À l’approche des élections municipales, la stabilité fiscale est devenue la règle dans les collectivités locales. Selon une analyse de la Direction générale des finances publiques (DGFIP), plus de 86% des communes françaises ont reconduit en 2025 leur taux de taxe foncière sur les propriétés bâties. Cette tendance concerne également la taxe sur les propriétés non bâties et la taxe d’habitation sur les résidences secondaires. Le choix de maintenir les taux s’explique autant par un souci d’apaisement fiscal que par un contexte électoral sensible. Cet article explore en détail les chiffres, les profils des communes concernées, les stratégies de fiscalité communale, et les implications pour les contribuables. La taxe foncière, impôt local majeur, devient ainsi un indicateur clé de la gestion politique locale en période de transition électorale.
Sommaire :
- Pourquoi une telle stabilité des taux de taxe foncière en 2025 ?
- Quels types de communes ont le plus augmenté leurs taux ?
- Quelle évolution dans les intercommunalités (EPCI) ?
- Quels impacts pour les contribuables en 2025 ?
À retenir – La stabilité des taux de taxe foncière en 2025
- 86% des communes ont maintenu leur taux de taxe foncière bâtie, selon les données de la DGFIP publiées en août 2025.
- Les hausses de taux sont restées modérées, avec 90% des hausses inférieures à 2 points.
- Les communes rurales sont les plus concernées par les augmentations, notamment celles entre 500 et 3 500 habitants.
- Les intercommunalités (EPCI) ont également reconduit leurs taux dans plus de 86 % des cas, avec une politique fiscale similaire à celle des communes.
- La revalorisation des bases locatives est de 1,7% en 2025, ce qui peut entraîner une hausse de taxe même sans changement de taux.
Pourquoi une telle stabilité des taux de taxe foncière en 2025 ?
Un contexte politique incitatif à la stabilité
En 2025, 86,3% des communes françaises reconduisent leur taux de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Cette tendance se confirme également pour les autres impôts locaux :
- 87,3% des communes maintiennent le taux de taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB),
- 85,1% celui de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THS),
- et 90,5% celui de la cotisation foncière des entreprises (CFE).
Ces chiffres, issus de l’étude officielle de la DGFIP publiée en août 2025, illustrent un choix assumé de prudence budgétaire de la part des élus locaux. Cette stratégie s’explique largement par le calendrier politique. En effet, les élections municipales prévues en 2026 incitent les exécutifs locaux à éviter tout mécontentement fiscal. Dans ce contexte électoral, augmenter les taux d’imposition représente un risque politique majeur, susceptible d’alimenter la contestation ou de compromettre les chances de réélection des majorités municipales.
Les grandes villes en première ligne de la stabilité
Les grandes villes, notamment celles de plus de 100 000 habitants, n’ont procédé à aucune hausse du taux de TFPB en 2025. Dans des métropoles où la fiscalité est scrutée de près par les citoyens et les médias, un geste fiscal perçu comme protecteur peut renforcer la légitimité de l’équipe municipale sortante. En parallèle, la taille des collectivités joue un rôle. Parce que les grandes villes bénéficient généralement de ressources fiscales plus diversifiées. Ce qui leur permet de geler les taux sans mettre en péril leur équilibre budgétaire. À l’inverse, les petites communes, plus contraintes financièrement, ont parfois dû ajuster leurs taux.
Une fiscalité d’ajustement plutôt que de rupture
Lorsque les communes augmentent les taux de taxe foncière, elles font preuve d’une retenue manifeste. Selon la DGFIP, 70,3% des hausses de TFPB restent inférieures à 1 point. Par ailleurs, 20% des augmentations se situent entre 1 et 2 points. Enfin, seules 9,7% des hausses dépassent 2 points, ce qui demeure marginal à l’échelle nationale. Ces ajustements ponctuels traduisent davantage une fiscalité d’équilibre qu’une stratégie d’augmentation généralisée. Ils répondent ainsi à des besoins locaux spécifiques, tels que des investissements urgents ou la hausse des charges de fonctionnement.
Ce comportement illustre la volonté des collectivités de trouver un compromis. Elles cherchent à financer les services publics locaux tout en préservant l’acceptabilité fiscale des contribuables. Dans un contexte marqué par une inflation persistante, toute hausse d’impôt local peut, en effet, être perçue comme une injustice sociale. Par ailleurs, les élus savent que la revalorisation automatique des bases locatives décidée par l’État (1,7% en 2025) suffit parfois à augmenter le montant payé par les contribuables, même sans modification des taux. C’est pourquoi de nombreuses communes préfèrent geler leurs taux afin d’éviter un double effet haussier.
Quels types de communes ont le plus augmenté leurs taux ?
Les communes de petite taille sont les plus concernées par les hausses de taux :
- 14,4% des habitants des communes entre 500 et 3 500 habitants ont vu leur taux de TFPB augmenter ;
- Ce pourcentage chute à 2,5% dans les villes entre 50 000 et 100 000 habitants, et à 0% dans celles de plus de 100 000.
Ce constat met en lumière une réalité structurelle. Les petites communes disposent de peu de leviers budgétaires et subissent fortement les évolutions des dotations. Dans ce contexte, l’ajustement des taux d’imposition constitue souvent leur seule marge de manœuvre.
Ainsi, la fiscalité communale en zone rurale reste contrainte par des dépenses fixes, une baisse continue des ressources et l’absence d’alternative crédible à l’impôt local. Face à cette situation, plusieurs maires expliquent devoir arbitrer en permanence entre le financement des investissements de proximité et le maintien d’une stabilité fiscale acceptable pour leurs administrés.
Quelle évolution dans les intercommunalités (EPCI) ?
Des taux largement reconduits
Les intercommunalités (EPCI) montrent une stabilité similaire :
- 86,7% ont reconduit leur taux de TFPB,
- 90,1% pour la TFPNB et la CFE,
- 88,4% pour la THS.
Par rapport à 2024, ces taux sont en progression, illustrant une volonté d’harmonisation de la fiscalité locale entre communes membres.
Des hausses très encadrées
Lorsqu’ils augmentent les taux :
- 79,1% des hausses de TFPB sont inférieures à 1 point ;
- Moins de 5% des hausses intercommunales dépassent 2 points.

Le recours au dispositif de majoration spéciale instauré par l’article 151 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 (loi de finances pour 2024) reste limité. En 2025, seuls 17 EPCI l’ont effectivement utilisé.
Pour rappel, cet article introduit un mécanisme de majoration spéciale qui autorise les collectivités territoriales — communes et EPCI à fiscalité propre — à augmenter spécifiquement le taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires (THS), sans modifier les autres taux de fiscalité locale comme la taxe foncière. Ce dispositif vise à lutter contre la tension foncière dans les zones touristiques et dans les centres urbains attractifs. Il pénalise fiscalement les logements non occupés à l’année et incite ainsi les propriétaires à remettre ces biens sur le marché locatif de longue durée ou en résidence principale.
Cependant, son application reste marginale. Cette faible utilisation s’explique par plusieurs facteurs : des contraintes politiques locales, notamment à l’approche des élections municipales ; un manque de préparation technique ou une mauvaise connaissance du dispositif dans certaines intercommunalités ; et la crainte d’effets négatifs sur le tourisme ou de réactions hostiles des propriétaires non-résidents.
Ainsi, même si ce levier fiscal est désormais disponible, les collectivités l’ont mobilisé de façon marginale. Cela confirme une volonté générale de modération fiscale en 2025.
Quels impacts pour les contribuables en 2025 ?
Un effet mécanique : la revalorisation des bases augmente la taxe même sans hausse de taux
Même en l’absence d’augmentation des taux votés par les communes ou les intercommunalités, les propriétaires constatent parfois une hausse de leur taxe foncière. Cette hausse s’explique par un mécanisme national indépendant des décisions locales : la revalorisation annuelle des bases locatives cadastrales, décidée par l’État.
En 2025, cette revalorisation s’élève à +1,7%, après +3,9% en 2024 et +7,1% en 2023. Ces pourcentages sont appliqués automatiquement à la base d’imposition de chaque bien immobilier, sur laquelle est ensuite calculé le montant de la taxe. Plus la base est élevée, plus le montant de l’impôt augmente, même si le taux reste inchangé.
Ce mécanisme découle de l’article 1518 bis du Code général des impôts, qui prévoit que les valeurs locatives cadastrales sont indexées sur l’inflation (plus précisément, l’indice des prix à la consommation harmonisé). En période de forte inflation comme celle observée entre 2022 et 2024, cette règle a provoqué des hausses d’impôt significatives, sans que les collectivités n’aient à intervenir.
Une fiscalité complexe et souvent mal comprise
Pour de nombreux contribuables, la fiscalité locale apparaît comme opaque et difficile à anticiper. Le fait que la taxe foncière puisse augmenter malgré un taux stable ou identique d’une année sur l’autre peut générer de l’incompréhension voire de la défiance.
Il est donc essentiel que les collectivités locales expliquent de manière pédagogique la différence entre :
- le taux voté, fixé par la commune ou l’EPCI ;
- la base locative, calculée par l’État selon des critères cadastraux et automatiquement revalorisée chaque année.
De plus, la part de taxe intercommunale (liée à l’EPCI) et les éventuelles fiscalités additionnelles (syndicats, taxes spéciales d’équipement) s’ajoutent à la part communale. Le montant final payé par le propriétaire dépend donc de multiples paramètres, dont certains ne sont pas visibles dans la seule délibération municipale.
Un enjeu de transparence et de responsabilité fiscale
Cette dynamique des bases pose un défi en matière de transparence budgétaire. Les élus locaux doivent rendre lisible leur stratégie fiscale. Et, cela, notamment en distinguant ce qui relève de leurs choix politiques (hausse ou maintien des taux) et ce qui est imposé par l’État (revalorisation des bases).
Certains élus préfèrent geler les taux pour neutraliser l’impact de la revalorisation. Tandis que d’autres choisissent de l’assumer en augmentant très légèrement les taux, tout en communiquant sur les raisons budgétaires locales. Dans tous les cas, la pédagogie fiscale est devenue un impératif démocratique, dans un contexte de forte sensibilité des ménages à la pression fiscale.