La loi Duflot sur le logement social adoptée le 18 décembre a intégré une procédure de réquisition qui vise les seules sociétés propriétaires d’immeubles de logements vides. Ainsi, cent vingt-quatre adresses de bâtiments vacants en IDF sont susceptibles d’être réquisitionnés.
Rappelons que la réquisition est un acte par lequel l’autorité administrative impose à un propriétaire de louer son logement vide depuis plus de dix-huit mois, situé dans les communes où existent d’importants déséquilibres entre l’offre et la demande de logements. Ce transfert d’usage du bien immobilier, moyennant une indemnité réglementaire mensuelle en guise de loyer, est justifié par une situation d’urgence dans le secteur du logement. Cette indemnité est déterminée en fonction d’un prix de base au mètre carré, qui se situe à un niveau légèrement inférieur aux loyers « logement social ».
A compter du 1er janvier 2013, le prix de base mensuel au mètre carré de surface habitable utilisé pour calculer le loyer d’un logement réquisitionné en application de l’article L. 642-1 est établi comme suit :
- 5,96 EUR/m² à Paris et dans les communes limitrophes de Paris ;
- 5,10 EUR/m² dans le reste de l’agglomération parisienne ;
- 4,25 EUR/m² sur le reste du territoire.
Le gouvernement a choisi d’appliquer la procédure de réquisition de 1998 au lieu de l’ordonnance du 11 octobre 1945 qui a déjà été employée par Jacques Chirac en 1995 et 1996. En deux ans, 1.011 logements avaient été réquisitionnés, dont 811 à Paris intra-muros. La procédure, dite de « réquisition avec attributaire », est elle aussi placée sous l’autorité du préfet. Instituée par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, elle prévoit qu’un « attributaire » joue le rôle d’intermédiaire entre le propriétaire des locaux réquisitionnés et les bénéficiaires qui y sont logés. Elle a été employée en 2001. L’ attributaire, peut-être l’Etat lui-même, une collectivité territoriale, un organisme HLM, une société d’économie mixte ayant pour objet de construire ou de donner à bail des logements, et les organismes et associations agréés contribuant au logement des personnes défavorisées.
L’association Droit Au Logement (DAL) réclame l’application immédiate de la loi de réquisition de 1945. « Cette dernière est beaucoup plus facile à mettre en œuvre. Elle est plus directe et limite les recours des propriétaires. Un amendement avait été présenté à l’Assemblée par André Chassaigne pour lever les obstacles à la mise en œuvre de la procédure de réquisition avec attributaire, mais il a été supprimé dans la loi Duflot », indique Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du DAL.
Le préfet de région, Daniel Canepa, a identifié 124 adresses de bâtiments vacants susceptibles d’être réquisitionnés en Ile de France soit 80 adresses hors Paris et 44 à Paris (représentant 30 propriétaires, personnes morales). Mais il a aussi précisé que la totalité des locaux ne serait pas réquisitionnée, car certains des bâtiments risquent de nécessiter trop de travaux pour les mettre aux normes de sécurité.
Un logement vacant peut être réquisitionné pour une durée d’un an au minimum, à six ans au maximum. Lorsque des travaux importants de mise en état sont nécessaires et pris en charge par l’attributaire, cette durée d’occupation peut s’étendre jusqu’à douze ans.
Selon les cas, il faut donc compter trois à quatre mois entre la notification de l’intention de réquisitionner et l’arrêté de réquisition, qui permet qu’un logement soit mis à disposition des autorités publiques.
La procédure comporte quatre étapes :
- identification des locaux : des agents assermentés nommés par le préfet de département effectuent les vérifications pour repérer les immeubles de logements vacants depuis au moins 18 mois et identifier leur propriétaire ;
- notification de l’intention de réquisitionner : après avoir sollicité l’avis du maire, le préfet de département adresse au propriétaire une lettre recommandée avec avis de réception dans laquelle il lui exprime son intention de procéder à la réquisition de son bien. Cette notification est accompagnée d’une demande de visite sur place, qui a pour but de vérifier la vacance des lieux et estimer le coût de travaux éventuels (mise aux normes de confort et d’habitabilité) ;
- réponse du propriétaire : le propriétaire dispose de deux mois pour répondre. Pour éviter la réquisition, ou bien il s’engage à mettre fin à la vacance de son bien sous trois mois, ou bien il s’engage à effectuer les travaux nécessaires à la location. Dans ce cas un échéancier est soumis à l’approbation du préfet.
- décision du préfet : au plus tard 4 mois après envoi de la notification, selon les éléments fournis par le propriétaire, le préfet arrête la procédure ou procède à la réquisition. Celle-ci prend la forme d’un arrêté de réquisition, envoyé à la personne morale et affiché sur les lieux, qui indique l’attributaire et la durée de la réquisition.
Les personnes qui pourront bénéficier d’un logement réquisitionné sont des familles modestes, qui justifient de ressources inférieures à 60% du plafond de ressources exigé pour l’attribution d’un logement d’habitation à loyer modéré.
Les premières procédures de réquisition ont été lancées. Les premiers logements réquisitionnés pourraient être disponibles vers le mois de mars prochain. « Ces logements viendront compléter les possibilités de relogement que les préfets proposeront, à la fin de l’hiver, aux personnes et aux familles hébergées, dans le cadre des plans de sortie du dispositif hivernal », a précisé Cécile Duflot, ministre de l’Égalité des territoires et du Logement.
Arrêté du 14 décembre 2012 pris pour l’application de l’article R. 642-12 du code de la construction et de l’habitation relatif à la fixation des prix de base des loyers des locaux réquisitionnés avec attributaire (JORF n°0302 du 28 décembre 2012 page 20648 – texte n° 33)
Source : www.territoires.gouv.fr