Après deux années de recul, le marché de l’immobilier ancien montre des signes encourageants en 2024. Selon le bilan du réseau Laforêt, la baisse des taux d’intérêt et l’assouplissement des conditions de crédit ont stimulé la demande et favorisé une reprise des transactions. Toutefois, le marché reste fragile, notamment pour les primo-accédants et les investisseurs, encore freinés par un contexte fiscal incertain et des exigences énergétiques renforcées. Quelles tendances pour 2025 ? Quels sont les défis à relever ? Décryptage d’un secteur en mutation.
Sommaire :
- Un marché en transition : entre baisse des prix et reprise des ventes
- Les intentions d’achat en hausse, mais des freins persistants
- Un marché à deux vitesses selon les régions
- Les défis à venir : primo-accédants, fiscalité et rénovation énergétique
Un marché en transition : entre baisse des prix et reprise des ventes
Le marché de l’immobilier ancien a connu deux années difficiles, marquées par une chute des ventes et une correction des prix. En 2024, une légère embellie se dessine. Selon Laforêt, les volumes de ventes sous compromis ont progressé de 7 %, après des reculs de -4 % en 2022 et -16 % en 2023. Cette amélioration est portée par la baisse des taux d’intérêt, qui sont passés de 4,20 % en 2023 à 3,37 % en décembre 2024.
Les prix, quant à eux, continuent de s’ajuster. À Paris, le prix moyen au mètre carré a chuté à 9 470 €, un niveau inférieur à celui de 2018. En Île-de-France, la baisse est plus marquée avec un recul de -7,9 %. Dans les régions, le ralentissement est plus modéré (-2,2 %).

« Le plus dur semble être passé, mais le marché reste fragile, notamment pour les primo-accédants encore pénalisés par des conditions de financement exigeantes », souligne Yann Jéhanno, Président de Laforêt.
Ce regain d’activité reste toutefois fragile. La capacité de financement des acheteurs n’est pas entièrement rétablie, et l’environnement politique et fiscal crée une incertitude qui freine une reprise plus franche.
Les intentions d’achat en hausse, mais des freins persistants
Les signaux de reprise se confirment avec une augmentation des intentions d’achat de +11 % en 2024. Cette hausse est particulièrement marquée à Paris (+19 %) et en Île-de-France (+7 %). En régions, la demande progresse de 9 % contre seulement 5 % en septembre 2024.

Les secundo-accédants sont aujourd’hui les principaux acteurs du marché de l’immobilier ancien, représentant 53 % des transactions. En revanche, les primo-accédants restent pénalisés par des conditions de crédit exigeantes et un apport personnel souvent insuffisant. De leur côté, les investisseurs se montrent prudents face aux nouvelles réglementations en matière de rénovation énergétique et à une fiscalité jugée dissuasive.
« Sans un élargissement du Prêt à Taux Zéro, de nombreux primo-accédants resteront exclus du marché », estime Yann Jéhanno.
Quant à l’offre de biens disponibles, elle s’accroît de +15 % en un an, avec une reconstitution des stocks en Île-de-France (+19 %) et en régions (+15 %). Seul Paris fait exception, enregistrant un recul des stocks de -8 %, ce qui entretient une certaine tension sur les prix.
Un marché à deux vitesses selon les régions
L’évolution du marché de l’immobilier ancien n’est pas homogène sur l’ensemble du territoire. Alors que certaines villes enregistrent un net recul des prix, d’autres résistent mieux, voire connaissent une stabilisation.
Les grandes métropoles en recul
Dans des villes comme Lyon (-4,4 %), Strasbourg (-4,7 %) et Paris (-3,9 %), la correction des prix se poursuit, conséquence de la hausse des taux d’intérêt et du recentrage des acheteurs vers des biens plus accessibles. L’Île-de-France est la région la plus touchée, avec une baisse moyenne des prix de -7,9 %.
« La pression à la baisse sur les prix s’explique par un ajustement nécessaire après des années de flambée. Aujourd’hui, les acheteurs ont plus de marge de négociation », analyse Yann Jéhanno, président de Laforêt.
Par ailleurs, la demande dans les grandes villes est pénalisée par les nouvelles réglementations sur la rénovation énergétique, qui contraignent les propriétaires de passoires thermiques (logements classés F et G) à engager des travaux coûteux avant de vendre ou louer.
Certaines villes résistent mieux
D’autres marchés résistent mieux à cette tendance baissière. Marseille (-1,9 %), Toulouse (-2,2 %) et Nice (-1,1 %) affichent des baisses modérées, soutenues par une demande toujours élevée. À l’inverse de cette correction générale, certaines zones premium continuent de voir leurs prix progresser. Biarritz (+2,4 %) est l’une des rares villes où la demande excède toujours l’offre, notamment sur le marché des résidences secondaires et des biens de luxe. Ainsi, dans certaines stations balnéaires et villes prisées, la baisse des taux d’intérêt a relancé l’intérêt des acheteurs fortunés, maintenant les prix à des niveaux élevés.
L’offre se reconstitue, sauf à Paris
Si la majorité des villes voient une augmentation des stocks de biens disponibles, Paris fait exception avec une baisse des stocks de -8 %, accentuant encore la pénurie d’offres.
L’offre de biens anciens progresse mécaniquement en raison de l’allongement des délais de vente. Désormais, il faut 97 jours en moyenne pour finaliser une transaction, contre 90 jours en 2023.
Les vendeurs doivent désormais accepter des négociations, qui concernent 90 % des transactions. La marge de négociation atteint 5,9 % en moyenne et grimpe jusqu’à 6,3 % pour les maisons. Certes, le marché devient plus équilibré. Les vendeurs réalisent qu’ils ne peuvent plus fixer des prix excessifs et acceptent des concessions pour concrétiser leur transaction.
Les défis à venir : primo-accédants, fiscalité et rénovation énergétique
Si le marché de l’immobilier ancien montre des signes de redressement, plusieurs freins persistent. Les primo-accédants peinent toujours à accéder à la propriété et les incertitudes fiscales découragent les investisseurs. Enfin, les nouvelles exigences en matière de rénovation énergétique pèsent sur les propriétaires.
Les primo-accédants toujours en difficulté
Malgré une légère baisse des taux d’intérêt, les primo-accédants restent pénalisés par des conditions d’accès au crédit strictes. Ils représentent 31 % des transactions en 2024, un niveau encore faible par rapport aux années précédentes.
Les banques exigent des apports personnels élevés, en raison de la hausse des taux et du durcissement des conditions d’octroi de crédit. Aujourd’hui, un primo-accédant doit en moyenne apporter 20 % du prix du bien, contre 10 % il y a encore cinq ans.
« Le principal frein pour les primo-accédants reste la nécessité d’un apport personnel conséquent. Beaucoup restent sur la touche, faute d’épargne suffisante », analyse Yann Jéhanno, président de Laforêt.
L’élargissement du Prêt à Taux Zéro (PTZ) prévu en 2025 pourrait donner un coup de pouce aux primo-accédants. En effet, le gouvernement envisage d’augmenter le plafond de ressources et d’élargir l’éligibilité aux zones périurbaines. Sans un soutien fort comme le PTZ, il sera difficile pour de nombreux jeunes ménages d’accéder à la propriété.
Une fiscalité incertaine qui freine les investisseurs
L’investissement locatif, qui représentait plus de 25 % du marché il y a quelques années, est en net recul. En 2024, les investisseurs ne pèsent plus que 16 % des transactions.
Le gouvernement pourrait réviser la fiscalité immobilière en 2025, notamment en réintroduisant des incitations pour l’investissement locatif. Mais, l’absence de visibilité freine encore les décisions des acheteurs potentiels. Tant que la fiscalité restera aussi lourde et incertaine, les investisseurs resteront prudents, voire absents du marché.
La rénovation énergétique : une contrainte pour les propriétaires
L’un des enjeux majeurs du marché de l’immobilier ancien concerne la rénovation énergétique des logements. Dès janvier 2025, les logements classés G seront considérés comme indécents et interdits à la location.
Cette nouvelle réglementation contraint des milliers de propriétaires bailleurs à réaliser des travaux coûteux pour rester sur le marché locatif. Or, les aides financières sont jugées insuffisantes et les délais de réalisation souvent longs. En effet, rénover un logement classé G peut coûter entre 15 000 et 50 000 €, selon l’ampleur des travaux. Beaucoup de propriétaires préfèrent vendre plutôt que d’investir dans des rénovations coûteuses.
Face à ces contraintes, les logements mal classés se vendent avec une décote de 10 à 20 % par rapport aux autres biens. Cela crée une opportunité pour les acquéreurs prêts à entreprendre des rénovations, mais freine les ventes dans certaines zones.
Le marché de l’immobilier ancien en 2025 restera dépendant de l’évolution des taux d’intérêt et des réformes gouvernementales. La stabilisation du marché passera par un assouplissement des conditions de crédit et des incitations fiscales adaptées aux investisseurs et primo-accédants.
« Les prochains mois seront décisifs : la politique du logement et l’évolution des taux joueront un rôle clé dans la dynamique du marché immobilier », conclut Yann Jéhanno.