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Energie

Précarité énergétique : zoom sur 5 millions de foyers en souffrance

Précarité énergétique : zoom sur 5 millions de foyers en souffrance

La précarité énergétique n’est plus une exception. Elle touche aujourd’hui près de 5 millions de ménages en France, selon l’Insee. Cela représente 17,4 % des foyers en métropole. Ces ménages doivent consacrer plus de 9 % de leurs revenus à leurs dépenses d’énergie. Une charge lourde pour simplement chauffer leur logement à un niveau acceptable. Les plus touchés ? Les personnes seules de plus de 60 ans. Elles représentent la moitié des foyers en difficulté. Les zones rurales sont les plus exposées. En cause : des logements mal isolés, souvent anciens, et un recours encore fréquent au fioul. Face à l’urgence sociale et climatique, la lutte contre la précarité énergétique devient un enjeu national.

Sommaire :

La précarité énergétique en France : un phénomène massif touchant les plus vulnérables

Un phénomène qui concerne près de 5 millions de ménages en France

La précarité énergétique représente aujourd’hui un défi majeur pour la société française. Selon les données de l’Insee, 17,4% des ménages en France métropolitaine. Soit 4 815 000 foyers, sont considérés comme énergétiquement vulnérables. En effet, ces ménages consacrent plus de 9,2% de leur revenu disponible aux dépenses énergétiques liées à leur logement. Ce seuil, qui correspond au double de la médiane nationale, reflète une charge financière particulièrement lourde pour maintenir un confort thermique standard.

Les dépenses énergétiques sont estimées à partir des DPE et des prix de l’énergie. Mais, elles ne tiennent pas compte des habitudes des occupants. Seules les caractéristiques du logement sont prises en compte. En effet, il est important de repérer les ménages vulnérables, quelle que soit leur façon de consommer.

La définition de la précarité énergétique utilisée ici diffère de celle de l’Observatoire National de la Précarité Énergétique (ONPE). Pour l’ONPE, il s’agit d’une difficulté immédiate, centrée sur les ménages modestes. La vulnérabilité énergétique, elle, désigne un risque plus large. Celui de devoir réduire son confort thermique pour des raisons budgétaires.

Quels sont les facteurs clés de la précarité énergétique ?

La qualité du logement : un facteur déterminant

La performance énergétique des logements joue un rôle crucial dans la précarité énergétique. L’étude révèle que 71% des ménages vulnérables occupent des logements classés E, F ou G selon le DPE. Soit une proportion presque doublée par rapport à la moyenne nationale. Ainsi, les écarts de besoins énergétiques sont considérables. Puisque les dépenses conventionnelles totales des ménages occupants des logements de catégorie G sont quatre fois plus élevées que celles des logements de catégorie A.

Superficie et dépenses énergétiques conventionnelles annuelles selon les étiquettes DPE en 2021
Superficie et dépenses énergétiques conventionnelles annuelles selon les étiquettes DPE en 2021

D’après l’ONRE, au 1er janvier 2024, une part importante des logements restait énergivore. Le constat est clair : trop de passoires thermiques en France. Une réalité préoccupante, surtout face aux objectifs fixés pour la transition énergétique.

L’isolation est un facteur clé de la performance énergétique d’un logement. Ainsi, en moyenne, un logement mal isolé coûte 2010 euros par an en énergie. Contre seulement 1150 euros pour un logement très bien isolé.

Le mode de chauffage : impact significatif sur les dépenses

Le mode de chauffage utilisé influence fortement les dépenses énergétiques. Le chauffage au fioul coûte bien plus cher. En moyenne, les dépenses atteignent 2910 euros par an. Cela correspond à 1200 euros de plus que pour d’autres sources d’énergie, selon les tarifs de 2021. Même avec une surface, un climat et une isolation équivalents, l’écart reste marqué.

Dans ce contexte, la loi Climat et Résilience de 2021 prévoit l’interdiction progressive des chaudières à fioul et à charbon. Depuis le 1er juillet 2022, il n’est plus possible d’installer de nouvelles chaudières au fioul dans les logements neufs. Et, depuis le 1er janvier 2023, il n’est plus possible de remplacer les chaudières au fioul existantes par d’autres chaudières au fioul.

Les facteurs sociodémographiques : revenus et composition des ménages

La précarité énergétique touche particulièrement les ménages à faibles revenus. En effet, 44,4% des ménages vulnérables sont considérés comme pauvres. Alors que ces derniers ne représentent que 14,6% de l’ensemble des ménages. Inversement, 53% des ménages pauvres sont en situation de précarité énergétique. Le seuil de pauvreté en 2021 était fixé à 1 158 euros par mois, selon les données de l’Insee.

Précarité énergétique - Taux de vulnérabilité, revenus et dépenses énergétiques selon les types de ménages en 2021
Taux de vulnérabilité, revenus et dépenses énergétiques selon les types de ménages en 2021

La composition du ménage pèse lourd dans la précarité énergétique. Les plus touchés ? Les personnes seules de 60 ans ou plus. Elles forment la moitié des ménages vulnérables. Leur revenu moyen est de 1 958 euros par mois, contre 3 400 euros pour l’ensemble des foyers. Et, leurs dépenses énergétiques sont 15 % plus élevées que la moyenne.

Autre population à risque : les familles monoparentales. Leur taux de précarité énergétique atteint 15,2 %. En cause : des revenus plus faibles, autour de 2 830 euros par mois, bien en dessous de ceux des couples.

Les disparités territoriales de la précarité énergétique

Un phénomène plus marqué dans les zones rurales

Le taux de précarité énergétique varie considérablement selon les territoires. Les départements ruraux présentent généralement des taux plus élevés que les zones urbaines. En effet, dans les territoires ruraux non périurbains, le taux atteint 31,7%, contre seulement 13,1% dans les pôles urbains.

Contributions à l'écart du taux de vulnérabilité par rapport à la moyenne nationale selon la densité des territoires en 2021
Contributions à l’écart du taux de vulnérabilité par rapport à la moyenne nationale selon la densité des territoires en 2021

Plusieurs facteurs expliquent cette disparité. Dans les zones rurales, les logements sont souvent individuels, grands et anciens. Ils sont aussi moins bien isolés. De plus, les habitants utilisent plus fréquemment le fioul pour se chauffer. Résultat : des dépenses énergétiques nettement plus élevées.

Comme le soulignent plusieurs études régionales de l’Insee, cette situation est particulièrement préoccupante dans certains territoires. Ainsi, 293 000 ménages normands sont en situation de vulnérabilité énergétique.

L’influence du climat sur les disparités territoriales

Le climat joue un rôle déterminant dans près de la moitié des départements. Les territoires exposés à des hivers rigoureux connaissent logiquement des taux de précarité énergétique plus élevés. À l’inverse, les départements du littoral méditerranéen bénéficient d’un climat plus doux. Ce qui leur permet d’afficher des taux inférieurs de 3 à 9 points à la moyenne nationale.

Dans certains territoires, le climat pèse lourd. C’est le cas des Hautes-Alpes. Malgré des logements mieux isolés et des revenus plus élevés, le département affiche un taux de précarité énergétique 6 points au-dessus de la moyenne nationale. L’impact du froid y reste déterminant.

Les données sont claires : 19 départements concentrent les fragilités. Situés dans le Massif central, les Cévennes, le Grand-Est ou la Bourgogne-Franche-Comté, ils cumulent trois handicaps. Un climat froid. Des logements peu performants. Et, des revenus modestes.
Résultat : la précarité énergétique dépasse souvent les 25 %.

Solutions et perspectives pour réduire la précarité énergétique

Le rôle essentiel de la rénovation énergétique

La rénovation énergétique constitue un levier majeur pour lutter contre la précarité énergétique, particulièrement pour les propriétaires occupants. Parmi les ménages vulnérables, 47% sont propriétaires occupants de logements classés E, F ou G.

Éligibilité des propriétaires de logements occupés par des ménages vulnérables
Éligibilité des propriétaires de logements occupés par des ménages vulnérables

Le dispositif MaPrimeRénov’ propose une prise en charge d’une partie des travaux de rénovation en fonction des ressources des propriétaires. Ainsi, les trois quarts des ménages vulnérables propriétaires occupants de logements classés E, F ou G sont éligibles à une prise en charge de 60% ou plus de leurs travaux. Et, près de la moitié à une prise en charge de 80%.

Entre 2016 et 2021, les aides à la rénovation ont beaucoup évolué. L’État a renforcé les dispositifs en faveur des ménages modestes. Mais, ces efforts restent insuffisants. Il faut encore améliorer l’efficacité et la couverture de ces aides.

Les obstacles à la rénovation énergétique

Malgré les aides existantes, la mise en œuvre des travaux de rénovation se heurte encore à plusieurs obstacles. Pour les ménages à faibles revenus, les restes à charge peuvent demeurer dissuasifs malgré les subventions. Les propriétaires bailleurs hésitent à rénover, car les travaux entraînent souvent une perte temporaire de loyers. Cette baisse de revenus freine leur engagement. La situation est encore plus compliquée pour les locataires, souvent touchés par la précarité énergétique. Ils ne peuvent pas décider des travaux : tout dépend du propriétaire. Or, les aides actuelles n’incitent pas assez les bailleurs à rénover le parc locatif privé.

En conclusion, lutter contre la précarité énergétique demande une action sur plusieurs fronts.
Il faut des politiques de rénovation plus ambitieuses. Des aides financières mieux ciblées. Et, une attention renforcée pour les territoires les plus fragiles. Avec la hausse des prix de l’énergie et les défis écologiques, cet effort devient urgent. C’est autant une priorité sociale qu’un impératif pour la transition écologique.

Isabelle DAHAN

Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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