La crise du logement neuf en France atteint un nouveau sommet. Les chiffres du deuxième trimestre 2024 révèlent une situation alarmante. Les ventes totales plongent de 8,3% par rapport à l’année précédente. Plus préoccupant encore, les mises en vente s’effondrent à 13 953 unités, un record historiquement bas depuis 2010. Or, cette crise du logement neuf résulte d’une combinaison de facteurs : incertitude économique, fin proche du dispositif Pinel, et manque de politique cohérente. Le secteur immobilier tire la sonnette d’alarme. En effet, les professionnels réclament des mesures d’urgence afin de répondre aux besoins pressants des Français en matière d’habitat.
Sommaire :
- La crise du logement neuf s’aggrave : un marché en chute libre
- Les facteurs explicatifs de la crise du logement neuf
- Les conséquences de la crise du logement neuf
- Les pistes pour sortir de la crise du logement neuf
La crise du logement neuf s’aggrave : un marché en chute libre
Des chiffres alarmants au deuxième trimestre 2024
La crise du logement neuf en France atteint des sommets inquiétants. Au deuxième trimestre 2024, les indicateurs sont tous au rouge. Les ventes totales de logements neufs ont chuté de 8,3% par rapport à la même période en 2023, s’établissant à seulement 23 150 unités. Cette baisse significative illustre l’ampleur de la crise que traverse le secteur.
Plus préoccupant encore, les mises en vente s’effondrent. Avec seulement 13 953 nouveaux logements mis sur le marché, le T2 2024 enregistre le niveau le plus bas observé depuis 2010. Cette situation traduit un manque de confiance des promoteurs et des investisseurs dans l’avenir du marché.
Pascal Boulanger, président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI), souligne la gravité de la situation : “ Nous n’avons jamais connu une telle chute des mises en vente. C’est tout l’écosystème de la construction neuve qui est menacé.”
Un déséquilibre croissant entre l’offre et la demande
La crise du logement neuf se manifeste également par un allongement des délais d’écoulement de l’offre commerciale. Au T2 2024, il faut en moyenne 23 mois pour écouler le stock disponible, contre 17,6 mois un an auparavant. Ce chiffre témoigne d’un déséquilibre croissant entre l’offre et la demande sur le marché du neuf.
Les ventes au détail, qui concernent les particuliers, sont particulièrement touchées. Elles accusent une baisse de 22,5% sur un an. Les investisseurs se montrent encore plus frileux, avec une chute de 30% de leurs acquisitions. Même les propriétaires occupants réduisent leurs achats de 18,1%.
Didier Bellier-Ganière, délégué général de la FPI, précise : “ La baisse des ventes aux investisseurs particuliers est particulièrement préoccupante. Ils ne représentent plus que 33% des ventes au détail au T2 2024, contre 37% un an plus tôt.”
Les facteurs explicatifs de la crise du logement neuf
Un contexte économique et politique incertain
La crise du logement neuf s’inscrit dans un contexte économique et politique instable. L’inflation, bien qu’en recul, s’établit à 2,3% en juin 2024 selon l’INSEE. Les taux d’intérêt, malgré une légère baisse récente, demeurent élevés par rapport aux années précédentes. De même, le taux d’intérêt moyen pour un crédit immobilier atteint 3,83% au T2 2024, selon les données de la Banque de France.
Par ailleurs, l’incertitude politique ne favorise pas l’investissement. L’absence d’une politique cohérente et durable en matière de logement dissuade tant les promoteurs que les acheteurs de s’engager sur le long terme.
La fin programmée du dispositif Pinel
Un facteur majeur de la crise du logement neuf est la fin annoncée du dispositif Pinel pour 2025. Cette mesure fiscale, qui incitait les particuliers à investir dans l’immobilier neuf, a longtemps soutenu le marché. Sa disparition progressive entraîne un net recul des ventes aux investisseurs.
Selon les chiffres de la FPI, les ventes à investisseurs ont chuté de 30% au T2 2024 par rapport à la même période en 2023. “La fin du Pinel crée un vide que le marché peine à combler”, analyse Pascal Boulanger.
Des contraintes réglementaires et foncières persistantes
La crise du logement neuf est également alimentée par des contraintes structurelles. Les normes de construction toujours plus exigeantes et la raréfaction du foncier constructible, notamment du fait de l’objectif “zéro artificialisation nette” (ZAN). De fait, elles compliquent et renchérissent la production de logements neufs.
La loi Climat et Résilience du 22 août 2021 fixe l’objectif d’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050. Cette contrainte pèse lourdement sur le secteur de la construction neuve, comme le souligne Didier Bellier-Ganière : “Le ZAN est un défi majeur pour notre secteur. Nous devons repenser entièrement notre façon de construire.”
Les conséquences de la crise du logement neuf
Un impact sur l’ensemble de la filière construction
La crise du logement neuf a des répercussions sur toute la filière construction. Les mises en chantier de logements collectifs, bien qu’en légère hausse (+5,1% au T2 2024), restent à un niveau historiquement bas avec seulement 33 300 unités. Cette situation met en péril de nombreuses entreprises du bâtiment et menace des milliers d’emplois.
Selon les données du ministère de la Transition écologique, les autorisations de logements ont chuté de 12,2% entre le T2 2023 et le T2 2024, s’établissant à 82 400 unités. “ C’est toute la chaîne de valeur de la construction qui est impactée”, alerte Pascal Boulanger.
Une réponse insuffisante aux besoins en logements
La crise du logement neuf aggrave le déficit structurel de logements en France. Alors que les besoins sont estimés à 500 000 nouveaux logements par an, la production actuelle est très largement insuffisante. Cette pénurie alimente la hausse des prix, tant dans le neuf que dans l’ancien, et accentue les difficultés d’accès au logement pour de nombreux ménages.
Le prix moyen des logements collectifs neufs s’établit à 4 978 €/m² au T2 2024, en légère baisse de 1,1% sur un an, mais toujours à un niveau élevé.
“Les prix restent contraints à la hausse par la réglementation, la fiscalité et la rareté des autorisations de construire, malgré la faiblesse de la demande”, explique Didier Bellier-Ganière.
Cette résistance des prix s’explique par plusieurs facteurs. D’abord, les coûts de construction restent élevés, notamment en raison des nouvelles normes environnementales. Ensuite, la rareté du foncier dans les zones tendues maintient une pression à la hausse. Enfin, les promoteurs préfèrent souvent retarder ou annuler des projets plutôt que de les vendre à perte.
Pascal Boulanger de la FPI commente : “ Les prix sont pris en étau entre des coûts incompressibles et une demande qui s’effrite. Cette situation n’est tenable ni pour les promoteurs, ni pour les acquéreurs potentiels.”
Cette rigidité des prix contribue à entretenir la crise du logement neuf, en maintenant les logements hors de portée de nombreux ménages, particulièrement les primo-accédants.
Les pistes pour sortir de la crise du logement neuf
Des mesures de soutien à la demande
Pour enrayer la crise du logement neuf, des mesures de soutien à la demande sont nécessaires. Une réflexion sur un nouveau dispositif fiscal pour remplacer le Pinel est en cours. Par ailleurs, un assouplissement des conditions d’octroi des prêts immobiliers pourrait relancer les ventes aux particuliers.
Le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) a déjà assoupli les règles d’octroi des crédits immobiliers en janvier 2024, en relevant le taux d’effort maximal de 35% à 37%. “ C’est un premier pas, mais il faut aller plus loin”, estime Pascal Boulanger.
Une politique foncière volontariste
La sortie de la crise du logement neuf passe aussi par une politique foncière ambitieuse. La mobilisation de terrains constructibles, notamment par la reconversion de friches industrielles, est essentielle pour relancer la production de logements neufs.
Le fonds friches, mis en place par le gouvernement, a permis de financer la reconversion de nombreux sites. Cependant, son enveloppe de 750 millions d’euros sur 2021-2024 reste insuffisante face à l’ampleur des besoins. “ Il faut amplifier et pérenniser ce dispositif ”, plaide Didier Bellier-Ganière.
Un cadre réglementaire stable et incitatif
Enfin, pour surmonter la crise du logement neuf, les acteurs du secteur appellent à un cadre réglementaire stable et incitatif. Dès lors, une simplification des normes de construction et une visibilité à long terme sur les politiques du logement sont indispensables pour redonner confiance aux investisseurs et aux promoteurs.
La FPI propose notamment une TVA à taux réduit pour l’ensemble de la production de logements neufs, ainsi qu’un allègement des contraintes liées au ZAN.
“Nous avons besoin d’un choc de simplification et d’incitation pour relancer la machine”, conclut Pascal Boulanger.
Face à cette crise du logement neuf sans précédent, l’urgence d’une action coordonnée et ambitieuse se fait sentir. Les prochains mois seront cruciaux pour déterminer si le secteur peut inverser la tendance et répondre aux besoins croissants de logements des Français.