Les loyers pour les locations intervenues en 2015 sont en baisse partout en France. Ils se situent à 13 €/m² au niveau national (-1,1%), contre 10,9 € en province (-1,3%) et 20,1 € en Île-de-France (-0,8%). En soi, ce serait plutôt une bonne nouvelle. Mais il faut en analyser les causes et les conséquences.
Les loyers des baux en 2015 ont régressé !
Pour la seconde fois depuis qu’il existe, l’indice de référence des loyers au 4e trimestre 2015 affiche une baisse. La diminution est, certes, infime (- 0,01% sur un an), mais le fait est suffisamment rare pour attirer l’attention. Cette évolution n’est pas une surprise, puisque l’augmentation des loyers était en décélération constante depuis le début de 2012. Elle reflète une détente générale des marchés locatifs, détente observée par les professionnels de l’immobilier dans la plupart des grandes agglomérations.
Pourquoi cette baisse ?
Dans certaines villes, où l’offre excède la demande, les gestionnaires sont conduits à recommander une baisse du loyer en cas de relocation pour éviter au bailleur le risque d’une phase de vacance prolongée entre deux occupants. Ces observations montrent que la régulation des marchés ne requiert pas des mesures d’encadrement, dont les effets pervers ont par ailleurs été largement démontrés.
L’encadrement n’est pour l’heure en vigueur qu’à Paris, à titre expérimental et depuis trop peu de temps pour qu’il soit possible d’en apprécier les effets. Il semble qu’il ne soit plus vraiment à l’ordre du jour dans les grandes villes de province, dont les responsables semblent avoir pris conscience de leur inutilité, voire de leur danger.
« L’encadrement des loyers décidé par la loi ALUR et mis en œuvre à Paris depuis le 1er août 2015 n’est pour rien dans cette baisse. Les effets du plafonnement de loyer imposé par la réduction d’impôt Duflot sont limités à deux ou trois dizaines de milliers de logements neufs livrés en 2015. La cause de la baisse du loyer provient, pour l’essentiel, d’une paupérisation globale de la clientèle locative : pour louer son bien, le propriétaire doit ajuster le loyer aux capacités financières du locataire », souligne Jean-François Buet, Président de la FNAIM.
Quels seront les impacts ?
La baisse du loyer entraîne de facto un tassement des rendements. Comparé à l’assurance-vie ou au Livret A (qui profitent d’une fiscalité privilégiée), le rendement locatif brut d’un logement, de l’ordre de 4% à 7%, paraît élevé. Mais il faut en retirer des charges supportées par le propriétaire, en constante augmentation (à l’instar de la taxe foncière) et les impayés, en croissance régulière du fait des difficultés des locataires et de l’allongement des délais de procédure.
Plus que jamais, le principal sujet de préoccupation des bailleurs reste le risque d’impayés. Le nombre de procédures d’expulsion est élevé, il est en augmentation quasi-constante depuis 2005. En 2014, le nombre d’assignations s’élevait à 166.000 et il est à craindre qu’il ait encore augmenté en 2015 avec la poursuite de l’aggravation du chômage.
Si l’expulsion est un drame pour le locataire, elle peut également avoir des conséquences graves pour les bailleurs, en particulier ceux pour qui le loyer constitue un complément de revenu indispensable ou, plus encore, pour les investisseurs qui ont financé leur achat à crédit. La longueur de la procédure d’expulsion, encore augmentée par les dispositions de la loi ALUR, ne fait qu’aggraver les choses, car l’effet des délais supplémentaires est en général de faire croître le montant de l’impayé.
« Une fois net de toutes charges et d’impôts, le rendement servi par l’investissement locatif se réduit comme peau de chagrin. Le petit delta qu’il procure par rapport aux placements financiers les plus courants rémunère-t-il suffisamment les risques pris par le bailleur et, surtout, les contraintes auxquelles il doit faire face ? Rien n’est moins sûr, d’autant que la loi ALUR de 2014 a, une nouvelle fois, accru les obligations pesant sur les propriétaires et pénalisé ceux-ci un peu plus en rallongeant les délais de procédure en cas d’impayés de loyers. Les locataires y trouveront-ils leur compte ? Là encore, rien n’est moins sûr ! », Commente Jean-François Buet.
« La création d’un statut du bailleur privé qui, au lieu de le traiter comme un rentier, reconnaîtrait, notamment par une fiscalité rénovée, son rôle de producteur d’un service, semble aujourd’hui plus que jamais nécessaire », conclut-il.