La dernière étude de la chaire Ville et Immobilier, publiée par Claire Juillard dans L’Observateur de l’Immobilier du Crédit Foncier, révèle que pour répondre à la demande de logement en région parisienne, il ne faut pas seulement construire plus de logements mais prendre en compte l’enjeu de mobilité résidentielle.
La loi du Grand Paris pose l’objectif de construire 70.000 logements par an, contre 40.000 en moyenne pendant les années 2000 sans prendre suffisamment en compte l’accroissement et la diversification des mobilités résidentielles. L’étude de Claire Juillard révèle les effets massifs de cette tendance dont trois sont déterminants.
Plus de flux migratoires à destination et en provenance de Paris
Entre 2003 et 2008, plus de 800.000 personnes se sont présentées à l’entrée de l’aire urbaine de Paris et 900.000 à la sortie. « Paris perd certes davantage d’habitants qu’elle n’en gagne, mais elle constitue de plus en plus une étape dans le parcours des Français et des migrants étrangers. L’enjeu est de consolider sa place dans les circuits de mobilité résidentielle français et internationaux », explique Claire Juillard, Co-directrice de la Chaire Ville & immobilier, Université Paris-Dauphine.
Alors que la concurrence s’accroît entre les métropoles, il en va de son dynamisme démographique et de son développement économique. L’amélioration des conditions d’accès au logement apparaît d’autant plus indispensable qu’elle profiterait aussi aux familles et aux classes moyennes et populaires, catégories qui, en plein malaise résidentiel, ont tendance à quitter Paris et sa région alors même qu’elles y remplissent des fonctions essentielles à l’équilibre socio-économique.
Plus de chocs dans les parcours résidentiels
Les parcours résidentiels suivent la multiplication des étapes du cycle de vie. L’instabilité familiale engage la perte du statut de propriétaire et le retour dans le parc locatif. Dans ce cas, l’enjeu est d’amortir le choc. Selon Claire Juillard, une des solutions réside dans la diversification de l’offre locative et dans le renforcement des moyens visant à redéployer l’offre à loyer intermédiaire. L’effort doit être consenti y compris en périphérie, là où, précisément, les ménages se voient contraints de renoncer à leur statut de propriétaire.
Plus de parcours bloqués
Lorsqu’ils ne subissent pas des accidents de parcours, les ménages sont de plus en plus nombreux à être captifs de leur logement. La cherté du logement apparaît clairement en cause dans leur blocage. A l’achat, la tendance générale reste à l’accroissement de la sélectivité des marchés immobiliers. Sur le marché locatif privé, le « saut à la relocation » pratiqué à l’occasion de changements de locataires fait également barrage. D’ailleurs, celui-ci est également préjudiciable à l’attractivité même de Paris du fait qu’il remet en cause la fonction d’accueil qu’assure traditionnellement le parc locatif privé auprès des migrants.
« Pour répondre à l’enjeu de mobilité résidentielle, il faut rééquilibrer l’équation logement. Les ménages démarrent leur parcours résidentiel dans Paris intra-muros ou en proche banlieue, les mieux dotées en petits logements dans le locatif privé, et le poursuivent en périphérie, la mieux pourvue en logements familiaux en accession. La diversification des solutions-logements en tout point du territoire leur permettrait d’emprunter d’autres canaux de mobilité résidentielle. Elle permettrait aussi d’amortir les chocs qui marquent les parcours. Bref, pour répondre à la demande de logement, il s’agit de concevoir l’offre non seulement comme un système mais à l’échelle de l’ensemble du territoire d’usage des ménages », conclut Claire Juillard.
Source : www.dauphine.fr