La trêve hivernale touche à sa fin. Après cinq mois d’interruption des expulsions locatives, 30.000 à 40.000 foyers risquent d’être délogés, souvent en raison de loyers impayés. Alors qu’un plan national de prévention des expulsions est lancé par la ministre Emmanuelle Cosse, Michel Fréchet président de la Confédération Générale du Logement nous livre son sentiment.
Emmanuelle Cosse, ministre du Logement et de l’Habitat durable, a lancé un plan national de prévention des expulsions locatives. « Nous devons agir en amont, plutôt que laisser se dégrader les situations jusqu’à l’expulsion », a-t-elle déclaré. Ce plan coordonne les moyens de l’État et de l’ensemble des acteurs pour trouver des solutions dès les premières difficultés de règlement des locataires et faire diminuer la moyenne annuelle de 11.000 expulsions. Il faut, en effet mieux repérer, évaluer et traiter les difficultés dès les premiers signes en complétant une approche, aujourd’hui dominée par le traitement de la dette et la reprise du loyer courant, par la recherche, lorsque c’est nécessaire, d’une solution de relogement.
« Chaque département s’appuiera sur les structures spécialisées pour se doter d’une antenne de prévention des expulsions afin d’apporter conseil notamment juridique et soutien aux acteurs locaux, bailleurs et locataires sur les procédures existantes », précise la ministre.
Pour Michel Fréchet, Président de la Confédération Générale du Logement, il s’agit là d’une mauvaise pièce qui se rejoue inlassablement année après année : « L’augmentation continue du nombre d’expulsions ne constitue pas un sujet en soi, mais bien une conséquence d’un problème sociétal plus global : la hausse du coût du logement en France, et son corollaire, l’augmentation de la pauvreté ».
Quand le locataire n’arrive plus à payer son loyer, il peut se tourner vers les pouvoirs publics pour obtenir des aides des services sociaux. Or, bien souvent les subventions de l’Etat accordées aux collectivités locales sont insuffisantes, et réduites chaque année alors que le nombre de familles délogées, lui, ne cesse de croître…
Les associations telles que la CGL accompagnent les locataires dans leurs démarches juridiques. Dans le cadre d’une situation d’expulsion, il est possible d’obtenir un report de la part du juge d’application des peines. En parallèle, les acteurs sociaux peuvent également proposer des solutions temporaires d’hébergement, qui s’avèrent également la plupart du temps assez précaires.
Parce que l’envoi d’une lettre simple de convocation en dehors de l’avis de passage des huissiers fait augmenter de 30% la présence des locataires à l’audience et que cela permet souvent d’obtenir des délais de paiement, les huissiers de justice devront désormais systématiquement alerter les ménages sur la nécessité de leur présence à travers un document type qu’ils devront joindre à leur avis de passage.
Par ailleurs, le plan national de prévention complète les actions en cours de mise œuvre pour casser la spirale de l’expulsion, comme le renforcement du rôle des Commissions de coordination des actions de prévention des expulsions (CCAPEX) pour traiter les impayés de loyer en amont. C’est le cas également pour la mise en place d’une charte des expulsions qui devrait simplifier et fluidifier les démarches de prévention des expulsions.
Il est prévu le maintien des APL pour les locataires de « bonne foi » (le décret sera signé au mois d’avril).
Mais Michel Fréchet ne voit rien de très nouveau toutefois dans les actions proposées… La CGL s’étonne par ailleurs de la mesure concernant le maintien des APL pour les locataires dits de « bonne foi » : dans ce cas, existe-il une définition juridique de ce qu’est un locataire de « mauvaise foi » ? En outre, dans certaines situations cela peut faciliter la tâche du bailleur qui souhaite faire expulser son locataire.
« Le thème des expulsions ne peut pas être extrait du contexte national, où la baisse du pouvoir d’achat est généralisée », conclut Michel Fréchet.
> Décret n° 2016-393 du 31 mars 2016 relatif à la charte pour la prévention de l’expulsion (JORF n°0077 du 1 avril 2016 – texte n° 49)