Même non convoqués, les copropriétaires ont 2 mois pour contester les décisions de l’assemblée générale.
La Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence et considère que les copropriétaires qui n’ont pas été convoqués à l’assemblée générale disposent de 2 mois à compter de la notification des décisions adoptées pour les contester.
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 14 janvier 2004), rendu sur renvoi après cassation (Civ. 3, 19 février 2002, pourvoi n° 00-21.101), que les époux X…, propriétaires d’un appartement dans la résidence « Parc des Thibaudières », ont assigné le Syndicat coopératif Les Thibaudières aux fins notamment de voir prononcer la nullité de certaines résolutions décidées par l’assemblée générale des copropriétaires du 24 mars 1995 ;
Attendu que les époux X… font grief à l’arrêt de les déclarer irrecevables, alors, selon le moyen :
1°/ que si les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions, la forclusion n’est pas opposable aux copropriétaires qui n’ont pas été régulièrement convoqués à l’assemblée ; que dans leurs conclusions d’appel, les époux X… faisaient précisément valoir « que le Tribunal, la cour d’appel de Paris et la Cour de Cassation ont tous constaté que M. et Mme X… avaient été irrégulièrement convoqués puisque le syndicat ne leur avait pas notifié leur convocation « au moins quinze jours avant la date de la réunion » comme prescrit au 2e alinéa de l’article 9 du décret du 17 mars 1967″ et que « la forclusion n’est pas opposable aux copropriétaires qui ont été irrégulièrement convoqués », si bien que « la demande de M. et Mme X… de voir prononcer la nullité de certaines résolutions de l’assemblée générale du 24 mars 1995 est parfaitement recevable » ; que pour déclarer M. et Mme X… irrecevables en leur contestation des résolutions de l’assemblée générale du 24 mars 1995 en raison de la forclusion, la cour d’appel s’est bornée à relever que « le procès-verbal de l’assemblée générale litigieuse, établi le 19 avril 1995 a été notifié aux époux X… le 26 avril 1995 et distribué le 5 mai 1995 soit dans un délai de deux mois de la tenue de l’assemblée générale, le 24 mars 1995 ; que les époux X… avaient jusqu’au 5 juillet 1995 pour assigner le syndicat des copropriétaires en nullité de certaines résolutions de l’assemblée générale alors qu’ils n’ont fait délivrer leur assignation que le 27 décembre 1995 soit bien après l’expiration du délai de deux mois » ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher si les époux X… avaient été régulièrement convoqués à l’assemblée générale du 24 mars 1995, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 7 et suivants du décret du 17 mars 1967 ;
2°/ que le juge doit répondre à l’ensemble des moyens présentés par les parties ; que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que dans leurs conclusions d’appel, pour s’opposer à la prétendue forclusion de l’action en contestation des résolutions de l’assemblée générale du 24 mars 1995 invoquée par le syndicat des copropriétaires, les époux X… faisaient valoir « que le Tribunal, la cour d’appel de Paris et la Cour de Cassation ont tous constaté que M. et Mme X… avaient été irrégulièrement convoqués puisque le syndicat ne leur avait pas notifié leur convocation « au moins quinze jours avant la date de la réunion » comme prescrit au 2e alinéa de l’article 9 du décret du 17 mars 1967″ et que « la forclusion n’est pas opposable aux copropriétaires qui ont été irrégulièrement convoqués », si bien que « la demande de M. et Mme X… de voir prononcer la nullité de certaines résolutions de l’assemblée générale du 24 mars 1995 est parfaitement recevable » ; qu’en ne répondant pas à ce moyen péremptoire des écritures d’appel des époux X…, la cour d’appel a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, même fondées sur une absence de convocation ou sur une convocation irrégulière, les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions, qui leur est faite à la diligence du syndic dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l’assemblée générale ; qu’ayant constaté que le procès-verbal de l’assemblée générale avait été notifié aux époux X… le 26 avril 1995 et distribué le 5 mai 1995 et relevé qu’ils avaient jusqu’au 5 juillet 1995 pour assigner le syndicat en nullité de certaines résolutions de l’assemblée générale alors qu’ils n’avaient fait délivrer l’assignation que le 27 décembre 1995, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, en a exactement déduit que l’action des époux X… était irrecevable ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Observation
Des époux, propriétaires d’un appartement, ont assigné le Syndicat des copropriétaires à l’effet de voir prononcer la nullité de certaines résolutions décidées par l’assemblée générale des copropriétaires, à laquelle ils avaient été irrégulièrement convoqués puisque le syndicat ne leur avait pas notifié leur convocation « au moins quinze jours avant la date de la réunion ». Constatant que l’assignation du syndicat par les époux était intervenue bien après l’expiration du délai de deux mois prévu par l’article 42, alinéa 2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, la Cour d’appel les a déclaré forclos, et a donc rejeté leur demande.
Les époux se sont alors pourvu en cassation, en invoquant notamment, conformément à une jurisprudence bien établie, que la forclusion prévue par ce texte n’est pas opposable aux copropriétaires qui n’ont pas été régulièrement convoqués à l’assemblée.
Opérant un spectaculaire revirement de jurisprudence, la 3ème chambre civile de la Cour de cassation rejette le pourvoi et indique, dans un libellé qui laisse présager l’arrêt de principe, que « même fondées sur une absence de convocation ou sur une convocation irrégulière, les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions, qui leur est faite à la diligence du syndic dans un délai de deux mois à compter de la tenue de l’assemblée générale ».
Décision attaquée :Cour d’appel de Versailles, du 14 janvier 2004
Cour de cassation, chambre civile 3
Audience publique du mercredi 12 octobre 2005
N° de pourvoi: 04-14602 (Cassation partielle)
M. Weber., président
M. Rouzet., conseiller rapporteur
M. Guérin., avocat général
Me Carbonnier, la SCP Parmentier et Didier., avocat(s)