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Copropriété

Prêt copropriété rénovation : quelles garanties et conditions en 2025 ?

Prêt copropriété rénovation : quelles garanties et conditions en 2025 ?

Le décret n°2025-711, publié au Journal officiel du 27 juillet 2025, concrétise les dispositions de la loi du 9 avril 2024 dite “Loi habitat dégradé” en encadrant les conditions du prêt copropriété rénovation. Ce texte réglementaire, très attendu par les syndics, copropriétaires et professionnels du logement, fixe à la fois la durée maximale des prêts collectifs et les modalités d’intervention du Fonds de garantie pour la rénovation (FGR). Derrière les termes techniques, une problématique centrale : comment financer efficacement la réhabilitation des copropriétés fragiles sans faire peser un risque de solvabilité excessif sur les prêteurs ? Cet article décrypte les nouvelles garanties offertes, les conditions d’octroi du crédit, et les implications concrètes pour les syndicats des copropriétaires concernés.


Sommaire :


À retenir – Les nouvelles garanties des prêts copropriété rénovation

  • Le décret du 25 juillet 2025 permet aux copropriétés de financer leurs travaux sur une durée maximale de 300 mois.
  • Le Fonds de Garantie pour la Rénovation couvre jusqu’à 80% des pertes pour certaines copropriétés dégradées.
  • Les copropriétés modestes ou invisibles sont désormais incluses dans le dispositif.
  • Une séquence précise est imposée pour constater une défaillance d’un copropriétaire.
  • Taux d’intérêt, pénalités et accès au prêt restent à la discrétion des établissements prêteurs.

Quels changements pour le prêt copropriété rénovation ?

Une durée étendue à 25 ans pour financer les travaux

Le gouvernement encadre désormais le prêt copropriété rénovation en appliquant la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 grâce au décret n° 2025-711 du 25 juillet 2025. Ainsi, il fixe une durée maximale de 300 mois (25 ans), comme le précise l’article R. 732-1 du Code de la construction et de l’habitation.

Cette mesure permet aux syndicats des copropriétaires d’étaler les remboursements sur le long terme et de financer plus facilement des travaux d’intérêt collectif tels que l’isolation thermique, la réfection des toitures ou la rénovation des colonnes techniques. En lissant le coût sur 25 ans, l’État répond aux contraintes économiques des immeubles anciens situés dans des zones urbaines denses. Il soutient ainsi les ménages modestes tout en favorisant une transition énergétique durable et la lutte contre l’habitat indigne.

Des obligations documentaires renforcées

Selon le décret du 6 juin 2025, le syndic doit transmettre au prêteur un ensemble exhaustif de documents, incluant :

  • Le règlement de copropriété, les procès-verbaux d’assemblée générale, les contrats d’assurance en cours ;
  • Les données financières comme les dettes fournisseurs, les charges de copropriété impayées, et les soldes des comptes bancaires du syndicat ;
  • Le programme détaillé des travaux validé par l’assemblée générale, les devis chiffrés fournis par les entreprises retenues, et un plan de financement prévisionnel clair indiquant la répartition des quotes-parts ;
  • Les coordonnées complètes des copropriétaires (nom, prénom, date et lieu de naissance pour les personnes physiques) ;
  • Les tableaux d’amortissement des prêts collectifs sécurisés déjà en cours pour éviter le surendettement du syndicat.

Cette exigence documentaire a pour but de renforcer la transparence et la solvabilité des projets, conditions sine qua non à l’éligibilité au financement bancaire.

Comment fonctionne la garantie du FGR pour les copropriétés ?

Une contre-garantie publique jusqu’à 80% pour certaines opérations

Le décret du 25 juillet 2025 introduit un mécanisme de contre-garantie par le Fonds de Garantie pour la Rénovation (FGR). Ce dispositif vise à encourager les établissements financiers à prêter sans crainte de défaillance de remboursement, tout en assurant une forme de tiers-financement public.

Selon l’article R. 312-7-7 :

  • Le FGR couvre jusqu’à 80% des pertes pour les opérations situées dans un plan de sauvegarde, une OPAH de redressement ou une ORCOD (opération de requalification des copropriétés dégradées).
  • Il couvre jusqu’à 50% des pertes si les travaux permettent une réduction de 25% minimum de la consommation conventionnelle d’énergie primaire du bâtiment, ou relèvent d’un audit énergétique.

Notons que ce mécanisme allège significativement le risque de défaut pour les banques. À cet effet, il constitue un levier de confiance pour ouvrir l’accès au prêt copropriété rénovation. Et, cela, notamment pour les copropriétés en précarité énergétique ou confrontées à des charges lourdes.

Garanties du Fonds de Garantie pour la Rénovation (FGR) - Prêt copropriété rénovation
Garanties du Fonds de Garantie pour la Rénovation (FGR)

Quelle protection juridique pour les syndics en cas d’impayé ?

Le décret encadre rigoureusement la procédure en cas d’impayé, notamment pour les contributions au remboursement d’un prêt collectif sécurisé. Il impose une séquence réglementée en trois étapes :

  • l’envoi d’une lettre de relance dans les 30 jours suivant la date d’exigibilité de l’échéance,
  • une mise en demeure envoyée 60 jours après cette relance,
  • puis, en l’absence de paiement, la constatation de la défaillance du copropriétaire 30 jours plus tard.

Cette procédure, prévue à l’article 38 du décret du 17 mars 1967 modifié, protège juridiquement le syndic. Elle permet de justifier toute action de recouvrement, y compris devant un juge, en cas d’inertie ou d’opposition d’un copropriétaire. Ce cadre est essentiel pour maintenir la solvabilité globale de la copropriété et rassurer les banques sur la capacité du syndicat à honorer ses engagements. Il favorise aussi l’activation des mécanismes de caution bancaire en cas de sinistre ou d’incident de remboursement collectif.

Délais pour constat de défaillance d’un copropriétaire
Délais pour constat de défaillance d’un copropriétaire

Quelles copropriétés peuvent réellement accéder à ces prêts ?

Un ciblage sur les territoires les plus dégradés

Le dispositif s’adresse en priorité aux copropriétés fragiles, identifiées dans :

  • 17 territoires en suivi national définis par l’ANCT ;
  • Plus de 160 sites en suivi régional, accompagnés par les DREAL ;
  • 217 opérations programmées dans le cadre des Plans de sauvegarde, OPAH ou ORCOD.

Ces zones cumulent des problématiques de vacance, de décence non respectée, de charges impayées ou d’immeubles insalubres. Le prêt copropriété rénovation, soutenu par la garantie du FGR, devient ici un instrument de redressement immobilier structurant.

Petites copropriétés : les grandes oubliées désormais intégrées

Longtemps invisibilisées, les petites copropriétés – parfois de moins de 10 lots – sont maintenant éligibles. Ce changement permet une meilleure équité territoriale et évite l’effet tunnel où seuls les grands ensembles urbains bénéficiaient d’aides ciblées.

Des besoins de financement massifs

D’après les chiffres de la Banque de la rénovation, il faudrait mobiliser 96 milliards d’euros par an jusqu’en 2030 pour atteindre les objectifs du Plan d’Investissement Climat. Cela représente 1,5 million de logements à rénover, dont une part importante en copropriété.

Quelles sont les zones d’ombre et d’incertitudes restantes ?

Un taux d’intérêt non encadré

Le décret ne fixe aucun taux plafond. Chaque banque ou société de financement peut alors déterminer librement ses conditions. Ce qui engendre une variabilité tarifaire significative. En outre, ce flou pourrait poser un problème dans les copropriétés composées de ménages modestes, peu familiers avec les dispositifs de crédit collectif.

Conditions de remboursement anticipé : flou juridique

Le texte ne précise pas les conditions d’un remboursement anticipé, ni l’éventuelle application de pénalités. Cela peut fragiliser les syndicats qui souhaiteraient réajuster leur stratégie de financement en cas de revente ou d’aides nouvelles.

Consultation du FICP : un enjeu d’inclusion

La consultation du fichier FICP (Fichier des incidents de remboursement) est laissée à l’appréciation des prêteurs. Or, cela pose une question d’inclusion. Car, une copropriété pourrait se voir refuser un prêt du fait d’un seul copropriétaire fiché. Ce qui remettrait alors en cause le principe de solidarité collective du financement.

Conclusion

En consolidant les règles du prêt copropriété rénovation, l’État amorce une transformation structurelle du financement de la rénovation dans l’habitat collectif. Grâce à des outils comme le Fonds de Garantie pour la Rénovation, à l’encadrement des prêts sur 25 ans et à la sécurisation juridique du recouvrement, les copropriétés fragiles disposent désormais de leviers concrets pour engager leur transition énergétique.

Cependant, certaines incertitudes demeurent : liberté totale des taux d’intérêt, conditions bancaires variables, ou encore disparités d’accès selon le profil des copropriétaires. Pour que ce dispositif tienne ses promesses, il faudra garantir une application équitable sur l’ensemble du territoire, y compris pour les petites copropriétés souvent en marge des politiques publiques.

Le prêt collectif sécurisé, s’il est bien encadré et accompagné, pourrait devenir un pilier essentiel de la réhabilitation de l’habitat ancien en France. Il reste maintenant à surveiller son appropriation concrète par les syndics, les banques… et les copropriétaires eux-mêmes.

Isabelle DAHAN

Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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