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Immobilier

Durée de l’obligation d’information de l’agent immobilier prévue dans le mandat de vente

A la suite de la condamnation par le juge à la réduction du prix de vente, consécutive à une action de l’acquéreur fondée sur la loi « Carrez » du 18 décembre 1996, le vendeur a appelé en garantie (outre les notaires rédacteurs) l’agence immobilière intervenue pour cette opération en vertu d’un mandant de vente stipulant l’obligation de l’agence d’informer le vendeur «de tous éléments nouveaux pouvant modifier les conditions de la vente, notamment en matière de prix et de législation».


Pour rejeter le recours formé contre l’agence immobilière, la cour d’appel avait retenu que le vendeur n’était pas fondé à invoquer un manquement de son mandataire à son obligation d’information, puisqu’à la date d’entrée en vigueur de la loi du 18 décembre 1996, le mandat avait pris fin.


La Cour de cassation censure ce raisonnement en indiquant que puisque le mandat conféré à l’agent immobilier s’était exécuté pendant la période au cours de laquelle avait été promulguée la loi « Carrez » du 18 décembre 1996, il en résultait que, pendant la durée de ce contrat, était survenu un élément nouveau susceptible de modifier les conditions de la vente dont l’agent immobilier s’était obligé à informer son mandant. L’agent immobilier n’a donc pas rempli son devoir de conseil au regard des dispositions du Code civil (Violation par la cour d’appel de l’article 1147 du Code civil. En l’occurrence, la condamnation de l’agence immobilière aurait également pu être prononcée sur le fondement de la responsabilité contractuelle).


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Met hors de cause, sur leur demande, M. X… et les sociétés civiles professionnelles Perrine-Merland, de la Passe, d’une part, et Milhac, Y…, Haguel, d’autre part ;

 

Attendu que M. X… qui, par acte du 3 octobre 1997 dressé par M. Y…, notaire associé, en présence de M. Z…, également notaire associé, avait acquis de M. A… des lots de copropriété d’une superficie déclarée, respectivement de 98 et 10 mètres carrés, calculée « en conformité des dispositions du décret du 23 mai 1997 par le vendeur », a demandé en justice la réduction du prix à raison de la moindre mesure de la superficie véritable et la condamnation du vendeur à lui restituer une partie du prix ; que ce dernier a appelé en garantie de cette condamnation Mme B…, agent immobilier, ainsi que les sociétés civiles professionnelles Milhac, Y…, Haguel et Perrine-Merland, de la Passe (les SCP) auxquelles appartenaient les notaires ayant instrumenté l’acte ; que l’arrêt attaqué accueille la demande de M. X… ;

 

Sur le second moyen :

 

Attendu que M. A… fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir rejeté son appel en garantie dirigé contre les SCP, alors que la faute des notaires reconnue par l’arrêt a fait perdre à M. A… une chance de vendre son appartement au même prix mais en mentionnant le mesurage réel de l’appartement; qu’en décidant que les notaires n’avaient pas à garantir M. A…, en tout ou en partie, alors que ce dernier devait, par leur faute, restituer à l’acquéreur une partie du prix perçu, la cour d’appel a violé l’article 1382 du Code civil ;

 

Mais attendu que, devant la cour d’appel, M. A… a seulement demandé à être garanti par les SCP « des condamnations prononcées à son encontre dans le cadre de l’action initiée par M. X… », sans prétendre que les fautes qu’il imputait aux notaires lui avaient fait perdre une chance de vendre son appartement au même prix, mais en indiquant la superficie réelle de celui-ci ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;

 

Et sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

 

Attendu que M. A… fait également grief à l’arrêt d’avoir rejeté son appel en garantie dirigé contre Mme B…, alors :

 

1 / que l’agent immobilier qui, sans y être légalement tenu, procède, pendant l’exécution de son mandat, à un mesurage de l’appartement à vendre, répond des fautes commises lors de ce mesurage ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, ayant relevé que Mme B… avait remis pendant l’exécution de son mandat et avant l’entrée en vigueur de la loi « Carrez » un plan pour 99,10 mètres carrés au candidat acquéreur, alors que l’appartement faisait 87,87 mètres carrés, ce qui démontrait le caractère fantaisiste du mesurage, ne pouvait décider qu’elle n’était pas responsable sans violer l’article 1147 du Code civil ;

 

 

2 / que l’agent immobilier qui, après l’expiration de son mandat et après l’entrée en vigueur de la loi « Carrez » du 18 décembre 1996, remet un plan avec des mesures erronées au candidat acquéreur, répond des fautes commises lors de ce mesurage ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que le mandat de Mme B… était expiré 6 mois après le 15 octobre 1996, soit le 15 avril 1997, mais que le 30 juin 1997, soit après l’entrée en vigueur, le 18 juin 1997, de la loi précitée, Mme B… avait remis un plan à M. X…, candidat acquéreur, mentionnant que l’appartement faisait 98 mètres carrés, alors qu’il en faisait en réalité 87,87 mètres carrés ; qu’en refusant de retenir la faute de Mme B… au motif que son mandat avait pris fin, la cour d’appel a violé l’article 1382 du Code civil ;

 

 

Mais attendu, d’abord, que la cour d’appel a retenu que c’est l’indication erronée d’une superficie de 98 mètres carrés qui avait, compte tenu d’une superficie réelle de 87,87 mètres carrés, justifié la réduction de prix demandée par l’acquéreur ; que, dès lors, et à supposer que l’indication d’une superficie de 99,10 mètres carrés ait été donnée par l’agent immobilier pendant la durée du mandat, ce que les juges du fond n’ont pas constaté, une telle erreur serait sans lien de causalité avec le préjudice invoqué par M. A… ; qu’ensuite, ce dernier n’avait pas recherché la responsabilité quasi-délictuelle de l’agent immobilier pour des faits commis postérieurement à l’expiration de son mandat ; que mal fondé en sa première branche, le moyen est nouveau et, mélangé de fait, partant irrecevable en son second grief ;

 

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

 

Vu l’article 1147 du nouveau Code de procédure civile ;

 

Attendu que pour rejeter le recours en garantie formé contre Mme B…, l’arrêt attaqué retient que M. A… n’était pas fondé à invoquer un manquement de son mandataire à l’obligation de l’informer de tous éléments nouveaux pouvant modifier les conditions de la vente, notamment en matière de prix ou de législation, puisqu’à la date d’entrée en vigueur de la loi du 18 décembre 1996, le mandat avait pris fin ;

 

Attendu, cependant, que la cour d’appel avait constaté que le mandat conféré à Mme B… s’était exécuté pendant la période du 15 octobre 1996 au 15 avril 1997 et que pendant cette période avait été promulguée la loi précitée du 18 décembre 1996 qui a instauré l’obligation de mentionner, à peine de nullité, la superficie des lots ou fractions de lot de copropriété dans les actes de vente de ces droits immobiliers et ouvert une action en réduction proportionnelle du prix lorsque la superficie indiquée à l’acte est inférieure d’un vingtième à la superficie appréciée selon des critères devant être définis par voie réglementaire, ce dont il résultait que, pendant la durée du contrat, était survenu un élément nouveau susceptible de modifier les conditions de la vente dont l’agent immobilier s’était obligé à informer son mandant ;

 

Qu’en statuant comme elle l’a fait, sans tirer les conséquences légales de ses propres constatations, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions rejetant l’appel en garantie formé par M. A… contre Mme B…, l’arrêt rendu le 30 avril 2002, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties concernées dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;

 

Condamne Mme B… aux dépens ;

 

Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne M. A… à payer à M. X… la somme de 1 200 euros ;

 

rejette la demande des sociétés civiles professionnelles Perrine-Merland, de la Passe, d’une part, et Milhac, Y…, Haguel, d’autre part ;

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille cinq.


Décision attaquée : cour d’appel de Paris (2e chambre, section A) du 30 avril 2002
Cour de cassation, chambre civile 1
Audience publique du mardi 21 juin 2005
N° de pourvoi: 02-18898 (Cassation partielle)
Président : M. ANCEL, président

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Isabelle DAHAN

Rédactrice en chef de Monimmeuble.com. Isabelle DAHAN est consultante dans les domaines de l'Internet et du Marketing immobilier depuis 10 ans. Elle est membre fondatrice de la Fédération Française de l'Immobilier sur Internet (F.F.2.I.) www.ff2i.org et membre de l’AJIBAT www.ajibat.com, l’association des journalistes de l'habitat et de la ville. Elle a créé le site www.monimmeuble.com en avril 2000.

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