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Voisinage

Nuisances locatives : quelles solutions pour les copropriétés ?

Nuisances locatives : quelles solutions pour les copropriétés ?

Les nuisances locatives représentent un défi majeur pour de nombreuses copropriétés. Bruits incessants, déchets abandonnés ou nuisances olfactives : ces comportements troublent la vie collective et mettent à l’épreuve la patience des résidents. Pourtant, des recours existent, qu’ils soient amiables ou judiciaires, pour agir directement contre les locataires responsables de ces troubles. Mais, quelles démarches sont réellement efficaces pour restaurer la sérénité dans une copropriété ? Cet article explore les solutions pratiques et juridiques pour répondre à cette problématique.

Sommaire :

Comprendre les nuisances locatives et leurs impacts

Les nuisances locatives constituent un problème récurrent dans de nombreuses copropriétés, affectant la qualité de vie des résidents et le bon fonctionnement de la collectivité. Ces nuisances peuvent être divisées en trois grandes catégories :

  • Nuisances sonores : fêtes tardives, bruits d’appareils ou aboiements d’animaux. Selon l’article R1336-5 du Code de la santé publique, tout bruit de nature à porter atteinte à la tranquillité publique est interdit, de jour comme de nuit.
  • Nuisances olfactives : émanations désagréables provenant d’activités commerciales ou d’une mauvaise hygiène.
  • Nuisances visuelles : encombrement des parties communes avec des objets ou des déchets.

Ces comportements ne perturbent que la tranquillité des habitants. En effet, ils peuvent aussi générer des tensions entre copropriétaires et locataires et des conflits de voisinage en copropriété. D’autant plus qu’un obstacle courant pour les syndicats de copropriété est l’absence de lien contractuel avec le locataire. Puisque ce dernier n’est tenu qu’aux obligations mentionnées dans son bail. Cependant, plusieurs recours existent pour traiter efficacement ces problèmes.

Comprendre les nuisances locatives et leurs impacts

Les recours amiables pour résoudre les nuisances locatives

Avant d’engager des actions judiciaires, il est conseillé d’explorer les solutions amiables. Ces démarches sont souvent moins coûteuses et peuvent éviter une escalade du conflit.

Communication directe avec le locataire

Une discussion simple et courtoise peut suffire à résoudre le problème. Le locataire n’est parfois pas conscient de l’impact de ses actions. Cette étape favorise une résolution rapide et sans formalités. Cependant, si cette méthode échoue ou si le locataire refuse de coopérer, des démarches plus formelles sont nécessaires.

Mise en demeure par courrier recommandé

Une mise en demeure est une lettre officielle dans laquelle le syndic ou le propriétaire bailleur exige du locataire qu’il cesse immédiatement les nuisances. Ce courrier doit rappeler les règles du règlement de copropriété ainsi que les articles de loi applicables. Cette étape est importante, car elle constitue une preuve en cas de recours ultérieur en justice.

Demande d’intervention auprès des autorités locales

Pour les nuisances particulièrement graves (tapage nocturne, activités illégales), les copropriétaires peuvent contacter la mairie ou déposer une plainte auprès des services de police. Par exemple, le maire peut intervenir en tant que médiateur ou ordonner des actions correctives dans les cas liés à des activités commerciales.

Saisir un conciliateur de justice

Le conciliateur de justice est une solution gratuite et accessible pour régler les conflits. Il agit comme médiateur entre le locataire et les parties plaignantes, cherchant un compromis qui satisfait tout le monde. Bien que ces démarches soient efficaces dans de nombreux cas, elles ne garantissent pas toujours une résolution durable. En cas d’échec, il est souvent nécessaire de passer à des actions judiciaires.

Les voies judiciaires contre les locataires nuisibles

Lorsque les recours amiables échouent, les copropriétés peuvent se tourner vers des démarches judiciaires pour résoudre les problèmes liés aux nuisances locatives. Plusieurs options s’offrent à elles, en fonction de la gravité et de la persistance des troubles.

L’action en responsabilité délictuelle (article 1240 du Code civil)

L’article 1240 du Code civil dispose que «tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer». Sur cette base, le syndicat des copropriétaires peut engager une procédure contre le locataire, même en l’absence de lien contractuel direct.

Cette action permet d’obtenir des réparations financières ou des mesures contraignantes, telles que :

  • L’arrêt immédiat des troubles, sous peine d’une astreinte journalière (par exemple, 200 € par jour).
  • Le versement de dommages et intérêts pour compenser le préjudice subi par les copropriétaires.

Pour maximiser les chances de succès, il est essentiel de constituer un dossier solide avec des preuves : constats répétés d’un commissaire de justice, témoignages écrits ou rapports de police. Cette démarche peut néanmoins être limitée par l’insolvabilité éventuelle du locataire.

La procédure de référé

En parallèle ou en complément, le syndicat des copropriétaires peut engager une procédure de référé, qui permet d’obtenir une décision judiciaire rapide ordonnant l’arrêt des nuisances ou imposant des sanctions financières. Contrairement à d’autres actions judiciaires, cette procédure ne nécessite pas l’habilitation préalable du syndic par l’assemblée générale des copropriétaires, conformément à l’article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967.

Cependant, cette solution a ses limites :

  • Elle peut être coûteuse en raison des frais liés aux constats d’huissier multiples et aux honoraires d’avocat.
  • La procédure peut être prolongée par des contestations ou appels.
  • Elle reste inefficace si le locataire est insolvable, rendant l’astreinte financière inapplicable.

De plus, après une première décision, il peut être nécessaire de saisir un «juge de l’exécution» pour faire liquider l’astreinte ou obtenir une nouvelle évaluation des sommes dues.

Responsabilité du bailleur

Le propriétaire bailleur est tenu de garantir que son locataire respecte les règles de la copropriété. À cet effet, il doit veiller à ce que celui-ci n’entraîne pas de troubles de voisinage ou de dégradations affectant la tranquillité des autres occupants. Si le bailleur, après avoir été informé des nuisances, ne prend aucune mesure pour y remédier, il peut être tenu pour responsable au regard de la copropriété.

L’article 1728 du Code civil rappelle que le locataire doit «?user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail?». Cela inclut l’obligation de ne pas générer de troubles anormaux de voisinage.

En cas de carence du bailleur, le syndicat des copropriétaires ou les copropriétaires affectés peuvent engager une action judiciaire contre celui-ci. Cette responsabilité repose notamment sur :

  • L’obligation de faire respecter le règlement de copropriété. Le propriétaire bailleur doit informer son locataire des règles en vigueur dans l’immeuble et s’assurer qu’il les respecte. Cette obligation est prévue par l’article 3 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989. En effet, ce texte impose au bailleur de communiquer au locataire les extraits du règlement de copropriété relatifs à la jouissance des parties privatives et communes.
  • Le devoir d’intervention rapide. Dès qu’il est informé des nuisances, le bailleur doit agir au plus vite. Par exemple en adressant des mises en demeure à son locataire ou, si nécessaire, en entamant une procédure de résiliation du bail.

Les conséquences d’une inaction du bailleur

Toutefois, si le propriétaire reste inactif face aux nuisances signalées, il s’expose à des poursuites. Le syndicat des copropriétaires peut engager une action contre lui sur le fondement de l’article 1240 du Code civil, en invoquant sa responsabilité délictuelle. Cette démarche peut également reposer sur un manquement à ses obligations en tant que bailleur.

Les recours en cas de préjudice subi par la copropriété

Dans ce cadre, le syndicat peut demander une indemnisation pour les troubles causés à la copropriété. Par ailleurs, un copropriétaire directement affecté par les nuisances peut aussi, à titre individuel, réclamer une réparation du préjudice subi.

Quand la résiliation du bail devient nécessaire

Dans les cas les plus graves, notamment lorsque les nuisances persistent malgré plusieurs démarches, la résiliation du bail est une solution radicale, mais efficace.

L’action oblique : une solution juridique clé

Lorsque le propriétaire bailleur refuse ou néglige d’agir, le syndicat des copropriétaires peut se substituer à lui en invoquant l’article 1341-1 du Code civil. Ce mécanisme, appelé «action oblique», permet au syndicat d’engager une procédure en résiliation du bail. Cette démarche est particulièrement utile en cas de nuisances graves, comme des activités commerciales illégales.

Les démarches judiciaires diffèrent selon la nature du bail. Pour un bail d’habitation, les copropriétés doivent saisir le juge des contentieux de la protection. Ce dernier examine si le locataire a manqué à ses obligations contractuelles ou légales. Dans le cas d’un bail commercial, les nuisances découlant de l’activité exercée par le locataire nécessitent de porter l’affaire devant le tribunal judiciaire. Ce tribunal est compétent pour évaluer si les nuisances excèdent les inconvénients normaux de voisinage.

Dans toutes ces situations, l’accord préalable de l’assemblée générale des copropriétaires est indispensable avant de lancer une telle action. Toutefois, en cas d’urgence, une procédure en référé peut être engagée sans cette autorisation. Mais, cette voie reste risquée. Car, le locataire peut opposer au syndicat une «contestation sérieuse». Par exemple, il peut invoquer un défaut de travaux d’isolation phonique imputable au bailleur. Et, cela pourrait entraîner le rejet de la demande de résiliation judiciaire du bail. Enfin, lorsque le syndic doit être habilité par l’assemblée générale pour agir en justice (article 55 du décret n°67-223 du 17 mars 1967), l’obtention de cette autorisation peut s’avérer complexe, notamment en cas de désaccord entre les copropriétaires.

Tableau récapitulatif des recours en cas de nuisances locatives

Conclusion

Les nuisances locatives sont un défi récurrent pour les copropriétés, mais des solutions existent pour y faire face : recours amiables, actions judiciaires et résiliation de bail. Chaque démarche doit être adaptée à la gravité des troubles, et une préparation minutieuse est essentielle pour garantir le succès des procédures. Grâce à ces outils, il est possible de préserver la tranquillité et l’harmonie dans les immeubles collectifs.

Isabelle DAHAN

Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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