Les infiltrations en copropriété sont une source fréquente de litiges. Qui doit prendre en charge les réparations ? Un récent arrêt de la Cour d’appel de Paris (RG n° 23-14.917) rendu le 13 décembre 2024 tranche une affaire opposant deux copropriétaires à propos de l’étanchéité d’une terrasse. L’un d’eux accusait son voisin d’avoir fragilisé un acrotère en modifiant plusieurs fois un garde-corps, causant des infiltrations. Mais, la justice a-t-elle retenu sa responsabilité ? Cette décision met en lumière les règles qui encadrent l’entretien des parties communes et la répartition des obligations entre copropriétaires.
Sommaire :
- Comprendre le litige sur les infiltrations en copropriété
- Parties communes ou privatives : qui doit payer ?
- Quelle jurisprudence sur les infiltrations en copropriété ?
- Les recours possibles pour les copropriétaires
Comprendre le litige sur les infiltrations en copropriété
L’affaire jugée par la Cour d’appel de Paris (RG n° 23-14.917, arrêt du 13 décembre 2024) concerne un différend entre deux copropriétaires. M. et Mme [Z], propriétaires d’une maison de ville accolée à un immeuble en copropriété, subissent des infiltrations d’eau depuis 2019. Ils estiment que ces infiltrations proviennent de la terrasse de leur voisin, M. [M], qui aurait modifié à plusieurs reprises son garde-corps, fragilisant ainsi l’acrotère.
Face à ces problèmes récurrents, une expertise judiciaire a été ordonnée en 2019. Le rapport, rendu en 2021, a mis en évidence des défauts d’exécution des travaux réalisés par M. [M]. Mais, un nouveau problème est apparu après la publication du rapport. En effet, il s’agit d’infiltrations supplémentaires, que M. et Mme [Z] attribuent cette fois à un défaut d’étanchéité de l’acrotère.
Estimant que leur voisin était responsable, M. et Mme [Z] ont donc demandé au tribunal de contraindre M. [M] à réaliser des travaux de reprise d’étanchéité sous astreinte. En première instance, leur demande a été rejetée, et ils ont donc fait appel.
Parties communes ou privatives : qui doit payer ?
Définition des parties communes et privatives
La clé du litige repose sur la nature de l’acrotère. Selon le règlement de copropriété examiné par la Cour d’appel, les parties communes incluent :
- Les ornements de façade
- Le socle des balcons
- Les murs extérieurs
En revanche, les garde-corps et les volets sont des parties privatives.
L’acrotère est une partie commune
Un acrotère est un petit muret situé en bordure d’une toiture-terrasse. Il prolonge le mur de façade au-dessus du niveau du toit et sert principalement à plusieurs fonctions :
- Protection de l’étanchéité. Il permet de fixer les relevés d’étanchéité et d’éviter les infiltrations d’eau.
- Sécurité. Il peut servir de support à un garde-corps pour éviter les chutes.
- Esthétique et technique. Il masque les équipements techniques situés sur la toiture (ventilation, panneaux solaires, etc.).
En copropriété, l’acrotère est généralement une partie commune. Cela signifie que son entretien et sa réparation relèvent du syndicat des copropriétaires et non d’un seul copropriétaire.
La Cour d’appel a donc conclu que M. [M] ne pouvait être tenu responsable des infiltrations liées à un défaut d’étanchéité de l’acrotère. Seul le syndicat des copropriétaires pouvait décider et financer les travaux nécessaires.
Quelle jurisprudence sur les infiltrations en copropriété ?
Déjà en 2020, la Cour de cassation (3e chambre civile, 9 juillet 2020, n° 19-13.720) avait affirmé qu’un copropriétaire n’est pas responsable des désordres affectant une partie commune.
Les obligations du syndicat des copropriétaires
En application de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires est responsable des dommages causés par un défaut d’entretien des parties communes. Cela inclut les infiltrations en copropriété si elles proviennent d’un élément collectif.
Qu’en est-il des travaux réalisés par un copropriétaire ?
Toutefois, si un copropriétaire réalise des travaux impactant une partie commune sans autorisation et en cause des dommages, il engage sa responsabilité. Dans cette affaire, la justice n’a pas retenu cette hypothèse, car l’acrotère était déjà défectueux avant les interventions de M. [M].
Les recours possibles pour les copropriétaires
Dans un cas similaire, le premier réflexe est de signaler le problème au syndic et de demander une intervention en assemblée générale. Un vote peut être organisé pour engager des travaux sur les parties communes.
Toutefois, si le syndicat des copropriétaires refuse d’agir malgré l’évidence des infiltrations, les copropriétaires lésés peuvent saisir le tribunal judiciaire. Le juge peut alors ordonner la réalisation des travaux aux frais de la copropriété.
En cas de doute sur l’origine des infiltrations, une expertise peut être demandée pour prouver que le problème vient bien d’une partie commune. Ce rapport pourra être utilisé en justice pour forcer la copropriété à intervenir.
Conclusion
Les infiltrations en copropriété peuvent rapidement devenir un casse-tête juridique. L’affaire jugée par la Cour d’appel de Paris rappelle un principe essentiel. Lorsqu’un défaut d’étanchéité provient d’une partie commune, c’est au syndicat des copropriétaires d’en assurer la réparation. Un copropriétaire ne peut être tenu pour responsable à moins d’avoir directement causé le désordre par des travaux non autorisés. En cas de litige, la meilleure solution reste la négociation et, si nécessaire, la saisine du tribunal.