marché locatif et de la vente.
À cet effet, les DPE réalisés entre le 1er juillet 2021 et le 1er juillet 2024 pour les logements de moins de 40 m² pourront bénéficier d’une nouvelle attestation reflétant la mise à jour de l’étiquette énergétique. Cette mesure, prévue par la réforme DPE 2024, simplifie les démarches pour les propriétaires.
Vers une extension de la réforme ?
Bien que la réforme DPE 2024 apporte des solutions pour les petites surfaces, certains acteurs du secteur s’interrogent sur la possibilité d’étendre ces ajustements à d’autres types de logements.
Eric Houdet de Homapi pose la question : “À quand une évolution pour les rez-de-chaussée et les derniers étages qui sont aussi lourdement impactés ?”.
En effet, ces logements sont souvent pénalisés par leur exposition ou leur situation dans l’immeuble, indépendamment de leur performance énergétique intrinsèque.
L’impact sur le marché immobilier à long terme
Cette réforme devrait contribuer à rééquilibrer le marché immobilier francilien, en particulier à Paris. Elle pourrait stimuler les investissements dans la rénovation énergétique et augmenter la valeur des petits logements. Cependant, il faudra du temps pour mesurer pleinement son impact sur les tendances observées depuis 2022. Les professionnels du secteur resteront attentifs à l’évolution des ventes de logements énergivores dans les prochaines années.
Les défis de la transition énergétique
Cette réforme s’inscrit dans un contexte plus large de transition énergétique. Le défi reste de taille. Selon les données des Notaires du Grand Paris, la part des ventes de logements économes en énergie (étiquettes A, B ou C) tend à s’éroder. Ainsi, elle passe de 18,7% en 2021 à 16,8% en 2023 pour les appartements.
Pour atteindre les objectifs de la Stratégie Nationale Bas-Carbone, qui vise la neutralité carbone d’ici 2050, des efforts supplémentaires seront nécessaires, tant de la part des pouvoirs publics que des propriétaires. Dans tous les cas, la réforme DPE 2024 marque un tournant important dans la politique énergétique du logement en France. En cela, elle pourrait servir de modèle pour d’autres pays confrontés à des défis similaires.